Bulletin d'Analyse Phénoménologique https://popups.uliege.be/1782-2041 fr L'intuition de l'infini ou les imaginaires de la finitude, d’Ernst Cassirer à Hans Blumenberg https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1547 Cet article vise la proposition suivante : quand nous, sujets philosophants ou non, parlons de l’infini, nous ne parlons en fait guère mieux que d’une intuition. Nous parlons d’une intuition en tant qu’il ne s’agit jamais que des anticipations de notre perception de ce que cela ferait que de suspendre, ponctuellement, la finitude de nos facultés logico-formelles. Nous ne pouvons avoir de l’infini qu’une idée de l’ordre de l’imaginaire, permise par celle de nos facultés dont nous avons proposé ailleurs qu’elle serait de l’ordre du régime esthético-formel. Blumenberg propose que la conscience soit le produit dérivé d’un phénomène interne aux facultés de l’entendement : son principe de crise dans l'économie de l’effroi résultant de la rencontre entre facultés finies et l’intuition du produit de la suspension de la finitude de ces mêmes facultés. La conscience ne serait guère possible sans cette crise interne à et fondamentale de l’entendement, sans la collusion formidable entre les deux régimes quantitatifs aux facultés du sujet : le régime logico-formel, rivé à la finitude, et le régime esthético-formel, tourné vers l'intuition de l’infini. De là voulons-nous présenter que l’infini n'est ni un objet extérieur susceptible d'une vérification dans ses caractéristiques par l’intersubjectivité, ni le produit d'une inspiration. Il s’agirait de l'une des conditions de matérialisations de la conscience. This article attempts to examine a hypothesis: When I, philosophizing subject or not, speak of the infinite, I am in fact speaking about the intuition of an idea or the intuition of a part of the world. I speak from the necessity to anticipate the limits of my perceptions. What would it be like to suspend, momentarily, the finitude of my logical-formal faculties and thus, suspend also the causal experience in my consciousness? I can only have an idea of the infinite in the order of the imaginary, permitted by those rational faculties that belong to the order of the aesthetic-formal regime of the synthetic activity of cognition. According to Blumenberg, consciousness is the derivative product of a phenomenon internal to the faculties of cognition: Its principle of crisis resides in the economy of the fear (Schrecken) that results from the collision between finite faculties on the one hand and the intuition of what could be that results from the suspension of the finitude of these very same faculties on the other. Consciousness would hardly be possible without this internal and fundamental crisis in the a priori synthetic activity of cognition, without the formidable vertigo arising from the confrontation of the two quantitative regimes of the subject’s faculties: the logical-formal regime, wedded to finitude, and the aesthetic-formal regime, turned towards the intuition of the infinite. From there I would like to present the infinite neither as an external object susceptible to a verification in its characteristics by intersubjectivity, nor as the product of an inspiration. It could be understood instead as the product of the conditions of materialization of consciousness. Wed, 26 Mar 2025 00:00:00 +0100 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1547 Die Rolle des Anderen bei Husserls transzendentaler Intersubjektivität und bei Heideggers Mitsein https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1535 Husserl’s and Heidegger’s positions on intersubjectivity are often perceived as being diametrically opposed. While Husserl privileges a face-to-face approach to intersubjectivity, Heidegger describes Dasein’s “being-with” in the context of a hermeneutical description of the world. Moreover, Heidegger sharply criticizes Husserl’s intersubjectivity theory, accentuating the distance between the two on this topic. In this article, I argue that despite the many differences between Husserl’s and Heidegger’s approaches to intersubjectivity, the two philosophers have some notable points in common. I illustrate that, according to Husserl’s and Heidegger’s explicit intents, the bracketing of the Other is a necessary step for the constitution of the Self. However, I hold that in both philosophers, another position on the relationship between the Self and the Other can be implicitly found, which grants the Other a constitutive role for the possibility of the Self. I maintain that both authors are led to the last position thanks to the phenomenological method, more specifically thanks to the concept of intuition implied in such a method. Wed, 26 Feb 2025 00:00:00 +0100 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1535 Daniel Giovannangeli, en reconnaissance https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1521 Il y a vingt ans, en 2005, paraissaient les premiers numéros du Bulletin d’Analyse Phénoménologique, revue scientifique en ligne éditée par l’unité de recherches Phénoménologies — aujourd’hui Centre de recherches phénoménologiques (Creph) — de l’Université de Liège, elle-même fondée quatre ans plus tôt. Depuis lors, ce ne sont pas moins de 135 numéros, dont 14 numéros spéciaux contenant des actes de colloques et 10 numéros de recensions, qui ont été publiés dans la revue, et ce sur tous les auteurs et tous les champs d’investigation de la phénoménologie, reflétant par là la diversité des préoccupations de l’équipe originelle1. Dans le tout premier numéro figurait un texte intitulé « L’homme en question2 », dû à Daniel Giovannangeli, figure fondatrice tout à la fois du Centre de recherches phénoménologiques et du Bulletin d’Analyse Phénoménologique, à qui on avait confié le soin de donner sa première impulsion à la revue. Aujourd’hui, le Bulletin a le grand plaisir de publier un autre article de D. Giovannangeli, « Pierre Bourdieu, la croyance originaire et la phénoménologie », et de marquer par cette occasion deux autres anniversaires. Le Bulletin d’Analyse Phénoménologique est d’abord très heureux de saluer, quelques mois après son quatre-vingtième anniversaire, le travail d’un philosophe qui n’a cessé d’arpenter l’œuvre des figures majeures de la phénoménologie, de Husserl et Heidegger à Granel et Janicaud, en passant par Sartre, Merleau-Ponty, Dufrenne et Ricœur. Au long Thu, 20 Feb 2025 00:00:00 +0100 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1521 Pierre Bourdieu, la croyance originaire et la phénoménolo https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1522 Pour Pierre Bourdieu, les conclusions de l’analyse phénoménologique de la doxa demandent à être elles-mêmes interrogées sur leurs conditions sociales de possibilité. Bruce Bégout crédite Bourdieu d’avoir montré que la prétendue originarité phénoménologique est elle-même le résultat d’une orthodoxie. Cependant, tout en considérant que Bourdieu dégage à juste titre la stratégie de domination d’une classe sur une autre, il propose d’interroger en outre la domination de la quotidienneté sur toutes les classes. Thu, 20 Feb 2025 00:00:00 +0100 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1522 Recensions (décembre 2024) https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1515 Hegel et la métaphysique du propre. Une lecture de Remy Rizzo, La vie comme concept et comme expérience de soi. Essai sur la genèse sensorielle de la conscience : Hegel – Plessner – Straus, Peeters, Louvain-la-Neuve 2023, 398 pages. Prix : 96 €. ISBN : 9789042951396.   Comme l’indique son titre, l’ouvrage de Remy Rizzo contient plusieurs livres en un : La vie comme concept et comme expérience de soi. Essai sur la genèse sensorielle de la conscience : Hegel – Plessner – Straus. Il s’agit à la fois d’une lecture de l’anthropologie de Hegel, à laquelle est consacrée toute la première partie de l’ouvrage, et d’un commentaire de deux autres auteurs dans la seconde partie du texte : Helmuth Plessner et Erwin Straus. S’inscrivant dans le renouveau des études sur l’anthropologie hégélienne et l’anthropologie philosophique allemande du début du XXe siècle, Remy Rizzo trace un chemin singulier qui le conduit, dans une troisième partie conclusive, à une phénoménologie de la vie qui n’est pas sans écho avec le projet de Renaud Barbaras, avec lequel l’auteur discute à plusieurs reprises. Cet ouvrage issu de sa thèse présente ainsi, sur presque 400 pages, à la fois un remarquable commentaire des auteurs qu’il analyse et un horizon philosophique original, de sorte que les enjeux en histoire de la philosophie et en philosophie contemporaine ne cessent de se croiser et de s’enrichir mutuellement. Placée sous le sceau de Canguilhem, qui avait déjà questionné l’articulation du vécu (la vie co Fri, 27 Dec 2024 00:00:00 +0100 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1515 Introduction https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1481 La discipline phénoménologique a fait de la « question » un enjeu important de ses analyses. Quelques études l’attestent : l’ouvrage de Günther Pöltner, Zu einer Phänomenologie des Fragens. Ein fragend-fraglicher Versuch1, ainsi que celui de Heinrich Rombach, Über Ursprung und Wesen der Frage2. Tout récemment, Joel Hubick a publié un ouvrage de portée systématique, centré sur trois grandes figures de la tradition phénoménologique : Husserl, Heidegger, Patočka3. À s’en tenir aux façons dont Husserl prête attention à la nature du doute et de la question dans les Analyses sur les synthèses passives4, ou à l’analyse que Heidegger, tout au début d’Être et temps5, consacre à la structure formelle de la question, on ne peut qu'être frappé par le lien fondamental du thème de la question à l’exercice de la phénoménologie. Il ne faut d’ailleurs pas passer sous silence la tradition anglo-saxonne, en particulier la tradition analytique : de Collingwood aux approches wittgensteiniennes, de Carnap à Jaakko Hintikka (Interrogative Model of Enquiry6), au livre Mortal Questions de Thomas Nagel7, la philosophie du vingtième siècle dans son ensemble a prêté une attention toujours plus croissante à la nature de la question8. La difficulté ici tient en ce que la question se laisse aborder phénoménologiquement à partir de plusieurs perspectives et ordres de problèmes : i) Tout d’abord, le statut de la question dans la théorie du jugement, dont on sait combien elle a pu jouer un rôle fondamental da Fri, 12 Apr 2024 00:00:00 +0200 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1481 Husserl interprète de Bolzano : le statut de la question dans la théorie phénoménologique du jugement https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1483 Cet article présente les positions de Bolzano puis de Husserl sur le statut de la question dans leurs théories respectives du jugement, puis examine la critique explicitement adressée à Bolzano par Husserl dans les Recherches logiques. L’enjeu de l’article est i) de montrer l’importance de la psychologie pour décrire l’acte de la question compris comme désir ; ii) inscrire la question dans ses contextes d’énonciation spécifiques qui peuvent lui donner une signification judicative ; iii) indiquer le rôle crucial que la question joue dans l’invention husserlienne de la théorie du remplissement ainsi que dans l’invention de la phénoménologie en général. L’enjeu est de se demander ce qui apparaît lorsqu’on pose une question, dont nous montrons qu’elle limite l’horizon des possibilités de l’apparaître, et ainsi structure en le limitant le champ de l’apparaître. Fri, 12 Apr 2024 00:00:00 +0200 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1483 “My life and that of Plato are the same” (Hua XIV, 198). Husserl and the philosophical question https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1486 The philosophical question has an existentially touching dimension but, at the same time, entails an experience that goes beyond the self. It involves the contemporary others that ask the same questions and those who lived before beset by similar doubts. This work explores this second aspect. It reflects on some methodological issues related to the kind of question we address when we look at the past. We will characterise some views on the ancient philosophical question often associated with first philosophy. Then, we will consider some contemporary views, and in this framework, we will dwell on Husserl's contributions related to the retrospective question, the institution of meaning, and the notion of Denkergemeinschaft. Fri, 12 Apr 2024 00:00:00 +0200 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1486 L’irréductibilité de la question et le destin ontologique de la phénoménologie (Husserl, Heidegger) https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1492 Comment la phénoménologie peut-elle conférer au phénomène du questionnement une quelconque irréductibilité ? On sait que la thèse d’intentionnalité permet à Husserl de combattre le psychologisme et de prendre la mesure d’une conscience ouverte à la transcendance de l’objet et plus encore aux lois d’essences qui régissent universellement et nécessairement les différentes régions de l’apparaître. Mais cela suffit-il à rendre la conscience questionnante ? Si tel n’est pas le cas, et si la conscience intentionnelle est moins ouverte au « mystère » de la phénoménalité que prescriptive des normes sous lesquelles le donné apparaît, alors n’y a-t-il pas un risque de perdre le bénéfice du concept d’intentionnalité lui-même, en repliant la conscience dans un champ d’immanence contrôlé par une mécanique des opérations de la conscience ? C’est ce dont nous discutons dans un premier temps. Dans un second temps, nous aborderons l’ontologie de Heidegger dans Être et temps en montrant comment elle résout ce problème par la prise en compte de l’irréductibilité de la question de l’être, et concomitamment de l’ouverture à la question de l’être dans le Dasein, cet étant que nous sommes et qui a l’être en question. Enfin, nous interrogerons la pensée du second Heidegger afin de poser le problème de savoir comment maintenir ouverte l’irréductibilité de la question de l’être, alors même que cette question ontologique principielle semble, dans l’Histoire de l’être (Seynsgeschichte), de plus en plus recouverte par l’emprise du paradigme de la technique et de son intensification, plongeant notre monde contemporain, comme le dit Heidegger, dans une absence à peu près totale de questionnement. Fri, 12 Apr 2024 00:00:00 +0200 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1492 « Demande de sens » https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1495 Le texte circonscrit la vénérable question du sens et de sa « demande ». Du point de vue de la tradition, elle se formule en une autre : à quoi sert la philosophie ? D’une part, nous nous mouvons toujours par avance dans cette question du sens car le mot s’entend de multiples façons. D’autres part, cette pluralité emporte le questionnement de la philosophie elle-même, comme exercice sensé du sens, pratique orientée de l’argumentation, de la déduction, du syllogisme etc. Cette situation détermine la demande de philosophie : demande « sociale » d’abord, la doxa appelant l’epistémè philosophique ; demande « disciplinaire » ensuite, plus strictement ontologique. Fri, 12 Apr 2024 00:00:00 +0200 https://popups.uliege.be/1782-2041/index.php?id=1495