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Qu’est-ce que la « phénoménologie érotétique » ? La « question de toutes les questions » en phénoménologie
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Résumé
Cette contribution traite de la « question » dans une perspective phénoménologique. L'objectif fondamental est de montrer qu'en dehors du « principe de tous les principes », la phénoménologie soulève une « question de toutes les questions » qui croise des aspects méthodologiques et systématiques fondamentaux. À travers une analyse des traitements heideggérien, husserlien et richirien du statut de la question, qui revisitent le § 2 de Sein und Zeit, un extrait de la quatrième des Méditations cartésiennes de Husserl et les Méditations phénoménologiques de Richir, l’auteur pose les fondements d'une « phénoménologie érotétique ».
Table des matières
1Le philosophe et théologien autrichien Emerich Coreth (1919-2006) a élaboré dans la seconde moitié du vingtième siècle une « phénoménologie de la question » ou encore ce que l’on pourrait appeler une « phénoménologie érotétique1 ». Dans la présente contribution, il s’agira d’abord d’introduire à cette dernière en considérant ses dimensions logiques, métaphysiques et, en particulier, phénoménologiques2. À partir de là, nous montrerons qu’en dehors du « principe de tous les principes », qui est bien connu, une « question de toutes les questions » est soulevée qui croise des aspects méthodologiques et systématiques fondamentaux. Cette question est-elle celle de l’être ? Pour y répondre, il faudra poser à nouveaux frais la question du statut du « sujet » et de l’« objet » dans tout rapport intentionnel et examiner s’il ne fait pas intervenir une troisième instance (qui sera caractérisée comme une « absence », voire comme un « rien »). Il apparaîtra dès lors que cette « question de toutes les questions » ouvre à des projets qui réservent à la phénoménologie des destins divers et variés.
Introduction
2Le locus classicus d’une philosophie de la question dans une perspective logique (dans la tradition philosophique occidentale) est, à côté du Menon de Platon, l’Organon aristotélicien (notamment les chapitres 1 et 2 du deuxième livre des Seconds analytiques, le chapitre 11 du premier livre des Topiques ainsi que le chapitre 11 de De l’interprétation). Force est de constater qu’Aristote s’intéresse à une logique de l’énoncé plutôt qu’à une logique de l’interrogation ou de la question. Ce n’est en réalité qu’à partir du vingtième siècle que la « question » est reconnue comme relevant du domaine « logique » et ce, aussi bien dans la logique analytique3 (chez Mary et Arthur Prior, Tadeusz Kubiński, Nuel Belnap, Lennart Åqvist ou David Harrah) que chez les phénoménologues4 (Alexander Pfänder, Roman Ingarden ou Friedrich Löw). L’énoncé et la question se trouvent alors clairement différenciés. À partir de là, on examine leur rapport (l’énoncé étant considéré comme réponse à une question), d’une part ; et on cherche à mettre en évidence les énoncés impliqués dans la question, d’autre part (nous y reviendrons plus loin de façon plus détaillée). Dans la phénoménologie du vingtième siècle, une fois que la question est analysée eu égard à sa structure, elle est interprétée par Heidegger de façon radicale comme « question de l’être ». Avec la troisième génération de phénoménologues, la problématique de la question s’oriente dans d’autres directions. Avant de traiter de ces points de façon plus précise, retraçons d’abord l’état de la problématique chez les pères fondateurs de la phénoménologie en l’inscrivant dans son système de coordonnées générales qui a trait, en particulier, à la dimension anthropologique de la question.
Caractérisation de la question
3Premièrement, la problématique de la « question » est un phénomène spécifiquement humain, l’humain étant un homo interrogans (John Bruin). Seul l’humain questionne, interroge, recherche le sens de ce qui est. L’expression ontologique de cet état de choses est que, contrairement à l’animal, l’humain n’est pas inhibé ou « encerclé », c’est-à-dire qu’il n’est pas « lié » à quelque étant que ce soit, mais il est « ouvert au monde » (Scheler), capable de « transcender » l’étant vers l’être (Heidegger). La question est le signe du détachement de toute objectivité fixe, de son ouverture à l’au-delà et à l’en deçà de toute stabilité instituée (« gestiftet »).
4Deuxièmement, en tant que phénomène langagier, la question a son origine dans le dialogue. Pour clarifier ce statut dialogal, il convient de distinguer entre la réflexion et la question proprement dite. La réflexion philosophique est un « s’enquérir de… » qui n’engage pas forcément un interlocuteur ou une interlocutrice. Il s’agit la plupart du temps d’un « dialogue de l’âme avec elle-même ». En revanche, quand je m’interroge sur quelque chose, je demande toujours en même temps quelque chose « à quelqu’un ». À la différence de la réflexion, la question instaure ainsi un rapport triangulaire entre quelqu’un qui questionne, quelqu’un à qui la question est adressée et ce sur quoi porte la question.
5Troisièmement, la question — à l’instar du langage qui peut devenir le medium du penser — peut se désinscrire de son cadre intersubjectif et passer d’une « demande (Anfrage) » à une « question ‘objective’ (Sachfrage) ». Cela ne signifie pas pour autant que cette dernière se soustrairait à la communication langagière. La « question ‘objective’ » (ou scientifique) a son domaine d’objet spécifique et formule à chaque fois un questionnement qui lui est propre. Celui-ci appartient en outre à un contexte herméneutique particulier.
6Dans les sciences mathématisées, le domaine d’objets étant strictement délimité et l’horizon de compréhension étant bien défini, il est clair que ce qui est recherché (et questionné) est indiqué d’avance. En revanche, les sciences humaines, et la philosophie en particulier, sont caractérisées par le fameux « cercle herméneutique » (mis en évidence par Heidegger) : lorsqu’on cherche à comprendre quelque chose, cette compréhension implique des conditions d’intelligibilité qui ne se dévoilent qu’au terme du processus de compréhension. Les choses se présentent de façon analogue pour la question philosophique : ce que la question vise ouvre à son tour à une totalité du questionnable. Rien ne saurait résister au désir et à la nécessité (!) d’être questionné. Ce questionnement revient à celui du « fondement » de « tout ». Or, tandis que Hegel fait commencer le questionnement philosophique (ou « logique ») par la dialectique de l’être et du néant, Heidegger s’enquiert d’abord du sens de l’être. Comme un tel questionnement suppose la possibilité d’un questionner en général, il faut d’abord clarifier la « structure de la question ». Le texte de référence est bien entendu le § 2 de Sein und Zeit.
La question dans Sein und Zeit (Heidegger)
7Dans l’analyse de la question, Heidegger se laisse guider par la « Sprache » (= à la fois le langage et la langue), plus particulièrement par l’idée que « die Sprache spricht » (la langue/le langage parle). Il est ainsi attentif au potentiel conceptuel à même les mots eux-mêmes. Cela pose un problème lorsqu’il faut traduire sa pensée dans une autre langue — en l’occurrence en français. On sait que Heidegger met en évidence trois aspects de la question : le « Gefragtes », le « Befragtes » et l’« Erfragtes », traduits par Martineau respectivement par : le « questionné », l’« interrogé » et le « demandé ». Même si, globalement, cette traduction n’est pas insatisfaisante, elle exige certaines clarifications importantes.
8Toute question a, d’après Heidegger, un commencement (Anfang), d’une part, et une fin, un but (Ziel), un résultat (Ergebnis), d’autre part. Quelle est la première indication fournie par la langue ? Toute façon de questionner est un « Anfragen » (on remarque donc le lien entre Anfragen et Anfang). La meilleure traduction en est : une demande. La question commence par une demande qui anticipe déjà l’« Erfragtes » — le demandé — où le questionné parvient à son but. L’« Anfang » anticipe le résultat qui, en retour, lui confère son sens final. Que demande plus particulièrement la « demande » ? Elle cherche à « capturer (fangen) » quelque chose (l’« Anfang » vise ainsi toujours un « Fangen »). Ce qui, dès le commencement, doit être capturé, c’est cela même qui est recherché (gesucht).
9Heidegger affirme que toute question est une recherche, questionner est (re)chercher. Ces deux termes sont dans une proximité indéniable. En général, ce qui est cherché (parce qu’il est perdu, égaré, etc.) se situe dans l’horizon d’une présence et d’une donation possible. Quand on cherche quelque chose, on sait déjà — et toujours déjà — ce que l’on cherche. Mais ce n’est pas à chaque fois le cas pour la question. Celle-ci peut aussi ouvrir cela même qui est d’abord questionné, sans qu’il soit déjà déterminé (ou même deviné).
10Quoi qu’il en soit, c’est le recherché (Gesuchtes) qui « conduit » « (geleiten) » la question. La question « de… » est ainsi fondamentalement caractérisée par cela-même qui est questionné, par le « Gefragtes ». Partout, Heidegger joue ici avec le préfixe « ge- ». Le « ge- » dit au moins deux choses. D’un côté, il circonscrit ce qui se rassemble (versammeln). Le rassemblé par excellence est le « logos ». Dans le « Gefragtes », dans le questionné, se rassemble très précisément ce que la question questionne. D’un autre côté, il exprime un « Geschehen » (advenir), momentané, qui renvoie à l’inchoativité du questionner.
11Le « Befragtes » (l’interrogé) est la deuxième composante de la question. Le préfixe « be- » désigne en général une thématisation approfondie. Dans notre contexte, le questionné doit être déterminé (bestimmt) et être saisi dans le concept (Begriff). Pour Heidegger, la question est ainsi une recherche (Suche) au sens d’une investigation (Untersuchung). Avec la mise en rapport explicite du « Befragtes » et du « Begriff », Heidegger indique qu’il n’abandonne pas la dimension théorique de son projet.
12Du questionnement (Fragen) à même l’interrogé (Befragtes) résulte le demandé (Erfragtes). Le préfixe « er- » est le plus important au sein du lexique heideggérien (cf. « Ereignis », « Erkenntnis », « Erfahrung », « Erscheinung », « Ermöglichung », « Ergründen », « Erschlossenheit », etc.). L’interrogé (Erfragtes) livre en effet le résultat (Ergebnis) du questionner — celui-ci y est « connu (erkannt) ». Là encore, l’horizon théorique de l’analyse heideggérienne de la question apparaît avec évidence.
13Heidegger précise enfin que le questionner est un comportement (Verhalten) du « questionneur » (Frager). Le « Verhalten » du Dasein renvoie toujours à son propre sens d’être (Seinssinn). Le questionner entre ainsi dans la constitution ontologique du Dasein.
14Que pouvons-nous alors retenir de cette analyse structurale de la question ? Il s’agit d’un double mouvement entre « commencement » et « fin » qui s’appellent et se déterminent mutuellement. Ce double mouvement s’effectue en vue d’une élévation au concept de cela même qui est questionné. Et tout cela concerne la structure ontologique du Dasein.
Les différents types de questions
15Ce n’est que parce que le ou la philosophe a la capacité de questionner en général que nous pouvons questionner ceci ou cela et, dès lors, la totalité de l’étant ainsi que le sens de son être. La réflexion sur la question en découle immédiatement. La question du commencement de la question, en l’accomplissant, indique que le commencement est le questionner lui-même. Le geste le plus radical du questionnement philosophique exige une réflexion sur la question de la question.
16Or, quels sont les différents types de questions ? On peut distinguer entre des questions empiriques qui renvoient à des états de choses vérifiables grâce à l’expérience, d’un côté, et des questions métaphysiques qui dépassent ce cadre de l’expérience, de l’autre ; en outre, on peut mettre en évidence des questions objectives se rapportant à la teneur réelle d’un objet (« qu’est-ce que X ? ») et des questions personnelles ou existentielles qui attendent que l’on s’ouvre personnellement, voire intimement (« me fais-tu confiance ? ») ; on différencie par ailleurs les questions théoriques et les questions pratiques ; et on distingue enfin (à l’instar de Heidegger) entre des questions ontiques et ontologiques selon que l’on s’oriente par rapport à un étant présent où à l’être comme fondement de l’étant.
17Un autre aspect de cette réflexion sur la question de la question consiste dans la nécessité d’élaborer une « logique de la question », étant donné que toute question est structurée de façon langagière et/ou logique. Ce qui distingue la question d’un simple énoncé logique, c’est que, en son essence, en dehors de posséder un « contenu propositionnel », elle s’accomplit de façon effective (« en acte »). Aussi faut-il distinguer la question (comme énoncé interrogatif) et le questionner (comme accomplissement de la question). Si la question s’origine dans le questionner, elle peut néanmoins clarifier le statut de ce dernier. Quelle est la structure spécifique de la question qui la distingue de l’énoncé ?
18Ce qui relie la question et l’énoncé, c’est que, en général, la question « attend » un énoncé et que l’énoncé est une réponse à la question. Mais cela ne vaut pas pour toute sorte de question. Il y a aussi des questions qui n’attendent pas un énoncé, mais une décision (« est-ce que je vais au cinéma ce soir ou est-ce que je reste à la maison ? ») et/ou une action (« est-ce que lors de cette prise d’otage la police va intervenir ou non ? ») qui implique certes un énoncé (acquiesçant ou non). C’est précisément l’essence de la question que de laisser ouverte la possibilité de réponses alternatives. Carnap a distingué à ce propos entre des « w-questions » (what, who, where, when, why, etc.) qui relèvent d’un certain contenu, et des « whether-questions » qui attendent une décision. La question se rapporte ainsi à une certaine classe de réponses qui détermine si la réponse est sensée ou non, la réponse correcte demeurant toutefois ouverte.
19Mais toute question est-elle sensée ? N’y a-t-il pas des questions qui sont dénuées de sens ? La réponse est sans appel : la question est originairement douée de sens et ne se laisse pas éliminer. En revanche, elle peut avoir des présupposés faux, ce qui rend la réponse impossible (ces présupposés étant la plupart du temps non thématiques). Mais l’on peut toujours chercher ses conditions de possibilité, ce qui la rend légitime comme question (sa négation étant infirmée par le fait de son accomplissement). La question ne peut donc être fausse en tant que question, mais seulement eu égard à ses présupposés. Que peut-on établir plus précisément à propos des « conditions de possibilité » de la question et du questionnement ?
20La question comme « énoncé interrogatif » a des présupposés logiques ; le questionner comme « accomplissement du questionnement » repose sur des conditions transcendantales. Même si les présupposés logiques sont faux, cela n’invalide pas la possibilité de l’accomplissement de la question. Les conditions transcendantales concernent donc très précisément la possibilité de cet accomplissement, autrement dit, la possibilité de l’accomplissement repose sur ces conditions transcendantales. Or, l’accomplissement factuel remplit ces dernières. Elles doivent donc pouvoir être induites à partir de cet accomplissement.
21Le questionnement se trouve devant un paradoxe : je ne peux questionner que si, à la fois, je sais et je ne sais pas ce que je questionne. Si je le sais, je n’ai plus besoin de questionner ; et si je ne le sais pas, je ne sais pas vers où m’orienter dans le questionnement. Je dois donc disposer d’une sorte de savoir préalable qui me guide dans le questionnement. De quelle nature est-il ?
22Le savoir préalable ici en cause se rapporte au contexte sémantique de la question. Celui-ci s’inscrit plus largement dans le « monde » (autant dans la « Lebenswelt » husserlienne que dans l’« être-au-monde » heideggérien) qui constitue l’horizon mondain de toute question. Cet « horizon mondain » est caractérisé à son tour par la « structure questionnante du monde ». Il est donc lui aussi questionnant. Si mon monde est limité, « fini », il n’est pas pour autant clos, mais ouvert. Les horizons de nos expériences s’étendent sans cesse. Ils renvoient à des dimensions de sens toujours nouvelles. Ils ont de ce fait la structure de la question. Cela n’est pas une caractéristique des contenus de l’expérience, mais du questionnant lui-même (à savoir de l’humain). Aussi la structure questionnante du monde est-elle constituée par le questionnement comme trait fondamental de l’humain. Il s’ensuit que le savoir préalable ne saurait être un savoir empirique. Il est bien plutôt au fondement de tout savoir empirique et constitue le mouvement transcendant du questionner (au sens où le questionner dépasse toute détermination empirique particulière). Aussi les conditions transcendantales du questionnement ouvrent-elles à ses conditions métaphysiques.
23Ces conditions métaphysiques sont le revers questionnant de la médaille dont l’avers est caractérisé par l’unité dialectique (en mouvement) de la « découverte » et de l’« invention » (unité que l’on trouve chez Fichte, Derrida, Richir, etc.). Le questionnement, considéré selon ses conditions métaphysiques, a lui aussi une unité dialectique (également en mouvement) : c’est celle entre le concept et l’accomplissement, entre un savoir conceptuel (thématique) et un savoir (non thématique) posé dans l’accomplissement du questionnement. Ce dernier dépasse la question posée thématiquement et soulève de nouvelles questions dont les réponses exigent à leur tour un nouvel accomplissement du questionnement. « Tout » peut être questionné. Mais du coup, nous supposons une attente de sens. Ce contenu est à son tour questionné. Toute question de ce qui « est » suppose alors l’horizon de ce qui « est » (au-delà). Ainsi se circonscrit la sphère de l’être dans sa totalité. La question ouvre l’« horizon de l’être » comme le domaine au sein duquel se meut tout questionnement. L’humain pose la question de l’être parce qu’il en a toujours déjà un savoir (métaphysique) préalable.
Du Was ? au Wer ?
24Si la philosophie occidentale a vu le jour avec Parménide, l’on ne saurait nier que l’Éléate ne fut pas — non pas plus qu’Héraclite — l’inventeur du questionnement et du questionner en philosophie. Son invention majeure fut l’établissement d’une norme de vérité du penser. N’est une pensée vraie que celle qui s’oriente par rapport à ce qui est. Telle est la signification profonde du « to gar auto noein estin ti kai einai » (= c’est le même, penser et être). Dans son Poème, Parménide a posé — à l’instar d’un Dieu ou du moins d’un prophète — quel principe doit observer et respecter la recherche de la vérité. Mais, en matière de pensée, l’humain ne peut se satisfaire d’une soumission à une parole proférée. Penser, c’est rechercher, questionner, et ce « comportement » met en jeu la « constitution ontologique » de notre « existence » (Heidegger) ou cela même qui fait quel type d’humain l’on est (Fichte). Aussi la « question de la question » paraît-elle être celle de la clarification de l’articulation du « Was » et du « Wer » : de la teneur « réelle (sachhaltig) », objective, de la question, d’un côté, et du site d’où le questionner se déploie, de l’autre. Cela résultait déjà des conditions métaphysiques du questionnement autant que de l’analyse heideggérienne de la structure de la question. Approfondissons à présent les conséquences phénoménologiques de ce résultat.
L’approche phénoménologique de la question
25Cette problématique rejoint, et c’est remarquable, le paradoxe — inaugural et profond — de la phénoménologie. Que celle-ci prenne son point de départ dans un paradoxe est tout à son honneur, car, comme l’a remarqué à juste titre Jean-Luc Marion, « quand la philosophie ne s’intéresse pas à des paradoxes, elle ne vaut pas, elle non plus, une heure de peine5 ». En quoi consiste le paradoxe inaugural de la phénoménologie ?
26La « région » spécifique des « phénomènes » ne se réduit ni aux objets, ni aux représentations psychiques (au sens des représentations mentales et empiriques). Elle correspond plutôt, comme Husserl le précise explicitement dans les Ideen I, aux « vécus de conscience » ou, tout simplement, aux « vécus » (« Erlebnisse »). Déjà dans la cinquième des Recherches logiques Husserl avait fixé de la sorte la première acception — la plus fondamentale — de la « conscience ». On ne saurait insister assez sur l’importance de ce concept de « vécu ». Husserl s’en empare afin de pouvoir réaliser son programme d’un retour « aux choses mêmes ». Or, si le point de départ est celui d’une philosophie prônant l’absence radicale de tout présupposé (absolute Voraussetzungslosigkeit), déjà un deuxième pas (qui s’ensuit) ne sera pas exempt de toute présupposition métaphysique. La phénoménologie est censée prendre son point de départ dans quelque chose d’indubitable. Le « vécu » s’y prête mieux que la « chose ». Qu’une « chose » apparaisse véritablement, cela peut être une illusion. Mais le fait que « quelque chose » apparaisse est indubitable. Ce « en » quoi ou « à travers » quoi cette apparition apparaît est le « vécu ». Mais qu’est-ce exactement qu’un tel « vécu », qu’est-ce qu’il « contient » ? Qu’est-ce qui établit, à même la chose, sans être une chose (car cela peut relever d’une illusion), le rapport « conscient », « vécu », à la chose (réelle ou prétendument réelle) ?
27Il n’y a pas d’unanimité à propos du fait que la « région » insigne de la phénoménologie serait celle des vécus de conscience et, en particulier, que cela suffirait à répondre à l’exigence de l’absence de tout présupposé métaphysique. Mais c’est précisément la thèse de Husserl ! Le rapport à la chose est assuré par l’intentionnalité (ou la troisième acception de la « conscience » dans la cinquième des Recherches logiques). Mais ce qui est décisif, c’est que le concept de « vécu » possède une dimension « subjective » qui le distingue du simple concept de « chose » (au sens d’une entité qui serait « en soi »).
28Or ce concept de « vécu » n’est pas seulement difficile à traduire, mais il est aussi problématique en allemand. Ces difficultés concernent le « deuxième pas » mentionné. C’est que le « vécu », au sens propre, évoque immédiatement le vivre individuel alors que le « vécu de conscience » phénoménologique désigne une structure universelle (Husserl dit : « eidétique ») du « vécu en général ». Cette situation est comparable à une démonstration géométrique : celle-ci ne concerne pas le triangle dessiné au tableau, mais le « triangle en général ». Mais ce n’est pas tout : le vécu a une dimension « générale » à deux égards. Il ne m’appartient pas individuellement, mais il est une structure d’essence générale. Et ce qui y est « vécu » est à son tour une essence. Le paradoxe fondamental de la phénoménologie consiste ainsi dans le fait que la « région d’être » (Ideen I, § 33) ou son « champ réel » (Sachfeld) (Ideen I, § 63), qui lui appartient en propre, à savoir les vécus de conscience en tant que phénomènes qui fondent le sens de ce qui apparaît, sont dans une tension entre la généralité et la singularité, entre l’« eidéticité » et l’« égoïté ». La même chose vaut d’ailleurs pour l’« ego » lui-même, ce que Husserl établira plus tard dans la quatrième des Méditations cartésiennes. Le problème réside alors en ceci que le concept de « vécu » a un caractère subjectif, qu’il renvoie à un « sujet », dont il n’est pourtant pas assuré qu’il soit tenable.
29De ce qui précède, nous pouvons retenir ceci : cela même qui, aux yeux de Husserl, constitue la plus-value de la phénoménologie, c’est aussi ce qui en constitue une difficulté considérable. Le vécu s’oppose au fait de partir dogmatiquement de choses en soi et d’un monde qui serait également en soi. C’est ce qui fait la force de son caractère « subjectif ». Mais celui-ci est en même temps une faiblesse. Car il ouvre la porte à un subjectivisme intenable.
30Avec le concept de « vécu », nous prenons alors pied sur le sol phénoménologique fondamental qui permet d’élucider le sens de l’apparaissant. Ce qu’il faut encore clarifier — pour éviter les difficultés qui viennent d’être mises au jour —, c’est le statut du caractère « subjectif » évoqué à l’instant. La réponse kantienne serait : cette dimension « subjective » est très exactement ce qui confère à nos connaissances leur caractère a priori. Et Husserl s’en souviendra. Mais non pas, à l’instar de l’auteur de la Critique de la raison pure, en réalisant une analytique des « facultés » de connaître transcendantales. C’est ce qu’indique clairement un passage à la fin de la quatrième des Méditations cartésiennes. Husserl y aborde la « subjectivité transcendantale » et insiste sur la dimension de son « auto-explicitation » :
L’auto-explicitation phénoménologique qui s’accomplit dans mon ego, celle de toutes ses constitutions et des objectités qui sont pour lui, prend nécessairement l’aspect méthodique d’une explicitation apriorique, d’une auto-explicitation qui intègre les facta dans l’univers correspondant des possibilités (eidétiques) pures. […]
Dès lors, une véritable théorie de la connaissance ne peut avoir de sens qu’en tant que théorie phénoménologique et transcendantale qui, au lieu de conclure par des raisonnements absurdes d’une prétendue immanence à une prétendue transcendance — celle de n’importe quelles « choses en soi », qui soi-disant seraient par principe inconnaissables —, a exclusivement affaire à l’élucidation systématique de l’effectuation de la connaissance dans laquelle les choses deviennent de part en part compréhensibles en tant que relevant d’une effectuation intentionnelle. C’est par là que toute sorte d’étant, réel ou idéel, devient lui-même compréhensible en tant que « formation (Gebilde) » de la subjectivité transcendantale, constituée précisément dans cette effectuation. Cette espèce d’intelligibilité est la forme suprême de rationalité qu’il est possible de concevoir6.
31La phénoménologie — dans la modalité authentique de son intelligibilité et partant de son questionnement — met ainsi en jeu, quand elle s’enquiert de son objet, une dimension subjective s’auto-explicitant qui pose la question du site de la question, autrement dit : qui ouvre la dimension du « Was » à celle du « Wer ». Richir a vu de façon très lucide la pertinence phénoménologique de cette ouverture. Voyons à présent comment il contribue de façon décisive à l’élaboration d’une « phénoménologie érotétique ».
La contribution de Richir à une phénoménologie érotétique
32Richir a vu que cette auto-explicitation du soi impliquait la réflexivité de toute « formation du sens (Sinnbildung) », du sens se faisant. Il y va en particulier de la question du statut du « soi » dans cette réflexivité. Richir se démarque sur ce point de Husserl, mais également de Heidegger. Si Husserl appréhende la phénoménologie (notamment dans les Méditations cartésiennes) comme une « science égologique » dans laquelle il s’agit de part en part, comme nous venons de le rappeler, de l’« auto-explicitation de mon ego7 », le rapport à soi « réflexif » que l’on y fait valoir implique que l’explicitation du sens correspond à chaque fois très précisément à une auto-explicitation de la subjectivité. Et si, dans Sein und Zeit, Heidegger appréhende le Dasein comme être-au-monde, ce qui veut dire que le Dasein est le monde — son monde —, et si en outre le « temps » constitutif de l’être du Dasein est défini comme un « présenter qui s’auto-explicite8 », cela signifie que le « soi », dans ce rapport à lui-même, indique au sens, en ce qui concerne son contenu, quelles sont ses directions d’explicitation et même ses explicitations concrètes. Or Richir rejette une telle perspective « subjectiviste ». L’explicitation du sens n’est pas pour lui exclusivement une auto-explicitation égoïque ou relative au Dasein. C’est que l’ipséité qui sans aucun doute assiste le sens se faisant, et y assiste, n’est nullement en mesure d’anticiper en elle-même et de développer à partir d’elle-même la totalité des « phénomènes-de-monde » concrets. Pour mettre en relief ce sens de l’« ego » (Husserl) et du « Dasein » (Heidegger), Richir introduit un concept spécifique — celui du « simulacre ontologique9 » ; « simulacre », parce que ce « subjectivisme » est pour Richir une pure illusion, et « ontologique », parce qu’il s’agit d’une fixation illégitime. Il leur oppose une conception qui déconnecte l’identité — laquelle existe bel et bien dans ce rapport-à-soi — de l’ipséité (en se référant explicitement à la distinction entre « identité-idem » et « identité-ipse »10, introduite par Ricœur dans Soi-même comme un autre [1990]). Le sens se faisant s’accomplit ainsi avec l’« assistance » évoquée du « soi », en lui-même et par lui-même, et s’approche autant de la conception finkienne d’un « spectateur transcendantal » désintéressé que de la perspective patočkienne d’une « phénoménologie asubjective ». Qu’est-ce que la démarche richirienne nous apprend sur le rôle du soi dans la détermination de la « question de la question » ?
33Dans un sous-chapitre remarquable des Méditations phénoménologiques11, il introduit les « entre-aperceptions phénoménologiques de l’ipse » ou « auto-entre-aperception[s] transcendantale[s]12 ». Elles désignent le mode de « conscience » (qui, en réalité, n’en est plus un) de l’effectuation du sens. Or, le soi clignotant dans ces « entre-aperceptions » est lui-même un « clignotement » ou un « battement en éclipses » — Richir l’avait déjà souligné dans la troisième des Recherches phénoménologiques13. Plus précisément, le soi « se constitue » dans un « clignotement », c’est-à-dire dans un double mouvement d’incessants surgissements et évanouissements. Quant au « contenu », rien ne peut être dit davantage à propos du soi, aucune détermination plus concrète ne peut en être livrée. « À la question de savoir qui suis-je ?, il n’y a définitivement pas de réponse possible, car toute réponse, précisément, me tuerait14 ». C’est la raison pour laquelle il ne peut être question que de l’identité du soi, mais pas de son ipséité. La prise de conscience du soi par lui-même est néanmoins déterminée, sur le plan « formel », comme autoréflexion phénoménologique (sans concept) du double mouvement des surgissements et évanouissements15. Mais encore une fois : dans la mesure où tout le processus se déroule de façon extrêmement rapide, il est impossible que, dans le « clignotement » incessant des phénomènes constitutifs du sens, une conscience (de soi) « accompagne » ces phénomènes. Contrairement à l’« aperception transcendantale » de Kant qui « doit pouvoir accompagner toutes mes représentations », on n’a affaire ici qu’à des « entre-aperceptions »16 que Richir détermine également comme l’« organe de la phénoménalisation17 ». Le statut ontologique de leur « lieu » est caractérisé en ces termes :
Ce lieu est au-delà de toute ontologie, fût-elle fondamentale, mais pas au-delà de toute pensée : c’est dire, encore autrement, que la pensée ne peut s’y orienter en se découvrant ancrée à une ontologie — ou à des ontologies —, mais en se réfléchissant, dès lors, par rapport à la langue philosophique, dans une architectonique de ses problèmes et questions. En un mot, ce n’est plus la question de l’être qui y devient primordiale, mais la question tout court. […] [S]’il y a des questions, et des questions insaturables par des réponses, c’est qu’elles portent en fin de compte sur de l’absence, et de l’absence plus ou moins radicale ou originaire18.
34Il est ainsi tout à fait remarquable que lorsque le phénoménologue sonde le rapport entre le « Was » et le « Wer », non seulement il va au-delà de toute ontologie, mais encore il découvre le caractère primordial de la « question tout court », au-delà de la question de l’être, c’est-à-dire orienté vers une absence, voire un « rien ». Nous voyons dans tout cela une proximité évidente entre l’architectonique richirienne des Méditations phénoménologiques et le projet de Fausto Fraisopi dans Philosophie et demande, car le fait, justement, d’« être en demande » est pour ce dernier « le signe d’une situation privative constitutive » sans que, pour autant, celle-ci ménage l’espace de possibilité d’une « unité pléromatique ».
Conclusion : la « question de toutes les questions »
35Nous disposons désormais de tous les éléments requis pour cerner le statut de la « question de toutes les questions » en phénoménologie. Heidegger (et les Heideggériens tels que Coreth) ont déterminé la « question de toutes les questions » comme la question de l’être. Celle-ci exige une clarification du statut du Dasein dont la (pré-)compréhension ouvre d’abord le rapport à l’être. Le fait qu’il y ait une sorte d’« enchevêtrement » entre être et Dasein (se présentant comme « auto-explicitation » de l’instance « subjective ») trouve un certain consensus chez les deux pères fondateurs de la phénoménologie et réoriente la « question de toutes les questions » vers le statut de cet enchevêtrement. Donc, tandis que pour certains Heideggériens, « la » question est celle de l’être, la caractéristique fondamentale de la question glisse (même pour Heidegger lui-même !) vers l’articulation du « Was » et du « Wer ».
36Pour la phénoménologie après la deuxième génération de phénoménologues, la « question de toutes les questions » s’oriente encore ailleurs — à savoir vers le questionnement du « rien » qui est un « rien d’écart d’espace et de temps » (Richir) (et l’on pourrait montrer que, là encore, un certain héritage heideggérien se fait sentir). Cette question porte sur de l’absence. Cela ne veut pas dire que toute instance « subjective » serait abandonnée, mais que la « dualité » du « sujet » et de l’« objet » se trouve enrichie d’une troisième instance, celle du « rien ». On passe ainsi de la question de l’être, en passant par celle de l’enchevêtrement du « Was » et du « Wer », à la question de l’absence. Cette dernière perspective se déclinera différemment chez les phénoménologues de la deuxième moitié du vingtième siècle et du vingt-et-unième siècle (cf. la méontique finkienne, la phénoménologie asubjective patočkienne, la refonte de la phénoménologie transcendantale chez Richir, etc.). Même si elle ne portera pas le nom d’une « phénoménologie érotétique », il apparaît avec évidence que la « question de la question » ouvre partout (ne fût-ce que de manière sous-jacente) une perspective originale et fructueuse.
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Notes
1 Le substantif grec « ἐρώτησις » désignant la « question ».
2 Ces premières réflexions s’inspireront dans une très large mesure de l’ouvrage d’Emerich Coreth Metaphysik: Eine methodisch-systematische Grundlegung, Innsbruck/Wien/München, Tyrolia, 1961 ainsi que de son article « Frage », dans Handbuch philosophischer Grundbegriffe, München, Kösel, 1973, p. 485sq. Cf. aussi E. Sperantia, « Remarques sur les propositions interrogatives. Projet d’une “logique du problème” », Actes du Congrès International de Philosophie Scientifique, Paris, Hermann & Cie, 1936, p. 18-28 ; M. & A. Prior, « Erotetic Logic », Philosophical Review, 64 (1), Duke University Press, 1955, p. 43-59 ; A. Brożek, Theory of Questions : erotetics through the prism of its philosophical background and practical applications, Amsterdam, Rodopi, 2011 ; F. Fraisopi, Philosophie et demande : sur la métaphilosophie, Paris, Classiques Garnier, 2021.
3 T. Kubiński, « Essay in the Logic of Questions », Atti del XII congresso internazionale di filosofia, Firenze, Sansoni Editore, 1960, p. 315-322 ; N. Belnap (Jr.), An Analysis of Questions: Preliminary Report, Santa Monica (California), Systems Development Corp., 1963 ; L. Åqvist, A New Approach to the Logical Theory of Interrogatives, Uppsala, Almqvist & Wiksell, 1965 ; D. Harrah, « On Completeness in the Logic of Questions », American Philosophical Quarterly, vol. 6, n° 2, avril 1969, p. 158-164.
4 A. Pfänder, Logik, Jahrbuch für Philosophie und Phänomenologische Forschung, vol. 4, Halle, Max Niemeyer, 1921, p. 139-494 ; R. Ingarden, Essentiale Fragen. Ein Beitrag zu dem Wesensproblem, Jahrbuch für Philosophie und Phänomenologische Forschung, vol. 7, Halle, Max Niemeyer, 1925, p. 125-304 ; F. Löw, « Logik der Frage », Archiv für Gesamte Psychologie, vol. 66, Leipzig, Akademische Verlagsgesellschaft, 1928, p. 357-436.
5 J.-L. Marion, La rigueur des choses, Paris, Flammarion, 2012, p. 162.
6 E. Husserl, Cartesianische Meditationen und Pariser Vorträge, Husserliana I, S. Strasser (éd.), Den Haag, M. Nijhoff, 1950, p. 117-118.
7 Husserliana I, p. 118sq.
8 M. Heidegger, Sein und Zeit, HGA 2, Frankfurt am Main, Klostermann, 1977, p. 539.
9 Par exemple M. Richir, Méditations phénoménologiques, Grenoble, J. Millon, 1992, p. 33, 53, 91.
10 Méditations phénoménologiques, p. 320.
11 Méditations phénoménologiques, p. 370-373.
12 Méditations phénoménologiques, p. 372.
13 M. Richir, Recherches phénoménologiques, Bruxelles, Ousia, 1981, p. 265-270.
14 Méditations phénoménologiques, p. 370.
15 Ibid.
16 Méditations phénoménologiques, p. 323.
17 Méditations phénoménologiques, p. 350sqq. (surtout p. 361).
18 Méditations phénoménologiques, p. 323sq.