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Amélioration de la méthode d’extraction d’ADN au CTAB appliquée aux feuilles de cotonnier
Editor's Notes
Reçu le 1er avril 2005, accepté le 3 janvier 2006
Résumé
Les analyses en génétique moléculaire chez le cotonnier (Gossypium hirsutum L.) sont souvent limitées par la disponibilité du matériel végétal frais et le temps nécessaire pour l’extraction ainsi que par la qualité de l’ADN extrait. La méthode CTAB a été optimisée. Les principales modifications apportées concernent la précipitation de l’ADN à -20 °C, l’incubation à 60 °C de l’ADN resuspendu dans une solution TE et la centrifugation à 4 °C pour toutes les étapes d’extraction. La méthode améliorée est relativement rapide, peu coûteuse et donne des rendements moyens réguliers (80-200 µg . g-1) en ADN de bonne qualité. Le protocole mis au point a été utilisé avec succès sur des feuilles séchées et des feuilles congelées à -80 °C. L’ADN extrait a été coupé par l’enzyme EcoRI et utilisé pour l’amplification en PCR de plus de 200 amorces microsatellites sur différentes espèces de cotonnier, de l’hybride trispécifique G. hirsutum × G. raimondii × G. sturtianum et de sa descendance.
Abstract
Improvement of the genomic DNA extraction method with CTAB for cotton leaves. Molecular genetic analysis in cotton (Gossypium hirsutum L.) is often limited by the availability of fresh tissue and the time necessary to extract DNA from it. To overcome these problems, the original CTAB method was improved. The major modifications concern DNA precipitation at -20°C, incubation of the resuspended DNA at 60°C and centrifugation at 4°C for all extraction steps. The improved method was relatively fast, cheap and yielded high quality DNA (80-200 µg . g-1). The optimized protocol gives satisfactory results on dried and frozen leaves at -80°C. The DNA was suitable for restriction-enzyme digestion with EcoRI and as a template for polymerase chain reaction (PCR) using more than two hundred microsatellite cotton primers on different cotton species, the G. hirsutum × G. raimondii × G. sturtianum trispecific hybrid and its progenies.
Table of content
1. Introduction
1Les difficultés d’extraction de l’ADN sont restées pendant longtemps une des limites de l’application de la biologie moléculaire chez le cotonnier. En effet, le cotonnier est une plante récalcitrante, c’est-à-dire une plante qui contient une quantité importante de contaminants de l’ADN tels que les polysaccharides et les composés polyphénoliques (Paterson et al., 1993). Les composés polyphénoliques interagissent irréversiblement avec les protéines et les acides nucléiques induisant leur oxydation et dégradation (Dabo et al., 1993). De nombreux protocoles d’extraction de l’ADN chez le cotonnier ont été décrits (Dabo et al., 1993 ; Paterson et al., 1993 ; Permingeat et al., 1998 ; Zhang, Stewart, 2001). Cependant, la plupart de ces protocoles donnent un rendement faible en ADN et / ou sont d’application difficile ou encore coûteux pour certains laboratoires.
2Afin d’extraire un nombre plus élevé d’échantillons en même temps et d’obtenir un ADN propre et de bonne qualité, nous avons éprouvé et optimisé la méthode d’extraction par CTAB décrite par Vroh Bi et al. (1996).
2. Matériel végétal
3L’extraction de l’ADN a été réalisée sur feuilles de cotonnier. Les tests d’ADN ont été réalisés sur des feuilles fraîches, des feuilles séchées à l’étuve ventilée à 27 ° C pendant cinq jours et des feuiles congelées à -80 ° C. Le matériel a été prélevé à partir des espèces G. sturtianum, G. raimondii, G. hirsutum (cv. C2, NC8, STAM F et TM1), de l’hybride trispécifique HRS (G. hirsutum × G. raimondii × G. sturtianum) et de sa descendance BC1, BC2, BC1S1, BC2S2 et BC2S3. Toutes les plantes utilisées dans le cadre de cette étude sont maintenues en serres.
4Le protocole de base utilisé est une modification de celui préparé par Vroh Bi et al. (1996) à partir de la méthode CTAB (bromure de céthylméthyl ammonium) de Murray & Thompson (1980), décrite par Chandellier (1995). Les paramètres testés dans le cadre de cette étude pour optimiser cette méthode sont la quantité de charbon actif rajouté, la température de centrifugation à chaque étape, la température et la durée de la précipitation de l’ADN à l’isopropanol, le temps de lavage de l’ADN (par le tampon) et l’incubation de l’ADN dilué dans le TE (Tris-EDTA) à 60 ° C.
2.1. Tampon d’extraction
5Le tampon d’extraction est composé de 2 % (p / v) CTAB (bromure d’hexadécyltriméthylammonium), 2 % (p/v) (polyvinylpyrrolidone, Sigma), 2,0 M NaCl, 20 mM EDTA, 100 mM Tris-HCL (pH 8,0) et 5 % (v / v) ß-mercaptoéthanol (ajouté juste avant l’utilisation sous hotte). Les autres produits d’extraction sont le charbon actif (Sigma), un tampon de lavage (80 % d’éthanol, 10 mM d’ammonium acétate), une solution de prélavage au chloroforme : alcool isoamylique 24: 1 (v / v) et la RNase A 10 µg . µl-1 dans de l’eau distillée et autoclavée.
2.2. Protocole d’extraction
6Le protocole d’extraction d’ADN suivi est décrit ci-après : (1) préchauffer le tampon d’extraction dans un bain-marie à 60 ° C ; (2) broyer les échantillons de feuilles dans de l’azote liquide ; (3) ajouter au broyat 7,5 ml de CTAB par g de jeunes feuilles broyées ; (4) ajouter 10-15 mg.g-1 du charbon actif et 375 µl.g-1 ß-mercaptoéthanol sous hotte et bien vortexer ; (5) incuber pendant une heure à 65 ° C avec agitation ; (6) ajouter 7,5 ml.g-1 de feuilles broyées dans une solution de chloroforme : alcool isoamylique (24 : 1) à température ambiante et agiter manuellement (par inversement des tubes) pendant 5 min ; (7) centrifuger pendant 10 min à 16300 g à 4 °C pour accélérer la phase de séparation, si nécessaire cette étape est répétée sur le surnageant pour clarifier la phase aqueuse ; (8) récupérer le surnageant et ajouter 2 / 3 du volume prélevé d’isopropanol conservé à 4 °C, inverser les tubes doucement puis laisser précipiter au moins 30 min à -20 °C ; (9) centrifuger pendant 5 min à 13000 g à 4 °C ; (10) éliminer le surnageant ; (11) ajouter 10 ml de tampon de lavage par g de feuilles broyées et placer en agitateur vertical pendant 30 min ; (12) centrifuger pendant 5 min à 13000 g à 4 °C ; (13) éliminer le surnageant et sécher l’ADN à l’air libre pendant 20 min ; (14) suspendre le culot d’ADN dans 100 à 300 µl de TE 1x ; (15) incuber l’ADN pendant 10 min à 60 °C ; (16) traiter la solution avec 8 µl de RNase par 100 µl d’ADN et incuber pendant 30 min à 37 °C. L’ADN extrait peut être stocké à 4 °C la nuit ; centrifuger pendant 2 min à 650 g, cette dernière étape est facultative.
7La quantité d’ADN a été estimée visuellement sous rayons ultratviolets après migration sur minigel d’agarose 0,8 % (w / v), le marqueur de quantification utilisé est le Smart Ladder de 200 à 10000 pb (Eurogentec). Pour plus de précisions les mêmes échantillons ont été quantifiés par fluorométrie.
2.3. Conditions d’amplification des marqueurs microsatellites
8Le caractère exploitable de l’ADN a été vérifié par amplification au moyen du couple d’amorces SSR BNL1673 suivant le protocole décrit par Liu et al. (2000). Une réaction (volume total : 10 µl) contient 10 ng d’ADN, 1 x PCR Buffer [10 mM Tris-HCL, pH 9 et 50 mM KCl, 1,5 mM MgCl2] (Amersham Biosciences), 2,5-3,5 mM MgCl2 (suivant l’amorce utilisée), 0,2 mM d’NTPs (Invitrogen Life Technologies), 0,15 µM de chaque amorce, (sens-antisens) 0,4 Unités de Taq DNA Polymérase (Amersham Biosciences). Les différents cycles de températures pour les réactions PCR ont été réalisés sur un thermocycleur PTC-200 (Peltier Thermal Cycler) de MJ Research. L’amplification des profils microsatellites consiste en une période de dénaturation initiale de l’ADN et l’activation de la Taq polymérase à 95 °C pendant 12 min suivie d’une amplification de 40 cycles. Chaque cycle comprend une dénaturation (étape 1) à 93 °C pendant 15 s, une hybridation (étape 2) à 55 °C pendant 30 s et une élongation (étape 3) de 1 min à 72 °C. Les temps pour atteindre les différentes températures de chaque étape du processus d’amplification (« ramp time ») était respectivement de 42 s pour la dénaturation, 36 s pour l’hybridation et 40 s pour l’élongation. Après les 40 cycles, une élongation finale à 72 °C a été appliquée durant 6 min. 10 µl de solution « stop » (10 mM NaOH, 95 % Formamide et 0,05 % Bromophénol) sont rajoutés aux produits d’amplification avant une incubation de 2 min à 92 °C (afin de dénaturer les produits d’amplification).
9Après électrophorèse sur gel de polyacrylamide, les produits amplifiés sont révélés par une coloration au nitrate d’argent (Benbouza et al., 2006).
3. Résultats et discussion
10Les ajustements apportés à la méthode de départ (Tableau 1) ont permis l’obtention d’un ADN plus propre et de bonne qualité facilement amplifiable par PCR (Figure 1). Sur cette figure on observe l’amplification des différents allèles pour tous les génotypes, cités dans la légende, sauf pour les génotypes 2, 15 et 27. L’absence de produits d’amplification dans ces cas peut être expliquée soit par la présence d’un allèle nul ou par un problème d’amplification survenu pendant le déroulement de la PCR. En fonction du génotype, un (exemple des génotypes 1 et 5), deux (exemple des génotypes 3 et 4) ou encore 3 (exemple des génotypes 9 et 10) amplicons ont été observés. Le polymorphisme observé entre l’espèce sauvage G. sturtianum (génotype 5) et les deux cultivars de l’espèce cultivée G. hirsutum (génotypes 3 et 4) a permis de suivre l’amplification de leurs allèles respectifs à travers la descendance de l’hybride trispécifique mentionné dans la légende.
11L’ADN obtenu avait une taille variant de 8000 ‑ 10000 pb et a été digéré par l’enzyme EcoRI. La quantité d’ADN extraite des feuilles fraîches, séchées ou congelées variait entre 100 - 400 µg.g-1. Toutefois, c’est à partir des feuilles fraîches que le plus haut rendement d’ADN a été obtenu.
12Le charbon actif est un absorbant des composés aromatiques. Ce composé absorbe les matières résineuses et les polyphénols en phase aqueuse (Oakeley et al., 1994). Par rapport à la méthode de départ, l’adjonction d’une quantité de 10 mg de charbon actif par gramme de feuilles était suffisante pour l’absorption des composés aromatiques et les polyphénols en phase aqueuse. L’adjonction de quantités de charbon actif inférieures à 10 mg donnait un ADN difficilement amplifiable par PCR et parfois visqueux. La viscosité de l’ADN extrait est observée surtout chez les espèces sauvages et elle est probablement due à une forte concentration de polysaccharides. Cependant, l’augmentation de la quantité du charbon actif au delà de 20 mg nécessitait à chaque fois une deuxième centrifugation pour clarifier la phase aqueuse (étape 7) et une durée de lavage de l’ADN plus longue (étape 11). La réduction de la quantité du charbon actif nous a permis d’avoir un culot d’ADN plus propre et de réduire son temps de lavage (avec le tampon).
13A l’étape 6, une agitation manuelle des tubes pendant 5 min était suffisante pour bien mélanger le chloroforme : alcool isoamylique (24:1) au contenu des tubes et l’augmentation du temps d’agitation n’apportait aucune amélioration supplémentaire.
14La centrifugation à 4 °C favorise une bonne séparation des phases pendant les différentes étapes, en particulier lors de l’extraction des protéines par le mélange chloroforme : alcool isoamylique (24:1) et optimise sensiblement la séparation des phases pendant la centrifugation aux différentes étapes. La précipitation de l’ADN à -20 °C pendant 30 min au lieu d’une précipitation à température ambiante améliore nettement la formation rapide du culot d’ADN.
15Un temps de lavage de l’ADN (étape 11) durant 30 min était nécessaire pour avoir un culot d’ADN propre. L’augmentation du temps de lavage n’apportait aucune amélioration apparente.
16L’incubation à 60 ° C pendant 10 min permet la dissolution de l’ADN resté insoluble dans la TE (Tris-EDTA). Le protocole optimisé est simple, relativement rapide et peu coûteux. L’ADN extrait est propre, de bonne qualité et facilement amplifiable par PCR. Il permet l’extraction de l’ADN à partir de faibles quantités de feuilles (400 - 500 mg) fraîches, séchées ou congelées et ne demande aucun équipement spécial dans le laboratoire.
Bibliographie
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To cite this article
About: Halima Benbouza
Unité de Phytotechnie tropicale et d’Horticulture. Faculté universitaire des Sciences agronomiques. Passage des Déportés, 2. B-5030 Gembloux (Belgique).
About: Jean-Pierre Baudoin
Unité de Phytotechnie tropicale et d’Horticulture. Faculté universitaire des Sciences agronomiques. Passage des Déportés, 2. B-5030 Gembloux (Belgique).
About: Guy Mergeai
Unité de Phytotechnie tropicale et d’Horticulture. Faculté universitaire des Sciences agronomiques. Passage des Déportés, 2. B-5030 Gembloux (Belgique). E-mail : mergeai.g@fsagx.ac.be