Fédéralisme Régionalisme

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Audrey Lauriello

L’enjeu du régionalisme dans les relations entre les pays émergents. Le cas du Brésil et de l’Afrique du Sud

(Volume 11 : 2011 — Numéro 1 - Le régionalisme international dans les Amériques : dynamique interne et projection internationale)
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Résumé

La présente contribution se penche sur la place accordée au régionalisme dans les relations entre les pays dits «émergents» que sont le Brésil et l’Afrique du Sud. La dernière décennie a vu apparaître de nouvelles puissances qui entendent participer à l’édiction des règles régissant le comportement des États sur la scène internationale au même titre que les grandes puissances industrielles traditionnelles. À cette fin, le Brésil et l’Afrique du Sud notamment ont développé une diplomatie active et multi-niveaux et s’accordent mutuellement davantage de place dans leur agenda extérieur. Parmi les différents instruments – bilatéraux, régionaux, et multilatéraux – qu’ils mobilisent, la relation interrégionale apparaît comme un outil parmi d’autres qui vise avant tout à concrétiser leurs aspirations plus globales.


Introduction

1La thématique de la présente contribution – axée sur le régionalisme – s’inscrit en réalité dans un contexte plus global, marqué par la disparition de l’ordre mondial bipolaire au tournant des années 1990, offrant alors de nouveaux espaces d’action et une marge de manœuvre accrue aux acteurs ambitionnant de jouer un rôle plus influent sur la scène internationale. Parmi ceux-ci figurent les pays labellisés « émergents » tels que le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine ou encore l’Afrique du Sud dont la croissance économique soutenue et l’influence politique ascendante ont amorcé un débat récent sur la «multipolarisation» progressive du monde.

2Mis en lumière par un désormais célèbre rapport de la banque d’investissement Goldman Sachs en 20031 visant à conseiller à ses clients de nouveaux marchés prometteurs, ces pays du «BRIC», rejoints par l’Afrique du Sud en décembre 2010 pour former les «BRICS», ont alors pris conscience de leurs forces relatives ainsi que de l’opportunité d’accroître leurs liens et de coordonner leurs positions sur les grands dossiers internationaux.

3Développant une diplomatie tout azimuts et multi-niveaux, ces nouveaux acteurs mobilisent dans le plus grand pragmatisme des outils aussi variés que les accords bilatéraux, plurilatéraux, les intégrations régionales dont ils sont membres et les organisations multilatérales, sous couvert d’un discours tinté de tiers-mondisme préconisant l’intensification de la «coopération Sud-Sud».

4L’objet de cet article est de se concentrer sur ce troisième niveau de levier potentiel de puissance, au détour de la question de la place qu’occupe le régionalisme dans les rapports entre les pays dits «émergents» que sont le Brésil et l’Afrique du Sud. En effet, au fil du temps, leurs relations se sont d’une part progressivement institutionnalisées, et ont d’autre part entraîné dans cette logique coopérative certains de leurs homologues régionaux.

5Partant d’une approche plutôt «sélective», tant au niveau des partenaires régionaux invités à coopérer que des thématiques abordées (militaire, culturel, …), les rapports Brésil-Afrique du Sud ont évolué vers une perspective plus «inclusive», cherchant à associer davantage leurs nombreux voisins, en particulier les membres des intégrations régionales dans lesquelles ils s’insèrent2, pour coopérer dans le cadre d’un agenda désormais élargi à de multiples domaines (politique, économique, commercial, éducation, santé, développement, …). Cet effort vise essentiellement à renforcer l’assise de ces pays dans leur voisinage direct où le statut de leader et de représentant sous-continental légitime leur est contesté. À ce titre, leur environnement régional apparait tantôt comme un tremplin, tantôt comme un frein dans la quête de puissance brésilienne et sud-africaine. C’est pourquoi nous postulons que les initiatives visant à stimuler une coopération interrégionale, sensée bénéficier à l’ensemble de leurs continents, constituent essentiellement des outils servant à concrétiser leurs aspirations à l’échelle globale.

6Dans une première partie, nous aborderons certains facteurs historiques ayant favorisé les interactions entre les sous-continents latino-américain et d’Afrique australe, pour dans un second temps appréhender l’évolution relations Brésil-Afrique du Sud dans une perspective plus récente pour ensuite développer leur coopération de façon plus thématique aux niveaux bilatéral, interrégional et multilatéral, afin de saisir dans un quatrième les enjeux de diverse nature poursuivis par ces multiples initiatives et enfin, déterminer la place qu’occupe le régionalisme dans les rapports entre ces deux pays dits «émergents».

1. Amérique latine – Afrique méridionale : des liens ancestraux

7Les facteurs qui relient les continents bordant l’océan Atlantique Sud plongent leurs racines notamment dans deux événements historiques qui, d’après le discours brésilien, en font des partenaires «naturels» : l’arrivée massive d’esclaves africains sur le sol latino-américain (essentiellement brésilien) et la colonisation portugaise.

8En effet, la «proximité culturelle» et la «dette historique et morale» à l’égard du continent noir régulièrement évoquées par Lula lors de ses tournées diplomatiques en Afrique trouve d’abord son fondement dans l’importation portugaise dès le 16e siècle de plusieurs millions d’esclaves noirs au Brésil, dont une majeure partie provenait d’Angola3. Comptant aujourd’hui près de 90 millions de Brésiliens se réclamant d’origines africaines, le président brésilien sortant ne manquera pas de rappeler à maintes reprises que son pays abrite la plus grande population d’origine africaine, après le Nigéria.

9Bien que le Brésil ait depuis lors absorbé la majeure partie de l’immigration africaine dans le cône sud de l’Amérique latine, il est intéressant de noter la présence dès la fin du 19e d’une communauté d’Afrikaners en Argentine4 qui fut à l’origine de l’établissement, en 1938, à Buenos Aires, de la première représentation diplomatique sud-africaine en Amérique latine. Dans les années qui suivirent, la capitale argentine demeurera le centre des activités diplomatiques sur le sous-continent, en charge également des relations établies à l’époque avec le Brésil, l’Uruguay, le Paraguay et le Chili5. En outre, la démographie latino-américaine, à l’exception notable du Brésil, compte relativement peu de noirs ou de mulâtres (nés d’un parent européen et d’un autre africain) et se compose essentiellement de descendants d’européens et de métis (issus d’un parent d’origine européenne et l’autre d’origine amérindienne). Ceci explique en partie que le Brésil soit le seul pays sud-américain6 à avoir élaboré une véritable politique étrangère «structurée et cohérente, dotée d’objectifs et de moyens7» à l’égard de l’Afrique, indépendamment des intérêts purement géostratégiques et diplomatiques sous-jacents qu’elle représente.

10Un second facteur historique de rapprochement des deux sous-continents provient de la colonisation portugaise du Brésil et de plusieurs pays d’Afrique australe (Angola, Mozambique) et occidentale (Guinée-Bissau, Cap-Vert, Sao Tomé e Príncipe). Ce passé colonial «commun8», qui résonne également dans le discours brésilien contemporain, a permis une large diffusion de la langue portugaise considérée par le géant lusophone comme un vecteur d’influence privilégié en Afrique (voir infra). Pour cette raison, la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP)9 a toujours constitué, depuis son institutionnalisation en 1996, un axe prioritaire pour le Brésil sur le plan des relations internationales, plus particulièrement dans sa stratégie de «coopération Sud-Sud» qui s’élabore dès la seconde moitié des années 1970 ; une période considérée comme un «premier âge d’or10» des relations afro-brésiliennes11.

2. Amérique latine – Afrique australe : des relations à géométrie variable entre 1970 et 1990

11Ces relations afro-brésiliennes connaîtront en effet un véritable essor suite à la reconnaissance de l’indépendance de la Guinée-Bissau, du Cap-Vert, de l’Angola et du Mozambique par l’administration brésilienne12, qui projette de prendre le relais de l’ancienne métropole en Afrique lusophone13. Jusqu’alors, les rapports étroits entretenus avec Lisbonne conduisaient à un alignement sur la politique coloniale portugaise en terre africaine14. Mais le nouveau gouvernement brésilien de 1974 octroiera à l’Afrique un statut de «zone prioritaire» désormais «privilégiée pour les exportations de services et pour l’implantation d’entreprises de travaux publics brésiliennes ; (…) elle constitue un des seuls marchés pour les produits manufacturés brésiliens. De ce point de vue, elle joue un rôle non négligeable dans le maintien du taux d’expansion des secteurs de pointe du capitalisme brésilien15». Outre la signature de nombreux accords commerciaux et de coopération profitant aux entreprises brésiliennes16, diverses rencontres seront organisées au niveau ministériel et une première grande vague d’ambassades brésiliennes se déploiera en territoire africain17.

12Quant au cas spécifique de l’Afrique du Sud, c’est également à partir de cette époque que le Brésil des généraux Geisel (1974-1979) et Figuereido (1979-1985) s’en distanciera et dénoncera plus ouvertement son régime ségrégationniste. Cantonnant dans un premier temps leurs rapports bilatéraux essentiellement à la sphère commerciale18, le retour au pouvoir de gouvernements civils au Brésil marquera dans un second temps une rupture diplomatique totale et l’application de nouvelles sanctions à l’égard de l’Afrique du Sud, consacrées dans le «Décret Sarney» de 198519.

13À l’inverse, le reste du sous-continent latino-américain, également placé sous le joug des dictatures militaires, maintiendra de bonnes relations avec son partenaire sud-africain durant l’apartheid, au grand dam des voisins de ce dernier qui l’accusent de mener une politique de déstabilisation régionale, d’hégémonisme et d’oppression, et en appellent à son bannissement par la communauté internationale20.

14Outre-Atlantique, Pretoria mène avec un relatif succès une «offensive diplomatique» en Amérique du Sud depuis 1966, comptant sur les régimes militaires sympathisants de la politique anti-communiste sud-africaine qu’elle renferme pour contourner son isolement diplomatique croissante21.

15Ainsi, la singularité de la position brésilienne, aux accents «pro-africains» et «pro-libération» vaudra à ce géant latino-américain une considération particulière du continent noir, qui n’est pas étrangère à la perception relativement positive qu’il est progressivement parvenu à implanter en Afrique.

16Toutefois, le virage démocratique qui s’opère en Afrique du Sud à partir des années 1990 changera la donne. Son retour dans le cercle des pays fréquentables permettra le rétablissement des liens diplomatiques et commerciaux avec Brasilia, qui ne cesseront d’être approfondis depuis lors, consacrant à ce pays du cône sud de l’Afrique un statut d’allié stratégique. Ce revirement s’opère au détriment des anciens partenaires africains du Brésil dont il se désintéresse, à l’exception des pays lusophones (avec qui il fonde à cette époque la CPLP) et ceux producteurs de pétrole (Angola, Nigéria, Algérie) qui concentrent une majeure partie des importations brésiliennes en provenance d’Afrique22.

17La région qui focalise l’essentiel de l’attention du Brésil dans la période des années 1990 – période de reprise économique post-crise et de mutations économiques post-Consensus de Washington – est bien son propre sous-continent, alors qu’il s’attèle à mettre en place un Marché commun du Sud (Mercosur) en 1991 avec ses voisins argentin, uruguayen et paraguayen, visant à établir un marché commun et à susciter leur coopération autour d’un certain nombre de thématiques (politique, culturelle ou enseignement). Il faudra attendre la décennie suivante et l’accession au pouvoir de Lula pour voir se raviver la politique africaine du Brésil, qui s’appuie néanmoins sur les jalons posés par ses prédécesseurs et s’inscrit dans une certaine continuité, notamment grâce à l’indépendance croissante qu’a acquis au fil des ans le ministère des affaires étrangères brésilien (l’Itamaraty) dont l’élaboration de la politique extérieure est relativement peu affectée par les alternances politiques 23.

18Ainsi, si l’intérêt du Brésil pour ses homologues africains lusophones et/ou producteurs de pétrole est demeuré constant au cours des quatre dernières décennies, un tournant s’opère dans les années 1990 avec un désintérêt relatif du reste du continent noir au profit du nouvel allié stratégique fraîchement démocratique sud-africain, qui se présente par ailleurs comme la tête de pont du reste de l’Afrique. Inversement, Pretoria, qui, du temps de l’apartheid s’appliquait à nouer des liens avec le reste du continent latino-américain pour compenser son isolement international et la rupture de ses relations avec le géant brésilien, choisira progressivement ce dernier comme interlocuteur privilégié d’Amérique du Sud. Au fil du temps, les deux pays qui partagent aujourd’hui le label de «puissances émergentes» n’ont cessé de multiplier et d’intensifier leurs relations à plusieurs niveaux.

3. Brésil – Afrique du Sud : des contacts multi-niveaux qui s’institutionnalisent depuis les années 1980

19Si les rapports bilatéraux (essentiellement développés ci-dessous en termes économiques et commerciaux) ont connu un nouvel élan avec la transition démocratique en Afrique du Sud, celle-ci a pu coopérer de manière sectorielle – par exemple sur les plans militaire, culturel et commercial – avec le Brésil par l’entremise d’enceintes ou accords interrégionaux (ZOPACAS24, CPLP, accords préférentiel de libre échange Mercosur-SACU/SADC) depuis la décennie 1980 mais aussi plus récemment au sein de plateformes opérant à l’échelle multilatérale (IBSA, G20+). Peu à peu, les thématiques et les invités se multiplient, conduisant à une institutionnalisation croissante de la relation Brésil-Afrique du Sud.

20Ainsi, comme évoqué au point 2, cette relation bilatérale fut revigorée suite à la chute du régime ségrégationniste sud-africain à l’aube des années 90. En effet, dès son élection à la présidence de la nation arc-en-ciel, une des préoccupations premières de Nelson Mandela fut de rehausser l’image de son pays aux yeux de la communauté internationale en s’ouvrant à elle par un revirement de ses politiques économiques et un activisme diplomatique soutenu. De leur côté, les autorités brésiliennes ne risquent alors plus l’opprobre générale que lui avait valu le maintien dans un premier temps de ses liens avec l’Afrique du Sud de l’apartheid. Depuis lors, le rapprochement politique et commercial entre les deux pays s’est graduellement approfondi, avec une nette accélération la dernière décennie qui a vu les échanges de marchandises exprimés en dollars presque doubler.

21Ainsi, les exportations sud-africaines au Brésil consistent essentiellement, par ordre d’importance, en des matières premières telles que du fer, de l’acier, mais aussi des huiles minérales, carburants et cires, des pierres précieuses, des chaudières, machines et appareils mécaniques, dont des appareils médicaux, des produits chimiques organiques, du plastique et de l’aluminium ainsi que des ouvrages en ces matières, ou encore des produits chimiques divers.

22En retour, le partenaire brésilien exporte des produits généralement à plus haute valeur ajoutée, tels que des véhicules automobiles, tracteurs, pièces et accessoires, ou encore similaires tels que des chaudières, machines, appareils et instruments mécaniques, mais aussi de la viande, du sucre, des appareils et équipements électriques. Dans un volume moindre, il exporte également du tabac, des céréales, des graisses, huiles et cires animales ou végétales, et enfin du plastique25.

23En termes de flux commerciaux, on retrouve donc une asymétrie Brésil-Afrique du Sud, au même titre que la configuration des échanges de type nord-sud qui s’opère entre ces deux pôles économiques régionaux et leurs voisins respectifs. Ces derniers craignent dans une certaine mesure que ce qu’ils perçoivent comme «hégémonie» économique brésilienne et sud-africaine ne fragilise davantage leurs propres économies26 ; d’où l’intérêt pour ces deux «grands» d’impulser la conclusion d’un accord Mercosur-SACU et son élargissement à la SADC (voir infra). En outre, indépendamment de la nature primaire des exportations sud-africaines et des biens à plus forte valeur ajoutée importées du Brésil, la position «centrale» de ces pays au sein de leur sous-région implique que leurs économies soient en réalité davantage en compétition que complémentaires.

24En effet, la présence de firmes brésiliennes en Afrique australe concurrence certaines entreprises sud-africaines qui peinent à pénétrer les marchés de ses propres voisins, à l’exemple de la position dominante d’Odebrecht en Angola depuis plus de 30 ans27.

25Ce qui n’a toutefois pas empêché Pretoria et Brasilia de signer plusieurs accords de coopération bilatérale ayant décuplés dans des domaines aussi variés que la dispense de visas et les passeports diplomatiques, la lutte contre le trafic illicite des substances psychotropes, la culture, les services aériens, ou encore en matière de coopération technique, technologique et scientifique, notamment concernant la santé28.

26Dans ce contexte, les entrepreneurs brésiliennes sont partis à la conquête du marché sud-africain et inversement. À l’exemple du géant Companhia Vale do Rio Doce (CVRD), leader mondial de la production de minerai de fer, qui participe à des opérations dans le secteur minier en Afrique du Sud et y a établi des bureaux à Johannesburg. Récemment, cette entreprise a créé une joint venture avec l’African Rainbow Minerals (ARM) avec laquelle elle s’est investie dans le projet d’exploitation de cuivre de Konkola Nord, en Zambie29. Le conglomérat brésilien Odebrecht, lui, est présent sur le sol sud-africain depuis 1994 et y a déjà mené deux projets en ingénierie et construction tels que le Joel Project-3rd Mine visant à excaver et paver le puits d’une mine, et la construction du tunnel de Midmar30. Notons également la récente prise de participation (51 % des voix) de la firme brésilienne WEG dans l’entreprise sud-africaine Zest Electric Group31.

27De leur côté, les firmes sud-africaines s’emploient à la même stratégie, comme l’illustre la prise de participation (30 % des voix) du géant des médias Naspers dans l’entreprise Abril, le plus large éditeur de magazines au Brésil et l’une des plus grandes firmes du secteur en Amérique latine32. Le colosse minier Anglo-American, qui possède des usines de nickel dans la province de Goiás (à Niquelândia et Barro Alto), a racheté en 2008 la mine de minerais de fer Minas-Rio, située à cheval sur les États de Rio de Janeiro et Mineras Gerais. Il participe aussi – toujours dans ce secteur – à hauteur de 70 % dans le projet Amapá mené au sein de l’entité fédérée du même nom en partenariat avec l’entreprise américaine Cliffs33.

28Notons également l’établissement d’une filiale au Brésil par la compagnie Bosh Projects qui vend des équipements et ses services de consultance dans le secteur sucrier, lequel est en plein boom à l’heure où le Brésil ambitionne d’ajouter à sa carte de visite le titre de premier producteur mondial d’éthanol en plus de détenir déjà celui de premier exportateur. Enfin, Aspen Pharmacare a étendu sa présence internationale en acquérant la moitié de Strides Latina, une filiale de la firme pharmaceutique indienne Strides Acrolab qui opère entre autres au Brésil34 dans ce deuxième secteur, avec les biocarburants, particulièrement porteur de synergies et d’intérêts mutuels pour les deux pays en question, comme nous le verrons infra.

29Toutefois, les liens politiques et économiques entretenus par deux pays ne se fait pas uniquement sur le plan bilatéral. Ceux-ci cherchent également, dans la mesure du possible et du souhaitable, à édifier une relation coopérative interrégionale.

30Dans un premier temps, en associant certains partenaires-clé géo-stratégiquement intéressants selon les secteurs considérés, comme en matière sécuritaire avec la création en 1986, à l’initiative du Brésil, de la Zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud (Zopacas), dont l’objectif est de préserver cet espace maritime «des mesures de militarisation, de la course aux armements, de la présence de bases militaires étrangères et surtout, des armes nucléaires35» dans un contexte de guerre froide et au lendemain de la guerre des Malouines. Comprenant vingt-quatre États bordant cet océan36, cette organisation connaîtra, au lendemain de la chute de l’URSS, un tournant plus axé sur le développement, liant davantage les questions de sécurité à celles de la démocratie, du développement économique et de la stabilité régionale et non plus strictement militaires37. En outre, la Zopacas a suscité dernièrement un regain d’intérêt, depuis la proposition d’un «Document de réflexion» en juillet 2008 visant à revitaliser cette coopération interrégionale à travers quatre domaines d’action : la cartographie et l’exploration des fonds marins, la coopération en matière environnementale (océanographie, pêche, …), la sécurité maritime, et le transport (aérien, maritime et portuaire)38.

31Ce nouvel élan est à mettre en perspective avec le projet d’ «Amazonie bleue» du gouvernement brésilien – un néologisme initié en 2005 par le Commandant de la Marine brésilienne de l’époque (l’Amiral Roberto de Guimarães de Carvalho)39. Il s’agit pour le Brésil d’élargir la frontière maritime sur laquelle s’exerce sa pleine souveraineté au-delà des 200 miles nautiques constituant la zone économique exclusive (ZEE) déjà consacrés par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer40. Si 85 % de la proposition soumise en 2004 à la Commission compétente en la matière furent légitimés à après trois ans d’analyse du document, le gouvernement brésilien planche sur un second texte visant à acquérir la reconnaissance internationale de 100 % de l’extension de son plateau continental41.

32Cette initiative recouvre quatre volets essentiels42 : environnemental (explicite dans le choix-même du néologisme, référant au souci de préserver la biodiversité, cette fois, marine), scientifique (il s’agit notamment de collecter des informations relatives aux conditions océaniques, aux changements climatiques, à la gestion de la navigation, …), de sécurité nationale (afin de lutter contre les trafics en tout genre au large des côtes brésiliennes), mais surtout économiques (alors que plus de 90 % des exportations et importations brésiliennes se font par voie maritime, et où de nouveaux gisements très lucratifs d’hydrocarbures ont été découverts dans la région du pré-sel par la compagnie nationale pétrolière Petrobras43).

33En outre, dans la lignée des questions sécuritaires adressées inter-régionalement au moyen d’une coopération dans l’Atlantique Sud, il faut noter les opérations navales biennales «Atlas Sur», qui depuis 1993 consistent en divers exercices et manœuvres réunissant les marines sud-africaine, brésilienne, argentine et uruguayenne44.

34La participation active de l’Afrique du Sud à la sécurité de l’océan qui la relie au continent latino-américain – notamment via la Zopacas et les opérations Atlas Sur – est particulièrement cruciale pour le Brésil. Premièrement car elle est le seul pays d’Afrique australe potentiellement capable d’assumer le maintien de l’ordre dans l’Atlantique Sud45. Deuxièmement, en raison de sa position géographique stratégique qui ouvre la meilleure porte d’accès tant à l’Océan indien46 qu’à l’Antarctique47.

35En matière culturelle et d’enseignement cette fois, le Brésil s’est également illustré dans le rapprochement interrégional par l’entremise de la CPLP fondée au milieu des années 1990 qui réunit les pays lusophones de la planète, dont deux sont localisés en Afrique australe. Il s’agit dès lors d’un autre exemple du rayonnement brésilien dans la sphère d’influence immédiate de Pretoria.

36Parmi les objectifs officiels poursuivis par cette Communauté interétatique, on retrouve la concertation politico-diplomatique, une coopération technique en diverses matières (éducation, santé, science et technologie, agriculture, culture, sport, …) mais aussi la matérialisation de projets de promotion et de diffusion de la langue portugaise48. Bien que cette organisation exclue l’Afrique du Sud, qui ne compte pas le portugais parmi ses onze langues officielles, il est intéressant de noter l’existence d’un centre culturel Brésil-Afrique du Sud (Cbras49). Cette institution du Ministère des affaires étrangères brésilien rattachée à l’ambassade du Brésil à Pretoria propose plusieurs activités – visant toutes à promouvoir la culture brésilienne (littérature, musique, cinématographie) – dont la dispense de cours de langue portugaise «sur mesure» (pour enfants, adolescents, adultes, cours d’initiation, intensifs, …)50. Au surplus, l’attestation délivrée en cas de réussite à ces cours de langue (CELPE-Bras51) offre l’opportunité aux désireux de poser leur candidature en vue de l’obtention d’une bourse pour poursuivre des études au sein d’un établissement universitaire brésilien52.

37La coopération académique est en effet considérée par les autorités brésiliennes comme un autre vecteur d’influence en Afrique, à l’exemple de l’édification de l’Université fédérale de l’Intégration Luso-afro-brésilienne (Unilab) dans le nord-est du Brésil qui prévoit d’accueillir 5000 étudiants brésiliens et autant de leurs «frères» africains afin d’une part qu’ils puissent se fréquenter, apprendre à se connaître, et d’autre part, qu’au terme de leur formation les étudiants africains retournent au pays pour mettre à disposition le savoir-faire acquis au Brésil53. Celui-ci diffuse ainsi ses normes et standards à l’extérieur et partant, accroît son influence normative – attribut intangible de la puissance, relevant du concept bien connu en relations internationales de soft power (voir infra)54.

38Contrairement à la Zopacas, aux opérations Atlas Sur, et à la CPLP qui ont amené à unir leurs efforts un nombre réduit de pays des cônes sud de l’Afrique et de l’Amérique – respectivement pour des raisons de moyens techniques/financiers et culturelles, les initiatives plus récentes ont cherché à brasser un nombre plus large de partenaires.

39C’est notamment le cas de l’accord commercial préférentiel signé en 2008 entre la SACU et le Mercosur qui clôture les négociations entamées quatre ans plus tôt entre ces deux intégrations régionales, avec comme pierre angulaire l’Accord-cadre signé par l’Afrique du Sud et le Mercosur en 200055. Cette même année, le Ministre adjoint sud-africain Pahad assistait à la 2e conférence SADC/Mercosur, au cours de laquelle il s’était épanché sur les progrès effectués en Afrique australe, et avait vanté les opportunités qu’offrirait un rapprochement de ces deux intégrations régionales56.

40S’il a le mérite d’exister, l’accord Mecosur-SACU risque néanmoins d’avoir un impact limité puisqu’il n’est considéré que comme un premier pas vers la création future d’une zone de libre-échange entre ces deux intégrations régionales57. Il serait assurément prématuré de dresser un bilan des effets engendrés par ce nouveau partenariat. Indépendamment des résultats tangibles, c’est la tendance et la volonté brésilienne et sud-africaine qui sous-tendent ces initiatives qu’il faut retenir. Car l’intérêt premier relève de bénéfices en termes d’image.

41En outre, celui-ci pourrait à moyen ou long terme s’étendre d’une part aux membres de la SADC ne faisant pas partie de la SACU58. En effet, des négociations sont en cours depuis la signature de l’Accord-cadre par le Brésil et les membres de la SADC le 29 mars 2010 à Brasilia dans le but de promouvoir leur développement économique, industriel, scientifique et technologique. Mais les obstacles demeurent nombreux (manque de complémentarité économique, existence de barrières non tarifaires, autres priorités politiques, …) et prendront d’autant plus de temps à être franchis que le nombre des parties négociantes s’élargit59.

42D’autre part, cet accord pourrait inclure l’Inde étant donné qu’un accord de libre échange Mercosur-SACU-Inde est à l’étude depuis 2005 dans le cadre de la coopération menée par l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud au sein du forum de dialogue IBSA, lequel réunit les forces brésiliennes et sud-africaines à un troisième échelon de pouvoir, cette fois, multilatéral60.

43Cette alliance fut initiée par le Brésil et rejointe par ses deux homologues à l’aube de la cinquième conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui s’est tenue à Cancún en 2003. Également connue sous le nom de «G3», ce forum se présente officiellement comme une initiative développementaliste entre l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud visant à encourager la coopération et les échanges Sud-Sud. Parmi les objectifs fixés, on retrouve notamment la promotion du dialogue et la consolidation de positions communes sur les thématiques internationales importantes, la coopération sectorielle en matière d’agriculture, de santé, de défense, d’éducation, de science et technologie, ou encore sur les plans du commerce et l’investissement61.

44Chargés chacun de trouver des alliés au sein de leurs continents respectifs, ces trois pays réussirent à rassembler au sein de l’OMC une vingtaine de pays dits «du Sud» autour du G20+62, dont ils sont le moteur. L’objectif de cette nouvelle coalition est d’obtenir des concessions en matière de subventions agricoles octroyées essentiellement par les autorités américaines et européennes à leurs producteurs afin que ces derniers restent compétitifs sur les marchés internationaux en dépit de leur «désavantage comparatif» dans ce secteur. Conditionnant la poursuite des négociations lancées en 2001 dans le cadre du Cycle de Doha (notamment sur les questions chères aux grandes puissances industrielles traditionnelles63) à la prise en compte de leurs revendications sur le plan agricole, le Brésil, l’Afrique du Sud, l’Inde et leurs alliés parviennent depuis lors à tenir tête aux pays de la triade (États-Unis, UE, Japon) qui jusqu’alors jouissaient d’une influence déterminante dans les tractations commerciales multilatérales. Ainsi, tant les efforts investis dans la tentative de créer une future zone de libre échange entre le Mercosur, la SACU et l’Inde que la «pêche aux alliés» dans le cadre des travaux du G20+ à l’OMC témoignent encore de la volonté brésilienne et sud-africaine d’entraîner leurs voisins dans une logique coopérative.

45Pour autant, quel sont les avantages mutuels escomptés par ces deux «puissances en devenir» ?

4. Des partenariats Mercosur – SACU/SADC : quelles retombées pour l’Afrique du Sud et le Brésil ?

46Si l’on quitte la sphère descriptive pour entrer dans une perspective plus analytique de ce maillage relationnel, des intérêts essentiellement de type économique, politique et symbolique apparaissent dans le chef des deux pays émergents considérés.

47Dans un premier temps, les enjeux de type économique. Que l’on se place du point de vue de leur relation bilatérale ou interrégionale, l’intérêt le plus évident est la recherche de nouveaux débouchés pour leurs produits et services. Le Brésil représente en effet un marché de 190 millions de consommateurs64 sur les quelque 240 que compte le Mercosur réuni. Et son homologue sud-africain qui n’en compte potentiellement que 50 millions65 se présente officiellement comme la tête-de-pont du reste de l’Afrique méridionale qui compte près de 258 millions d’habitants en comptabilisant ceux des pays membres de la SADC – soit, un marché de taille presque analogue au marché mercosurien.

48Malgré la dimension de ces marchés et les efforts visant à faciliter les échanges entre ces deux régions du monde, le Brésil n’occupe que la 20e place au classement des destinations des exportations de l’Afrique du Sud (représentant moins d’un pourcent de leur total) et la13e position lorsque l’on considère ses importations (moins de deux pourcent des importations sud-africaines totales). En outre, le commerce afro-brésilien reste tout à fait marginal comparé aux volumes échangés avec d’autres régions du monde. En effet, l’examen de la structure des exportations de ces pays indique que les flux commerciaux sud-africains concernent essentiellement le marché européen depuis les années 1990, profilant une perspective Nord-Sud plutôt que multilatérale66. Par contre, les exportations brésiliennes sont relativement équilibrées dans le monde, suivant une « logique des quatre parts » qui veille à échanger un quart de ses marchandises et services avec l’Amérique latine, un deuxième avec l’Alena, un autre avec l’Asie et un dernier avec l’UE67.

49Ce constat lève le voile sur d’autres intérêts sous-jacents au rapprochement de ces deux partenaires, notamment de nature politique, à commencer par les aspirations qu’ils partagent quant à l’obtention d’un siège permanent au Conseil de Sécurité de l’Organisation des nations unies (CSNU). A priori, le ralliement du Brésil aux autres membres du G4 (Inde, Japon, Allemagne) visant à soutenir leur candidature mutuelle aux Nations Unies rend ses chances plus plausibles de voir cet objectif réalisé que celles de l’Afrique du Sud.

50La non adhésion de cette dernière au G4 s’explique par le fait qu’elle soit liée par la déclaration d’Harare issue d’un sommet de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) de 1997 qui prône l’élargissement du CSNU à deux sièges permanents et cinq non permanents africains, occupés au nom de l’Afrique et selon un système de rotation établi selon des règles fixées par l’OUA68. Clamer cette ambition aussi ouvertement risquerait de froisser ses voisins et entacher ses discours sur la «Renaissance africaine» qu’elle prône sur tout le continent.

51Pour autant, l’appartenance au cette quadrilatérale n’est pas une garantie de succès. En effet, le problème est que ses membres voient tous au moins l’une des cinq puissances siégeant de façon permanente au Conseil de Sécurité exprimer des réticentes et opposer son veto vis-à-vis de ce projet de réforme69. Par ailleurs, ils se heurtent également aux velléités de certains de leurs voisins respectifs qui ont des convoitises similaires70.

52C’est ici que la stratégie visant à se présenter comme le défenseur des intérêts des pays du Sud, et plus particulièrement les pays africains pourrait s’avérer utile, puisqu’ils représentent 53 voix sur les 192 que compte l’Assemblée générale de l’ONU et pourraient faire office de caisse de résonnance aux revendications des membres du G4.

53À en croire les déclarations du président du Cap-Vert, statuant au nom de l’Ecowas71 en juillet dernier lors de la dernière tournée diplomatique en Afrique de Lula en tant que président, cette manœuvre s’avère payante. Il affirmait en effet que «le Brésil est un pays qui est respecté et écouté, et son président est un grand défenseur des intérêts africains. Il devrait avoir un siège permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU»72.

54Ces voix africaines sont d’autant plus importantes pour le Brésil que ses prétentions semblent avoir subi un coup de frein suite à sa volonté de jouer un rôle d’intermédiaire dans le dossier du nucléaire iranien, court-circuitant les demandes de sanctions soumises au vote au sein du Conseil de Sécurité en mars 201073. Cette tentative de médiation, aux côtés de son homologue turc, envoyait un signal fort à la communauté internationale : le Brésil entend désormais être un acteur politique global qui participe activement à la résolution des problèmes sécuritaires mondiaux au même titre que les grandes puissances. En conséquence, il a récolté une méfiance accrue envers son accession à un siège permanent CSNU et son corrélatif droit de veto plutôt qu’une véritable reconnaissance de sa capacité à agir comme acteur international sur des dossiers aussi cruciaux. Ce qui explique sans doute la distance et le regard critique posé par la présidente Rousseff, successeure de Lula, vis-à-vis de la position brésilienne de l’époque et de l’Iran en général74.

55Deuxième avantage mutuel escompté sur le plan politique : rapprocher leurs deux nations et associer leurs intégrations régionales doit permettre au Brésil comme à l’Afrique du Sud de conforter leur assise régionale. En effet, bien qu’ils soient des puissances économiques régionales reconnues, leur statut de leader régional leur est contesté par plusieurs de leurs voisins respectifs pour plusieurs raisons. Tout d’abord, parce qu’ils récusent la légitimité de ces deux pays à accéder à un siège permanent du CSNU (voir supra).

56Ensuite, la nature conflictuelle des relations du Brésil avec ses nombreux voisins est séculaire75, et due entre autres à un grappillage territorial ancestral et progressif sur les territoires limitrophes. Ceci étant, le Brésil possède les attributs de puissance nécessaires et une diversité de partenaires commerciaux suffisante que pour dépendre moins de ses partenaires mercosuriens qu’inversement. Il doit tout de même ménager leurs susceptibilités au risque de miner à terme les intérêts qu’il tente de promouvoir au sein de cette instance régionale. Dans cette optique, associer le Mercosur et la SACU et/ou la SADC permet de rehausser l’image de «cavalier seul» que lui avait valu la signature du partenariat stratégique avec l’Union européenne, nonobstant la paralysie des négociations en cours en vue d’accord interrégional UE-Mercosur.

57De l’autre côté de l’Atlantique Sud, le souvenir laissé par l’attitude sud-africaine perçue comme hégémonique et déstabilisatrice durant les années d’apartheid continue de susciter la méfiance de ses voisins, en particulier ses partenaires de la SADC76. Sa politique ambivalente en matière de vente d’armes, ou encore sa promotion discursive des droits de l’Homme et des valeurs démocratiques parallèlement à un mutisme décrié vis-à-vis de régimes dictatoriaux avec lesquels elle conserve des liens privilégiés vu leur soutien à l’époque apporté à la lutte de l’ANC et leur condamnation du régime de l’apartheid viennent renforcer cette vigilance77.

58De ces obstacles résulte l’opportunité manquée de jouer le rôle majeur qu’elle s’était fixée à travers la participation à plusieurs opérations de maintien de la paix (Angola, Mozambique, Burundi), de médiation (Sierra Leone, Soudan) et de gestion de crises (Zimbabwe)78.

59Et puisque l’Afrique du Sud post apartheid – qui aspire à jouer un rôle accru sur la scène internationale – est jugée sur sa capacité ou non à assurer la gestion et maintenir la stabilité de son espace immédiat ainsi qu’à promouvoir le développement en Afrique79, le Brésil se profile comme un partenaire utile. En effet, Pretoria a la double conviction qu’elle ne peut vivre comme une «île de prospérité dans une mer de pauvreté»80 et que le néolibéralisme et son commerce avec un grand pays émergent tel que le Brésil peut favoriser le développement de la région81, enrayer à terme les causes à l’origine des conflits et ainsi contribuer à l’équilibre du sous-continent.

60L’importance de l’image reflétée par ces acteurs dans la construction de leur statut de puissance est ici manifeste, et conduit à des considérations de nature plus symbolique, mêlant des intérêts économiques et politiques, alimentant au surplus le soft power de ces deux protagonistes qui cherchent à faire figure d’acteur bienveillant et responsable, à l’instar du Brésil, et d’acteur inclusif et incontournable pour son voisinage immédiat, à l’exemple de l’Afrique du Sud. Telle était la motivation sous-jacente aux initiatives étiquetées «développementalistes», au néologisme «Amazonie bleue», ou encore aux exhortations à une coopération interrégionale accrue et renforcée (voir point 3).

61D’autres exemples remarquables sont à noter. Premièrement, le dossier des médicaments génériques sur lequel convergent fortement les intérêts de ces deux pays émergents : cela relève principalement d’une question d’urgence nationale de santé publique en Afrique du Sud dont la population est ravagée par le sida ; et intéresse l’industrie pharmaceutique brésilienne dont la capacité à produire des médicaments génériques est en mesure de concurrencer les produits brevetés par les grandes firmes pharmaceutiques (américaines, canadiennes, japonaises, européennes et suisses en particulier) trop onéreux pour les malades (sud-)africains.

62Il s’agit donc d’un dossier sensible que ces deux pays sont parvenus à extraire des tractations multilatérales purement commerciales en mettant en exergue son volet «développement» et partant, en obtenant un assouplissement des règles en vigueur en matière de propriété intellectuelle. Désormais, l’Afrique du Sud – et tout pays en voie de développement – moyennant le respect de certaines conditions a le droit d’octroyer une dénommée «licence obligatoire» à un pays qui, tel que le Brésil, est en mesure de fabriquer et de lui exporter les médicaments génériques dont elle a besoin à un prix accessible pour sa population. Confortant son rôle de pourvoyeur de développement, renforçant la cohérence de sa politique de «coopération Sud-Sud», plusieurs projets d’implantation de firmes brésiliennes fabriquant sur place des médicaments génériques sont menés sur le continent africain, notamment au Gabon, au Sénégal, au Mozambique et en Namibie.

63Des synergies sont également à relever sur un deuxième dossier de portée symbolique : les biocarburants. Le Brésil qui, pour rappel en est le premier producteur et ambitionne d’en devenir le premier exportateur, devant les États-Unis, dispose d’une étendue géographique immense permettant la production de quantités massives de bioéthanol, principalement au départ de la canne à sucre. L’Afrique du Sud quant à elle voit en ces biocarburants l’occasion d’une part de créer de nombreux emplois à l’heure où son taux de chômage talonne les 40% de la population active, d’autre part l’opportunité de réduire sa facture environnementale alors que 95% de l’énergie nécessaire à son électricité provient du charbon dont elle détient 8% des réserves mondiale82 et qu’une autre source majeure de sa pollution émane du secteur des transport.

64Indépendamment des gains économiques en présence, les retombées s’apprécient ici encore en termes d’image pour les deux acteurs. Sujet connexe aux préoccupations environnementales qui figurent à l’avant plan de l’agenda international contemporain, la promotion des énergies renouvelables et alternatives permet de redorer le blason de ces pays émergents souvent pointés du doigt comme particulièrement peu scrupuleux en matière de respect de l’environnement.

65En outre, bon nombre de projets et contrats que le Brésil scelle avec l’Afrique, et particulièrement dans ces deux matières, sont le plus souvent assortis d’un volet «transfert de technologie». Dès lors, en plus de satisfaire les besoins de ces pays en voie de développement ainsi que leurs désirs en matière de coopération technique, mais aussi de nourrir comme nous l’avons vu l’influence normative brésilienne sur la scène internationale, la spécificité de sa démarche parfait son image d’acteur bienveillant et œuvrant en faveur des intérêts du continent africain. Ce qui lui confère un avantage comparatif non négligeable vis-à-vis d’autres acteurs présents en Afrique, tels que l’Union européenne jugée trop paternaliste, ou encore l’Inde et surtout la Chine qui leur apparaissent comme des pilleurs supplémentaires de leur continent. Cette dernière commence d’ailleurs à pâtir progressivement d’une mauvaise image car elle préfère importer sa propre main d’œuvre plutôt qu’employer des locaux – qu’elle est par ailleurs accusée de maltraiter lorsqu’ils réclament de meilleurs conditions salariales ou de travail83.

66Ainsi, plutôt qu’une alternative, l’Afrique voit en le chef du Brésil un contrepoids appréciable à ses autres partenaires commerciaux en dépit du fait qu’il demeure un «acteur de second rang», au regard des volumes commerciaux échangés, sur le continent noir84. Pour cette raison, la rude concurrence existant entre certaines firmes sud-africaines et brésiliennes (voir point 3) s’avère être un moindre mal, et un contrepoids intéressant, voire, important dans les nouveaux rapports de pouvoir qui s’établissent entre les (nouvelles) puissances présentes en Afrique. Le Brésil est donc parvenu à imposer une image de «puissance douce» sur le continent africain, avec lequel se s’est créée au fil du temps une relation d’interdépendance, dont les bénéfices majeurs s’évaluent sur le plan de l’image véhiculée par ces deux pays dits «émergents», qui misent désormais sur leur pouvoir d’attraction pour obtenir le soutien nécessaire à l’obtention d’un ticket d’entrée dans la «cour des Grands».

Conclusion

67Tâchant de déterminer la place accordée au régionalisme (au sens avant tout géographique du terme) dans les rapports qu’entretiennent les pays dits «émergents», à l’instar du Brésil et de l’Afrique du Sud, la présente contribution s’est articulée autour du postulat que l’intérêt et les efforts investis par ces derniers pour rapprocher leurs sous-continents respectifs visent essentiellement à tirer parti d’un tremplin régional pour assouvir des ambitions plus globales, telles qu’une place importante au sein des diverses instances internationales édictant les règles qui régissent le comportement des États sur la scène mondiale.

68Dans une première partie furent mises en lumière les racines lointaines, économiques mais surtout culturelles, sur lesquelles reposent les liens tissés actuellement entre le Brésil, l’Afrique du Sud, et leur espace régional mutuel. La colonisation portugaise est ainsi à l’origine de la présence de nombreux brésiliens se réclamant d’origines africaines et de la diffusion de la langue portugaise sur une partie notable du continent noir ; deux éléments factuels en filigrane dans le discours brésilien qui emballe dans des élocutions tintées de tiers-mondisme ses intérêts éminemment géostratégiques.

69Pour autant, ce n’est qu’à partir de la seconde moitié des années 1970 que les relations afro-brésiliennes connaîtront un premier véritable essor, abordées dans une seconde partie qui visait à distinguer la place singulière accordée par le Brésil et l’Afrique du Sud à leurs rapports bilatéraux, ainsi qu’à leurs relations avec leurs voisins mutuels. À ce titre, les virages démocratiques, d’abord en Amérique latine au tournant des années 1980, et dix années plus tard en Afrique du Sud, furent déterminants. Au fil de la démocratisation des leur sous-continents, tout deux se sont accordé mutuellement une place croissante dans leur agenda extérieur.

70Depuis lors, leurs nombreuses initiatives – abordées dans un troisième point – visant à rapprocher les cônes sud de l’Amérique et de l’Afrique (Zopacas, Atlas Sur, CPLP, Accord commercial préférentiel Mercosur-SACU/SADC) ont eu pour objectif premier de les conforter dans ce rôle d’interlocuteur privilégié et partenaire stratégique en Amérique latine et Afrique australe, notamment aux yeux des grandes puissances industrielles traditionnelles. Cette partie a tenté de dégager l’approche de plus en plus «inclusive» adoptée au fil du temps par ces deux pôles régionaux, alors que leurs succès économiques nourrissent leurs ambitions globales qui se voient par ailleurs freinées par les prétentions similaires de certains de leurs homologues régionaux.

71Ainsi, nous avons pu appréhender dans un quatrième et dernier temps les retombées (économiques, symboliques, politiques) escomptées d’une telle stratégie par ces deux «puissances en devenir» qui tentent d’associer leurs voisins afin de convertir en quelque sorte en tremplin ce qui leur fait office de frein85 dans leur course à la puissance.

72Un constat s’impose : le Brésil est désormais systématiquement convié aux Green Rooms – ces réunions très informelles à l’OMC qui rassemblent un nombre très restreint de pays et au sein desquelles les accords sont dégagés avant sein d’être présentés à l’ensemble des membres pour validation. Il fut également invité à rejoindre le groupe des «Cinq parties intéressées» à Hong Kong en 2005, à l’occasion de la 6e conférence ministérielle de l’OMC, chargé de relancer les négociations bloquées depuis la conférence précédente à Cancún en 2003. Tout deux participent activement depuis la seconde moitié des années 2000 aux sommets du G20, qui réunit depuis 1999 les pays les plus riches de la planète pour œuvrer collectivement à la stabilisation du marché financier mondial. Plus récemment, l’Afrique du Sud a rejoint le club select des nouveaux riches de la planète – le groupe des BRICS – en grande partie grâce aux travaux entrepris au sein de l’initiative brésilienne de l’IBSA.

73Si le spectre du siège permanent au CSNU est encore loin, le chemin parcouru par ces deux pays sur le plan de la reconnaissance internationale est notable. La question que ces évolutions soulèvent est : à mesure que les ambitions globales du Brésil et de l’Afrique du Sud sont atteintes, qu’adviendra-t-il de la place accordée au régionalisme dans leurs rapports ?

Notes

1 Wilson (D.) et Purushothaman (R.), «Dreaming With BRICs: The Path to 2050», Goldman Sachs Global Economics Paper, n° 99, New York, The Goldman Sachs Group Inc., 2003.
2 Par exemple, le Brésil fait partie du Marché Commun du Sud (Mercosur) avec l’Argentine, le Paraguay et l’Uruguay ; l’Afrique du Sud est membre de l’Union douanière d’Afrique australe (Southen Africa Custom Union – SACU) aux côtés du Botswana, du Lesotho, du Swaziland et de la Namibie, ou encore de la Communauté de Développement d’Afrique australe (Southern African Development Community – SADC) avec, en plus des membres de la SACU, l’Angola, la République démocratique du Congo, Madagascar, le Malawi, l’Île Maurice, le Mozambique, les Seychelles, la Tanzanie, la Zambie et le Zimbabwe. Toutefois, le concept de «régionalisme» sera ici interprété dans son acception essentiellement géographique.
3 Lafargue (F.), «Le Brésil, une puissance africaine ?», Afrique contemporaine, Bruxelles, De Boek Université, vol. 4, n° 228, 2008, p. 139.
4 Exilée pour fuir la mise sous tutelle britannique au terme de la seconde guerre des boers (1899-1902).
5 Roelofse-Campbell (Z.), «Brazil and South Africa: an evolving relationship between regional powers», Politeia, vol. 16, n° 2, 1997, http://www.unisa.ac.za/Default.asp?Cmd=ViewContent&ContentID=11596 (consulté le 12 mai 2011). Pourtant, comme nous le verrons en infra, c’est plutôt le Brésil qui constitue plus récemment un partenaire stratégique pour Pretoria.
6 En effet, son voisin argentin, l’autre «grand» du sous-continent, est dépourvu d’une politique africaine, a entretenu une relation plutôt «spasmodique» avec le continent africain, au gré des opportunités offertes par la conjoncture, voir Lechini (G.), «Is South-South Co-operation still Possible? The case of Brazil’s Strategy and Argentina’s Impulses Towards the New South Arica and Africa», in Boron (A.) et Lechini (G.) (éd.), Politics and Social Movements in an Hegemonic World: Lessons from Africa, Asia and Latin America, CLASCO, Consejo Latinoamericano de Ciencias Sociales, Buenos Aires, 2005, p. 320-322.
7 Santander (S.), «L’Atlantique : espace multiplicateur de puissance ? L’Afrique dans l’agenda extérieur brésilien», in Dorval (B.) (ed.), Repenser l’Atlantique : commerce, immigration et sécurité, Bruxelles, Buylant, 2011 (à paraître).
8 Le passé colonial de ses pays a en commun essentiellement leur colonisateur. Car l’histoire de la colonisation du Brésil et des pays lusophones africains présente de nombreuses différences, notamment l’indépendance, acquise au Brésil un siècle et demi avant les colonies africaines, et dans le plus grand pacifisme, contrairement aux guerres civiles d’indépendance qu’ont connues ses «frères» africains.
9 Elle comprend l’Angola, le Brésil, le Cap-Vert, la Guinée-Bissau, le Mozambique, le Portugal, São Tome e Príncipe et le Timor Oriental, et comme membres associés la Guinée-Équatoriale, l’Île Maurice et le Sénégal.
10 Santander (S.), 2011, op. cit.
11 À cette époque, le Brésil entretient essentiellement des liens commerciaux avec l’Afrique du Sud, et économiques et/ou diplomatiques avec la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Kenya, le Nigeria et le Sénégal ; Ibid.
12 Peixoto (A. C.), «Le Brésil et l’Afrique : solidarités culturelles et stratégie commerciale», Politique africaine, 10 juin 1983, p. 35, http://www.politique-africaine.com/numeros/PDF/010025.pdf (consulté le 12 mai 2011).
13 Lafargue (F.), op. cit., p. 141.
14 Le Brésil négociait en effet les votes de la communauté d’immigrants portugais en échange de son soutien au colonialisme portugais au sein des forums des Nations Unies. En outre, le Brésil évitait de prendre position en faveur de la décolonisation étant donné que certains de ces pays, à l’exemple du Sénégal (Dakar), étaient stratégiques en termes de liens de communication aériennes et navales pour l’Otan dont faisait déjà partie le Portugal, voir Fagundes Visentini (P.), «Prestige diplomacy, southern solidarity or ‘soft imperialism’ ?Lula’s Brazil-Africa Relations», in Rolland (D.) et Carlos Lessa (A.) (éd.), Relations internationales du Brésil. Les chemins de la puissance/Brazil’s international relations. Paths to power, Volume 2, Aspects régionaux et thématiques/Regional and thematic focus, Paris, L’Harmattan, Inter-national, p. 232.
15 Peixoto (A. C.), op. cit., p. 35-37.
16 Notamment CVRD (secteur minier), Petrobras (pétrole), Odebrecht (conglomérat investissant dans de nombreux secteurs tels que la construction, l’immobilier, les biocarburants, …)
17 Santander (S.), 2011, op. cit.
18 En outre, les relations commerciales, diplomatiques et militaires entre le Brésil et le reste du continent africain accuseront un net recul au cours des années 1980, à l’heure où le premier n’échappe pas à la crise de la dette amorcée par le Mexique dès 1982 et qui entraînera le reste du sous-continent dans un marasme économique et financier qualifié de «décennie perdue» de l’Amérique latine, et où le second s’enlise dans une période dite d’«afro-pessimisme», due notamment aux effets de la crise pétrolière de la décennie antérieure qui a fortement restreint sa capacité financière.
19 Ce décret ordonne un embargo sur les ventes d’armes, d’équipement militaire et de pétrole et bannit les échanges culturels et sportifs ; Lechini (G.), 2005, op. cit., p. 325.
20 Roelofse-Campbell (Z.), op. cit.
21 Le ministre des affaires étrangères de l’époque effectuera plusieurs visites en Amérique latine (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay) ; de nouvelles représentations diplomatiques sont ouvertes (Uruguay, Brésil, Bolivie) ; une coopération stratégique militaire est suggérée et accueillie favorablement notamment en Argentine ; Ibid.
22 Bohou (J.-M.), Géopolitique et projection de puissance du Brésil au XXIe siècle, Paris, L'Harmattan, 2007, p. 262-263.
23 Lechini (G.), 2005, op. cit., p. 330.
24 Acronyme pour Zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud.
25 Ministério das Relações exteriores – Itamaraty, «Temas Políticos e Relações Bilaterais. África do Sul», 2009, p. 2 et 11, http://www.itamaraty.gov.br (consulté en mai 2011).
26 Lechini (G.), «Selective and possible south-south co-operation: the case of Argentina and Southern Africa», Unisa Center for Latin American Studies, vol. 15, n°2, 1999, http://www.unisa.ac.za/default.asp?Cmd=ViewContent&ContentID=7332 (consulté le 12 mai 2011).
27 ISIZA, «Blood Brothers: Brazil & Africa», 26 avril 2010, http://www.isiza.co.za/archive_issues/issue10/485062.htm (consulté le 12 mai 2011).
28 Ministério das Relações exteriores – Itamaraty, op. cit., p. 5.
29 All Africa.com, «South Africa: Arm in Copper Joint Venture in Zambia», 30 août 2010, http://allafrica.com/stories/201008300224.html (consulté le 12 mai 2011).
30 Odebrecht, http://www.odebrecht.com.br (consulté en avril 2011).
31 SouthAfrica.info, «Brazilian industrial firm expands in SA», 26 juillet 2010, http://www.southafrica.info/business/investing/weg-zest-260710.htm (consulté le 12 mai 2011).
32 SouthAfrica.info, «Naspers buys into Brazilian media», 8 mai 2006, http://www.southafrica.info/about/media/naspers-080506.htm (consulté en mai 2011).
33 Anglo-american, http://www.angloamerican.com.br/ (consulté le 12 mai 2011).
34 SouthAfrica.info, «SA pharma enters Latin America», 26 novembre 2007, http://www.southafrica.info/pls/procs/iac.page?p_t1=2780&p_t2=7381&p_t3=0&p_t4=0&p_dynamic=YP&p_content_id=689309&p_site_id=38 (consulté le 12 mai 2011).
35 United Nations, «Declaration of a zone of peace and co-operation in the South Atlantic», A/RES/41/11, New York, 50th plenary meeting, 27 octobre 1986, http://www.un.org/documents/ga/res/41/a41r011.html (consulté le 12 mai 2011).
36 À savoir, l’Argentine, le Brésil et l’Uruguay en Amérique latine ; l’Afrique du Sud, l’Angola, le Bénin, le Cap Vert, les Comores, la République démocratique du Congo, le Congo-Brazzaville, la Côte d’Ivoire, le Gabon, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Guinée-Équatoriale, le Libéria, la Namibie, São Tomé e Príncipe, le Sénégal, la Sierra Léone, et le Togo en Afrique.
37 Lechini (G.), 1999, op. cit.
38 United Nations Office on Drugs and Crime, «UNODC participates in preparatory meeting of the ZOPACAS in Brasília», 7 décembre 2010, http://www.unodc.org/southerncone/en/frontpage/2010/12/07-unodc-participa-de-reuniao-preparatoria-da-zopacas-em-brasilia.html (consulté le 12 mai 2011).
39 Fiatikoski (R. M.), «Brazilian continental shelf expansion. Widening the outer edge of the Blue Amazon», Jus Navigandi, Teresina, vol. 16, n° 2764, 25 janvier 2011, http://jus.uol.com.br/revista/texto/18349/brazilian-continental-shelf-expansion (consulté le 12 mai 2011).
40 Lemos (L. A.) et Romanelli (M.), «Royalties e a Amazônia Azul», Ministério das Relações exteriores, 7 juillet 2010, http://www.itamaraty.gov.br/sala-de-imprensa/selecao-diaria-de-noticias/midias-nacionais/brasil/valor-economico/2010/07/07/royalties-e-a-amazonia-azul/?searchterm=azul (consulté le 12 mai 2011).
41 Ibid.
42 Fiatikoski (R. M.), op. cit.
43 Dos Santos (E. M.), «Brésil, l’éveil d’un nouveau géant pétrolier dans l’Atlantique Sud», SciencesPo, Paris, septembre 2010, p. 5-6, http://www.ceri-sciencespo.com/archive/2010/septembre/dossier/art_emds.pdf (consulté le 12 mai 2011)
44 Lechini (G.), 2005, op. cit., p. 322-323.
45 Roeflofse-Campbell (Z.), op. cit.
46 Le faible volume d’échanges commerciaux entre le Brésil et l’Inde s’explique en grande partie par le manque de moyens de connexion qui engendre des coûts de transport anticoncurrentiels, voir Research and Information System for Developing Countries, Trinity of the South. Potential of India-Brazil-South Africa Partnership, New Delhi, Academic Foundation, 2008, p. 178-191.
47 Martìnez (A. J), «A Maritime Strategy for the South Atlantic», in Taylor (P. D.), «Perspectives on Maritime Strategy. Essays from the Americas», Naval College Press, Newport, Rhode Island, 2008, http://www.usnwc.edu/Publications/Naval-War-College-Press/Newport-Papers/Documents/31-pdf.aspx (consulté le 12 mai 2011).
48 Comunidade dos Países de Língua Portuguesa, http://www.cplp.org/id-46.aspx (consulté le 12 mai 2011).
49 Acronyme pour Centro cultural Brasil – Africa do Sul (Centre culturel Brésil – Afrique du Sud).
50 Il est toutefois difficile de mesurer l’impact de cette initiative, car sa visibilité, à tout le moins sur la toile, se confine à l’existence d’une brochure de 2 pages sur le site de l’ambassade brésilienne à Pretoria et d’une page sur un site de socialisation qui ne compte actuellement qu’une petite dizaine d’adhérents, http://nb-no.facebook.com/pages/Cbras-Brazil-South-Africa-Cultural-Centre/114329828648252?v=info (consulté le 12 mai 2011).
51 Acronyme pour Certificado de Proficiência em Língua Portuguesa para Estrangeiros (Certificat de compétence en langue portugaise pour étrangers).
52 Embaixada do Brasil em Pretória, «Would you like to study in Brazil ?», http://pretoria.itamaraty.gov.br/pt-br/would_you_like_to_study_in_brazilr.xml (consulté le 12 mai 2011).
53 Walfadjiri – L’Aurore, «Le Président Lula au sommet des chefs d’État de la CEDEAO : ‘Le Brésil et l’Afrique sont unis pour le futur’», 5 juillet 2010, http://fr.allafrica.com/stories/201007050687.html (consulté en août 2010) ; Abidjan.net, «Fin du sommet CEDEAO-Brésil – Le Brésil ouvre largement les bras à la CEDEAO», 5 juillet 2010, http://news.abidjan.net/article/?n=368801 (consulté en août 2010).
54 Nye (J.), Soft Power. The Means to Success in World Politics, New York, Public Affairs, 2004.
55 Bratt (M. C.), «Mercosur-SACU FTA: Stenghening Relations across the South Atlantic», CUTS-CITEE Briefing paper, décembre 2005, p. 1, http://www.cuts-citee.org/PDF/IBSA-2-2005.pdf (consulté le 12 mai 2011).
56 Pahad (A.), «Speech given on the Occasion of the 2nd SADC/MERCOSUR Conference», Sao Paulo, 25-26 octobre 2000, http://www.dfa.gov.za/docs/speeches/2000/paha1026.htm (consulté le 12 mai 2011).
57 Plusieurs facteurs domestiques et externes ont en effet retardé l’aboutissement des négociations, voir Bratt (M. C.), op. cit., p. 2-3.
58 La SADC comprend, en plus des cinq membres de la SACU, l’Angola, la République démocratique du Congo, Madagascar, le Malawi, l’île Maurice, le Mozambique, les Seychelles, la Tanzanie, la Zambie et le Zimbabwe.
59 Bratt (M. C.), op cit., p. 3-4.
60 Research and Information System for Developing Countries, op. cit., p. 99-102.
61 Voir la Déclaration de Brasilia fondatrice du forum de dialogue IBSA, http://www.ibsa-trilateral.org/index.php?option=com_content&view=article&id=154&Itemid=86 (consulté le 12 mai 2011).
62 Ce groupe de négociations sur l’agriculture à l’OMC compte parmi ses membres l’Afrique du Sud, l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, le Chili, la Chine, Cuba, le Guatemala, l’Inde, l’Indonésie, le Mexique, le Nigéria, le Pérou, le Pakistan, le Paraguay, les Philippines, la Tanzanie, la Thaïlande, l’Uruguay, le Venezuela, le Zimbabwe, l’Égypte, l’Équateur.
63 Notamment les questions dites «de Singapour» concernant les règles en matière d’investissements, de concurrence, de transparence et la facilitation des échanges.
64 À noter que le pouvoir de consommation est très inégalement réparti sur toute la population. Selon une étude de la fondation privée Getulio Vargas, la classe moyenne représente environ la moitié de la population brésilienne. Les plus riches sont quelques 20 millions, soit environ 10 % de la population, voir Côrtes Neri (M.) (coord.), «A Nova Classe Média : O Lado Brilhante dos Pobres», FGV/CPS, Rio de Janeiro, 2010.
65 Un chiffre considérablement réduit lorsque l’on considère la pauvreté et le pouvoir d’achat de la population.
66 Turcotte (S.) et Lord (G.-J.), «L’Afrique du Sud, le Brésil et l’Inde dans l’espace commercial global : le G-3 est-il viable ?», in Deblock (C.) et Régnault (H.) (éd.), Nord-Sud : la reconnexion périphérique, Montréal, Athéna, 2006, p. 105.
67 Santander (S.), «Le Brésil et ses aspirations au statut de puissance : autoperception, capacités, reconnaissance internationale», in Santander (S.) (éd.), L’émergence de nouvelles puissances : vers un système multipolaire ?, Paris, Ellipses, 2009, p. 69.
68 Lecoutre (D.), «Des voix du Sud au Conseil de Sécurité. L’Afrique et la réforme des Nations unies», Le Monde diplomatique, juillet 2005, p. 17 ; Danglin (F.), «Inde, Brésil, Afrique du Sud. Pacte démocratique entre puissances du Sud», Le Monde diplomatique, n° 684, mars 2011, p. 18-19.
69 Par exemple, alors que le Président Sarkozy soutient ouvertement la candidature du Brésil, la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton déclarait avec réserve en février dernier que son pays admirait le leadership ascendant du Brésil et son aspiration à obtenir un siège permanent au sein du Conseil de Sécurité de l’ONU, The Economist, «The United States and Latin America. Flying down to Rio», The Economist, 17 mars 2011, http://www.economist.com/node/18390104 (consulté le 12/05/11).
70 Par exemple, l’Argentine, le Venezuela et le Mexique prétendent également à un tel poste ; et l’Afrique du Sud se voit confrontée aux ambitions de l’Algérie et de l’Égypte en Afrique du Nord, et à celles du Nigéria en Afrique subsaharienne. Cette dernière la concurrence essentiellement grâce à ses abondantes et très convoitées ressources pétrolifères, mais véhicule aussi son influence par le biais de son industrie filmographique, appelé «Nollywood», qui produit et diffuse quantité de films et séries à travers tout le continent. Voir The Economist, «Nollywood. Lights, camera, Africa», The Economist, 26 décembre 2010, http://www.economist.com/node/17723124 (consulté le 12/05/11).
71 Acronyme pour Economic Community of West African States qui est une intégration régionale fondée en 1975 réunissant 15 États d’Afrique occidentale.
72 BBC News, «Brazil’s Lula pays tribute to Africa’s historic role», 4 juillet 2010, http://www.bbc.co.uk/news/10500100 (consulté en mai 2011).
73 Courrier International, «Vu du Brésil – Lula veut jouer les médiateurs», Courrier International, 18 mars 2010, http://www.courrierinternational.com/article/2010/03/18/lula-veut-jouer-les-mediateurs (consulté le 12/05/11). L’Afrique du Sud qui siégeait également en tant que membre non permanent au CSNU s’était abstenue de voter en faveur des sanctions contre l’Iran.
74 The Economist, 17 mars 2011, op. cit.
75 Même si le Brésil vit désormais en relative harmonie avec ses voisins depuis la résolution de ces conflits à la fin du 19e , début du 20e siècle.
76 Turcotte (S.), «L’Afrique du Sud post-apartheid: une puissance régionale en émergence» in Santander (S.) (éd.), 2009, op. cit., p. 40.
77 Alden (C.) et Le Pere (G.), South Africa’s Post-Apartheid Foreign Policy – from Reconciliation to Revival ?, Oxford, Oxford University Press, Adelphi Paper n°362, IISS, 2003, p. 12 et 24-25.
78 Lugan (B.), op. cit., p. 475-476 ; South African National Government, «White paper on South-African participation in International peace missions», 21 octobre 1998, http://www.pdgs.org/Archivo/d00000fb.htm (consulté le 12/05/11).
79 Alden (C.) et Le Pere (G.), op. cit., p. 37.
80 Ibid., p. 13.
81 Ibid., p. 28.
82 Lory (G.), L’Afrique du Sud, Paris, Karthala, 2010, p. 168 et 175.
83 Lewis (D.), «Special Report: In Africa, can Brazil be the anti-China?», Reuters, 23 février 2011, http://www.reuters.com/article/2011/02/23/us-brazil-africa-idUSTRE71M1I420110223 (consulté le 12 mai 2011).
84 Lafargue (F.), op. cit., p. 144.
85 Il faut préciser que les voisins qui partagent par exemple la même ambition eu égard à l’obtention d’un siège permanent au CSNU ne font pas tous partie de l’espace immédiat du Brésil et de l’Afrique du Sud, comme c’est respectivement le cas du Venezuela du Mexique côté sud-américain, et de l’Algérie, de l’Égypte et du Nigéria en Afrique. Toutefois, les craintes des voisins directs de Brasilia et Pretoria évoquées aux points 2 et 3 constituent bel et bien un frein dans leur quête de puissance et du statut de représentant légitime de leur sous-continent justifiant leur place à la table des négociations entre «grands».

To cite this article

Audrey Lauriello, «L’enjeu du régionalisme dans les relations entre les pays émergents. Le cas du Brésil et de l’Afrique du Sud», Fédéralisme Régionalisme [En ligne], Numéro 1 - Le régionalisme international dans les Amériques : dynamique interne et projection internationale, Volume 11 : 2011, URL : https://popups.ulg.ac.be/1374-3864/index.php?id=1059.

About: Audrey Lauriello

Chercheure au Département de Science Politique de l’Université de Liège, Unité de relations internationales