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Tourisme, ville et patrimoine. Surfréquentation ou remise en cause ?
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Forme de mobilité consubstantielle à l’Occident moderne, le tourisme est né de la curiosité pour des ailleurs terrestres jugés indispensables à la formation du goût, à la construction des identités ou à la découverte de l’altérité. La gamme des curiosités qui l’alimentent comme l’extension des aires qu’ils concernent n’ont cessé de s’élargir. Il touche à la fois des centres urbains (villes d’art et d’histoire et stations touristiques), des aires de peuplement rural et des solitudes. Les remises en cause qu’il connaît naissent à la fois des sur-fréquentations qu’il engendre et de la critique, en Occident ou ailleurs, de ses fondements.
Abstract
As a form of mobility consubstantial to modern Western civilization, tourism was born from the curiosity for terrestrial places involved in the formation of taste, the construction of identities or the discovery of alterity. The range of curiosities it fed as well as the extension of the areas it transformed have constantly grown. Tourism affects urban centers (cities of art and history or resorts), rural areas or wilderness. The calling into question it knows results at the same time from the over-crowding it generates in many places and from the criticism of its foundations in Western countries or elsewhere.
Tabla de contenidos
INTRODUCTION
1La dénonciation du surtourisme (overtourism) prend de l’ampleur. Elle est particulièrement vive dans les zones les plus fréquentées et dans les villes dont le patrimoine attire des foules de visiteurs. Ce ras-le-bol résulte largement de l’augmentation exponentielle des déplacements de loisir depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Mais n’a-t-il pas des raisons plus profondes ? C’est la question que nous voulons examiner ici.
2Le tourisme tel que nous le connaissons apparaît en Occident à la Renaissance, mais il est l’héritier de formes de mobilité humaine plus anciennes – la transhumance, le pèlerinage, le séjour thermal, la villégiature rurale ou, dans certaines traditions religieuses, la retraite au désert... Il s’en distingue pour deux raisons : d’une part, c’est une forme de loisir qui repose sur la consommation ou la jouissance d’espaces et non sur leur utilisation productive ; et, d’autre part, il distrait ceux qui le pratiquent, affine leurs goûts, leur offre des expériences inédites, mais s’inscrit dans le registre du profane.
3Chez les Occidentaux, le tourisme témoigne d’une nouvelle quête d’ailleurs. Ceux-ci ne se situent plus dans un au-delà du ciel ou dans un en-deçà enfoui dans les profondeurs de la terre, dans le non-dit des sociétés ou dans l’inconscient des hommes. Les autres mondes que recherche le touriste sont profanes, mais révèlent certaines aspirations profondes des sociétés qui en sont porteuses.
I. Le tourisme comme création occidentale
A. Les spécificités du tourisme
4La civilisation occidentale dans laquelle s’est élaboré le tourisme tel que nous le connaissons, limite les jeux de la transcendance et de l’immanence à la sphère privée, et ramène tout à la nature, à l’homme et à la société. Elle substitue aux aux-delàs de la religion des ailleurs terrestres qui transcendent le quotidien parce qu’ils sont distants dans l’espace ou dans le temps. Le tourisme répond à une quête de ce qui donne un sens à la vie et que n’offre pas l’existence quotidienne. Il met en jeu presque toutes les composantes de la culture : culture du corps, de sa plénitude et de sa santé ; culture de la société, de ses us et coutumes et des formes qu’y prend la sociabilité ; domaine des arts, des sciences et des lettres ; il ne met pas l’accent sur la spiritualité religieuse.
5Dans ce cadre, le déplacement se justifie par le mieux-être auquel il donne accès : un mieux-être qui naît du contact avec la nature et de la fréquentation des autres et des lieux où se sont accumulées leur expérience et leur culture.
B. Montaigne et la possibilité du tourisme
6Au premier regard, le Voyage en Italie de Montaigne s’inscrit dans de vieilles traditions. L’illustre Bordelais fait halte à Plombières, à Baden, à Albano ou à Lucques pour soigner sa gravelle. Il va en pèlerinage à Notre-Dame-de-Lorette. Mais sa curiosité est infiniment plus large : il est friand d’églises, de châteaux et plus encore de jardins, comme à Castello et à Pratolino, près de Florence ; en Suisse et en Allemagne, il vante l’abondance et la qualité de la chère et le confort des logis chauffés par des poêles. Il note quand « le pays est difficile aux gens de pied par temps de fange ». Il est sensible aux campagnes, aux bourgs, aux villes, à leurs habitants, à leurs activités, à leurs mœurs, aux fêtes qui y rompent la routine des jours. Il s’enquiert de la religion luthérienne en Suisse et en Allemagne, visite des synagogues en Italie et s’étonne de la désinvolture avec laquelle les Italiens pratiquent leur foi catholique.
7Montaigne voyage avec allégresse. Il est fasciné par les hommes et les lieux qu’ils modèlent et habitent. Le regard qu’il porte sur le monde est déjà celui du touriste moderne ; attentif à tout ce qu’offre l’humaine condition, il observe avec curiosité la diversité des formes de vie et celle des cadres où elle se déroule. Il s’efforce de les comprendre mais garde cependant une certaine distance.
8Aussi enthousiaste qu’il soit, le touriste reste en effet un peu en marge de ce qu’il voit et de ceux qu’il rencontre. N’est-ce pas ce qui fait de Montaigne un précurseur ? La réflexion sur les Cannibales a introduit chez lui un doute sur ce qu’est la civilisation ; la déchirure de la Réforme l’a conduit à s’interroger sur ce qu’est la foi et sur la diversité des formes qu’elle prend ; sa formation humaniste et la lecture de Sextus Empiricus lui ont appris à s’interroger sur le monde. C’est par des attitudes de ce type que l’Occident se différencie désormais des autres civilisations et commence à se doter, en marge des religions sur lesquelles s’appuient partout les sociétés, d’idéologies dont l’autorité ne repose que sur les évidences qu’offre l’environnement terrestre.
C. Tourisme, roman de formation et processus de civilisation
9L’Occident met plusieurs siècles à construire les diverses formes de déplacement que constitue aujourd’hui le tourisme : si l’ouverture de Montaigne à tout ce qui est humain établit, dès le départ, la possibilité de ce type d’activité, son développement se fait par étapes. Dans un premier temps, le voyageur est attiré par des formes émergentes de culture artistique : le jeune aristocrate anglais devient un homme de goût à l’occasion du Grand Tour qui le mène d’une ville d’art et d’histoire à une autre. Il vit ainsi un roman de formation qu’il partage avec d’autres. Celui-ci s’enrichit au contact des peintres paysagistes dans le courant du XVIIe siècle : le voyageur découvre le plaisir qu’offrent les panoramas le long de son itinéraire.
10Le processus de civilisation des mœurs que Norbert Elias montre à l’œuvre dans le Versailles de Louis-XIV prend des formes différentes en Angleterre – et ailleurs en Europe - au XVIIIe siècle. La cour des rois George est terne. Si l’aristocratie anglaise aime profiter de la saison des spectacles à Londres, ce n’est pas là qu’elle affine ses mœurs, mais à l’occasion des cures thermales qu’elle effectue à Bath alors à la mode. Deux remarquables architectes, les John Wood, père et fils, y multiplient squares, cirques et croissants ; ils intègrent les maisons voisines dans une même façade monumentale et créent ainsi les terraces qui ennoblissent le paysage urbain. Le Beau Nash arbitre les élégances. Les visiteurs déambulent sur la promenade autour de laquelle se structurent désormais les stations thermales et touristiques. Ainsi se définit un nouvel art de vivre. Le même type de station apparaît au même moment à Spa, en Belgique, à Luchon en France grâce à d’Etigny.
11Réservé aux élites, le premier tourisme constitue un rituel d’initiation au goût artistique - à travers le Grand Tour – et à la civilisation des mœurs – à l’occasion de cures dans les villes thermales. Le touriste fréquente les villes d’art et d’histoire, séjourne dans les stations qui sont en train de naître et va admirer les beaux paysages. Deux de ses trois catégories sont urbaines, la troisième l’est en partie.
II. Au temps du romantisme et de la révolution industrielle
12Inventé aux Temps Modernes, le tourisme apparaît comme une forme de mobilité et de sociabilité spécifiquement occidentale. Sa construction se poursuit et s’accélère au XIXe siècle. Ses expressions se diversifient même si sa dimension culturelle n’est pas remise en cause. Il conquiert les classes moyennes, cependant son incidence spatiale déborde, pour la première fois, du domaine européen.
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A. Les dynamiques culturelles
14Le tourisme demeure un signe de distinction sociale : il ouvre les élites qui le pratiquent à des formes raffinées de culture et les fait fréquemment sortir du cadre national où s’inscrit l’existence des gens modestes. Bon nombre de voyages sont toujours motivés par le souci d’affiner son goût en visitant des villes d’art et d’histoire. D’autres déplacements le sont par le plaisir de séjourner durant la saison dans une ville d’eaux. Ailleurs, les élites foncières pratiquent toujours une transhumance saisonnière vers les zones rurales.
15Continuité, mais transformation aussi. Le souci d’hygiène devient une préoccupation dominante à la fin du XVIIIe siècle. Comment améliorer la santé de chacun et de tous ? En vivant plus sainement estiment beaucoup de médecins. Les déplacements motivés par la santé se diversifient : l’air marin fortifie le corps surtout là où il est iodé ; les bains de mer sont sédatifs ; la montagne stimule la respiration, soulage les poitrinaires et contribue à leur guérison. Les séjours se multiplient au bord de la mer ou en montagne. Ils prennent la forme d’un tourisme de station : les formes urbaines qui le caractérisent se multiplient le long des rivages ou en montagne.
16Les imaginaires touristiques s’enrichissent ; la vocation touristique des lieux ne naît pas de leurs caractéristiques physiques : elle résulte des mythes qui les entourent (Chadefaud, 1988).
17L’histoire a comme nouveaux héros le peuple et la nation, et comme scène les campagnes et les villes. L’art s’affranchit des canons du classicisme. Sa composante médiévale est portée aux nues. Elle est infiniment plus riche et plus complexe qu’on ne l’imaginait : Charles Duhérissier de Gerville et Thomas Rickmen apprennent à distinguer, en Normandie et en Grande-Bretagne, l’art roman de l’art gothique. Les Voyages pittoresques et romantiques dans l’Ancienne France (Nodier et al., 1822-1878 ; Claval et Jourdain, 2017 ; Plazuala, 1989) donnent conscience aux Français de l’immense diversité de châteaux, d’abbayes, d’églises que possède leur pays : un patrimoine présent en ville comme à la campagne. Des habitudes se prennent : dans un village comme en ville, le touriste visite l’église et admire le château et les vieilles maisons. Il découvre des points d’intérêt dans la totalité du pays : l’impact spatial du tourisme se diversifie.
18Aux villes d’art et d’histoire et aux stations construites pour le séjour thermal, balnéaire ou d’altitude s’ajoutent les aires sauvages des rivages ou des montagnes où l’on va se fondre dans la nature ou l’affronter, et le semis à la fois rural et urbain du patrimoine religieux et aristocratique de l’ancienne France - ou de l’Espagne de jadis, de la vieille Allemagne et de l’Italie médiévale. Ce dernier tourisme est diffus et ne nécessite pas la mise en place d’infrastructures spécifiques.
19Le romantisme fait également sortir le tourisme d’Europe. Avec L’Itinéraire de Paris à Jérusalem (1811), Chateaubriand lui annexe la Grèce, le Levant et la rive Sud de la Méditerranée. On sort pour la première fois des zones de tradition chrétienne.
20L’orientalisme incite à découvrir des civilisations qui ont précédé la nôtre. Leur altérité, leurs couleurs et leurs costumes provoquent un dépaysement total. Le tourisme s’enrichit d’une curiosité ethnographique.
21Cette évolution résulte des imaginaires que créent les romantiques et des récits de voyage qu’à l’instar de Victor Hugo, d’Alexandre Dumas ou de Théophile Gautier, ils multiplient. Mais on ne visite que le pays qu’on a déjà visité ou celui qu’un autre a déjà visité à votre intention. Des guides sont donc le complément forcé du voyage. Chaque pays possède les siens : l’Angleterre a les Murray, l’Allemagne les Baedeker et la France les Joanne. Ils décrivent en détail les villes d’art et d’histoire et signalent ailleurs quelques merveilles de la nature, chutes d’eau, fontaines vauclusiennes, étroits défilés ou cimes enneigées.
B. Changement d’échelle et nouvelles pratiques
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23La révolution industrielle fait naître une nouvelle sociologie du tourisme : il n’est plus le fait de la seule aristocratie ; les notables et la nouvelle bourgeoisie industrielle et commerçante se l’approprient.
24Les transports se modernisent. Sur terre, on se déplaçait à pied ou en diligence. Le chemin de fer est moins cher, plus rapide et plus sûr. Il est accessible aux familles. Les classes moyennes découvrent le tourisme. Le chemin de fer fait jouir du paysage en continu ; le voyage n’est plus une pénitence à subir avant de découvrir les charmes du lieu visité. Il révèle le pays et le paysage. Avec les bains de mer, avec l’alpinisme puis avec les sports d’hiver, un tourisme de l’effort et de l’épanouissement physique (et du coup, moral) prend aussi naissance. L’intérêt pour les villes d’art et d’histoire s’élargit sous l’influence du romantisme qui découvre le patrimoine architectural et artistique médiéval. Le tourisme devient plus diffus, dans la mesure où les objets dignes d’être admirés se multiplient et sont présents à la campagne, dans les bourgs et dans des villes de toute taille. Avec la mode de l’orientalisme, le voyage de culture et d’agrément conquiert toutes les rives de la Méditerranée et le Moyen-Orient. Dans le même temps, le tourisme de séjour gagne la montagne et les littoraux et multiplie les stations dans des environnements qui les ignoraient.
25Comme le déplacement se fait en chemin de fer, le tourisme demeure surtout urbain. Comme il ne demande pas d’infrastructures autres qu’hôtelières, il ne suscite pas de réactions de rejet dès lors que les visiteurs font preuve de discrétion. Les premiers tour-opérateurs, à l’image de Thomas Cook vendent des réservations de transport et d’hôtellerie. Ils ne sont pas encore des concepteurs de vacances même s’ils s’allient aux compagnies ferroviaires ou maritimes pour vanter, par affiches, certaines destinations.
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III. Tourisme et modernité
27Un nouvel âge du tourisme se dessine dans les dernières années du XIXe siècle et s’affirme dans la première moitié du XXe siècle. Il est moderne par la nouvelle vision du monde sur laquelle il repose, par les moyens de transport qu’il met en œuvre et par la démocratisation de ses formes.
A. De nouveaux rapports à la nature
28Dans les voyages qu’il effectue entre 1863 et 1865, Taine (1897) est séduit par Marseille, son site et son dynamisme, mais trouve la Provence horrible. La description des Alpes du Sud que donne à la même époque Reclus est aussi tragique : un pays que ruinent l’érosion des sols et la dent des chèvres (Reclus, 1866) !
29Ces réactions étonnent. C’est que l’Occident n’a pas encore inventé la Méditerranée (Jourdain-Annequin et Claval, 2022) et n’y a pas découvert ses racines les plus profondes, celles de peuples fondus dans la nature et amoureux d’un soleil auquel ils offrent leurs corps. En peinture, la mutation s’effectue dans les années 1880, lorsque les impressionnistes et leurs successeurs quittent les ciels humides et changeants de l’Ile-de-France, de la Normandie ou de Pont-Aven pour les couleurs enflammées par le soleil d’Arles, de la Côte d’Azur ou de Collioure. Des groupuscules allemands commencent à pratiquer le naturisme sur les bords des lacs italiens.
30Au-delà de l’image classique du monde méditerranéen, c’est toute la civilisation occidentale qui est remise en cause. Nietzsche en instruit le procès philosophique. L’Océanie d’avant les missionnaires qu’imagine et invente Gauguin, échappait aux inhibitions qui frappent les pays civilisés. À travers elle, le peintre invite les Européens à s’ouvrir à d’autres cultures, à leurs modes de vie et aux paysages qu’elles ont modelés (Staszak, 2003).
31Les mutations de la fin du XIXe siècle et du début du XXe invitent les peuples d’Europe à s’immerger dans la nature. Finie l’époque où la Méditerranée n’était fréquentable qu’en hiver, lorsque le soleil y était tamisé. Finie l’époque où le bain de mer se pratiquait de préférence dans les eaux fraîches de l’Océan, de la Manche ou de la mer du Nord. C’est désormais vers les rivages de la Grande Bleue que l’on se précipite, ou vers ceux de la Caraïbe et des autres mers tropicale.
B. Une nouvelle curiosité pour l’Autre
32La curiosité du touriste se modifie : elle ne se limite plus aux temples, aux monuments et aux palais hérités des grandes époques du passé. Elle concerne les modes de vie présents, les logis et la manière de les occuper, les produits alimentaires consommés et la façon de les préparer, l’habillement et les mœurs. Le voyageur aime partager un temps les manières de faire de ceux qu’il visite : c’est pour lui un jeu que de changer de mode de vie. Il est fasciné par les façons d’être des sociétés qu’ils découvrent, par leurs mets et par leurs mœurs.
33Le tourisme s’inscrit ainsi dans une vision élargie de l’humanité, qui fait une large place aux cultures populaires, aux lieux et aux formes de la vie quotidienne. Il ne retient de leur dimension tragique que le côté spectaculaire – la corrida en Espagne. Il ne va pas jusqu’à prendre en compte les valeurs qui les structurent et leur donnent un sens.
C. Une quête d’espaces passés ou futurs
34La quête d’autres mondes qui pousse le touriste à se déplacer finit par épuiser les possibilités qu’offre notre planète. Les ailleurs géographiques qui enchantaient les générations de la fin du XIXe siècle et du début du XXe ne lui suffisent plus. Il est désormais en quête de mondes de rêve. Esquissé dès la fin du XIXe siècle, dans l’image que bâtit Gauguin de Tahiti ou des Marquises, le mouvement prend de l’ampleur au XXe siècle.
35Le Hobbit de John Tolkien ouvre la voie en 1937. Bien vite, les univers de rêve ne sont plus véhiculés seulement par des textes ou des tableaux. Ils le sont par le cinéma - plus spécialement, le dessin animé. Walt Disney comprend vite combien l’audience de ses productions gagnera à passer de Mickey, Minnie, Dingo et Pluto au répertoire des contes classiques. Le succès de Blanche Neige, sorti en 1937, le conforte dans ce choix. Lorsqu’au début des années 1950, il décide de diversifier ses activités et construit Disneyland à Anaheim, au Sud de Los Angeles, c’est l’univers féérique de ses films qu’il choisit comme décor. La science-fiction appuyée sur les derniers développements de la science est également au rendez-vous.
36Le tour-opérateur devient ainsi un fabricant de mondes de substitution. En ce domaine, Gérard Blitz fait date en lançant, en 1950, le Club Méditerranée. Ce projet propose un mode de vie où barrières sociales et hiérarchies sont bannies ; il fait ainsi une place à l’utopie, illusion que renforcent les formes choisies : celles de la Polynésie tels que les Européens la fantasment depuis Bougainville ou Gauguin.
IV. Du vélo au jumbo jet : la démocratisation du tourisme
37L’histoire du tourisme n’est pas simplement celle de l’élargissement dans l’espace puis dans le temps des ailleurs qu’il vise. C’est parallèlement celle de la place qu’il tient dans la société : il se démocratise d’abord, avant qu’une dialectique de massification/différenciation ne s’impose.
A. Nouvelles formes de mobilité et démocratisation du tourisme
38De la fin du XIXe siècle aux années 1950 et 1960, la démocratisation du tourisme ne cesse de progresser.
39Les soldats étaient les seuls à dormir sous la tente. L’engouement pour la nature va de pair avec l’invention du camping : on se déplace désormais avec son logis sur le dos ou dans les sacoches de son vélo.
40La bicyclette ouvre toutes les routes au voyageur : le tourisme irrigue la campagne. Une génération s’enivre de cette nouvelle liberté. L’automobile modifie l’échelle : au lieu de 30, 50 ou 100 km dans la journée, on en parcourt 200, 400 ou davantage. On n’hésite pas à passer ses vacances à 1000 km, parfois à 1500 ou 2000 de chez soi.
41Ce tourisme demande des supports nouveaux. Les guides changent de format : ce ne sont plus de gros volumes. Ceux qu’édite Michelin sont plats et peuvent se glisser dans la poche. Ils couvrent également les curiosités naturelles, les châteaux, jardins, monastères ou églises perdus dans la campagne, les petites villes et les grandes. Ils s’accompagnent de l’édition de cartes faciles à déplier et où les lieux et environnements à visiter se détachent au premier coup d’œil. L’étalement des aires touristiques se traduit ainsi dans les supports du tourisme.
42La tente peut être plus grande, le matériel de camping plus sophistiqué. On adjoint un jour une caravane à la voiture ; on lui substitue plus tard un camping-car. Le touriste est devenu un nomade. Il transhume, comme ces retraités qui passent la mauvaise saison dans le Sous au Maroc ou en Algarve et se retrouvent en France l’été.
43Les terrains de camping se multiplient. Ils s’équipent d’une piscine et d’installations sportives. De nouvelles formes de sociabilité populaire s’y développent. Le terrain de camping devient le but ultime du voyage. On y revient deux fois, dix fois, toute une vie. Au lieu d’y monter sa tente ou d’y remorquer sa caravane, on y loue un mobil-home. Il s’agit à nouveau d’un tourisme de station, mais dans une pseudo-ville qui garde quelque chose d’éphémère. Les services y sont simplifiés. Les contacts avec la population indigène y sont réduits au minimum. En quelques décennies, le tourisme ubiquiste qui naît des transports individuels débouche ainsi sur un nouvel avatar de la station – le camping…
44Le tourisme était né comme un marqueur d’excellence dans les sociétés d’Ancien Régime. Il s’ouvre à la bourgeoisie et aux classes moyennes au XIXe siècle. Il se démocratise au XXe. On fait de la loi des congés payés, en 1936, le point de départ du tourisme populaire ; elle la précipite, mais l’évolution était en route depuis le début du siècle.
B. Une nouvelle civilisation des loisirs
45L’allongement des congés payés et l’accès à la retraite de populations en bonne santé et disposant de revenus importants modifient les attitudes. On veut que le temps consacré au tourisme soit aussi riche, aussi dense et aussi varié que possible. Cela donne au tour-opérateur un rôle nouveau : il ne se contente plus d’assurer la logistique du transport et de l’hébergement. Il propose le thème du séjour et du voyage, multiplie les expériences que l’on pourra y faire et veille à ne pas laisser de temps mort. La volonté de donner plus de sens au loisir renforce le rôle des professionnels qui organisent et encadrent nombre des activités recherchées.
46Le rapport du visiteur aux autres change. Le touriste fait enfin de la vie des peuples visités un objectif majeur de ses déplacements. Le rapport à la nature se modifie également, comme en témoigne la place croissante des sports de glisse. Ceux-ci supposent généralement des équipements importants – télésièges, remonte-pentes et entretien quotidien des pistes pour les stations de ski, équipements spéciaux, personnel de sécurité pour le canyoning. Le surf ne nécessite qu’une combinaison et une planche, mais les spots vraiment intéressants sont rares et souvent lointains…
C. Tourisme de masse, tourisme de niche, recherche de la distinction et effets de mode
47La modernisation du tourisme qui débute dans les années 1950 naît en partie du changement d’échelle dû à l’avion : celui-ci étend le rayon des zones ouvertes au tourisme populaire : il était de 1000 ou 1500 km pour l’automobile ; il atteint maintenant 5000 ou 10000 km et va jusqu’en Nouvelle-Zélande, à l’autre bout du monde. Le Boeing 747, mis en service en 1969, charge plusieurs centaines de personnes. À l’arrivée, la majorité des passagers n’ont pas les moyens de louer une voiture. Ils se retrouvent donc dans un grand hôtel offrant des distractions variées dans des stations d’un nouveau type, car chaque établissement y est à lui seul un modèle réduit de ville touristique. D’autres suivent en autocar les itinéraires conçus et organisés par les tour-opérateurs, ou visitent les villes d’art et d’histoire ; leur ignorance de la langue locale les contraint de recourir à des voyagistes.
48La modernisation va de pair, chez certains, avec la volonté de pratiquer un tourisme plus intelligent. Deux familles de pratiques du tourisme se distinguent, celles du tourisme de masse et celles du tourisme de niche.
49Les grands tour-opérateurs proposent les séjours bien organisés à prix réduits du tourisme de masse : pour l’Andalousie, et au niveau de base, l’Andalousie se résumera à un séjour dans un hôtel de la Costa del Sol, avec piscine, sauna, soins corporels, bars et pistes de danse le soir. Pour un public plus curieux, c’est un itinéraire qui est offert : Séville, Cadix, Marbela, la Costa del Sol et Malaga, Grenade et l’Alhambra, puis Cordoue.
50À ce tourisme de masse s’oppose un tourisme de niche. Il vise ceux qui ne veulent pas mourir idiots et cherchent à se distinguer du lot commun. Le tour-opérateur exploite alors les curiosités variées de sa clientèle : il propose une visite de la Patagonie et de la Terre de Graham dans l’Antarctique à ceux qui sont curieux de formes glaciaires et de faune froide. Avant que l’insécurité ne gagne le Mali, il les amenait voir la falaise de Bandiagara et le pays Dogon. Il plonge ceux qui veulent comprendre le Brésil actuel dans une favela de Rio de Janeiro ou leur fait découvrir la forêt amazonienne. Dans ce type de déplacement, les visiteurs vont par petits groupes - mais la multiplication de ceux-ci peut conduire à la saturation. Les visites concernent des ensembles qu’il convient de protéger, tout comme il convient de ne pas fragiliser les populations. Les contacts qui se veulent égaux ne le sont jamais.
51Le tourisme de masse concentre les flux sur certains lieux et certains itinéraires. Le tourisme de niche est plus diffus. Les deux sont des phénomènes de mode : le premier la suit et permet de participer à ce qui est dans le vent, le second cherche à la devancer pour se distinguer de la masse. Mais sous l’une et l’autre forme, les jeux de mode ont tendance à concentrer les flux ; ils génèrent des surpressions en certains points – les dynamiques de la communication renforcent, en ce domaine, celles de la massification.
V. Le tourisme en procÈs
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53Le développement du tourisme s’est fait sans soulever beaucoup de résistances jusqu’à une époque récente. La situation est en train de changer. Les critiques qui lui sont adressées sont multiples : (i) elles naissent de ses succès, des encombrements qu’il crée et des nuisances qu’il entraîne pour les populations locales ; (ii) elles résultent de la prise de conscience de l’impact écologique d’une activité qui consomme de plus en plus d’espace et dont l’empreinte écologique est considérable ; (iii) elles proviennent d’un constat : le patrimoine visé n’est plus en mesure de recevoir les foules immenses d’aujourd’hui ; (iv) elles mettent en évidence les inégalités nouvelles qu’il fait apparaître ; (v) elles s’attaquent aux fondements même du tourisme, critiqué comme véhicule de la conception occidentale de l’existence.
A. De nouvelles formes d’encombrement
54L’explosion des fréquentations touristiques est impressionnante. Le nombre total d’arrivées enregistrées dans les différents pays du monde le souligne : 25 millions de mouvements en 1950, 1,5 milliard en 2019 : 60 fois plus en 70 ans.
55La croissance tient à l’évolution des technologies : à l’usage de la voiture pour les déplacements à courte et moyenne distance s’est ajouté celui de l’avion. L’essor résulte tout autant de l’élévation des niveaux de vie, qui a bénéficié à l’Amérique du Nord et à l’Europe, gagné le Japon dans les années 1950 et l’ensemble de l’Asie orientale à partir de 1980. Il caractérise aujourd’hui les pays émergents un peu partout dans le monde.
56L’évolution n’aurait pas été aussi rapide si les pays d’Extrême-Orient n’avaient pas importé, en même temps que les technologies européennes, ce trait de comportement jusque-là essentiellement occidental qu’est le tourisme. Cela tient sans doute à ce qu’il s’agit de pays dont l’unité est culturelle davantage que religieuse, si bien qu’ils ont pu faire des emprunts aux idéologies occidentales - et à leurs traductions comportementales, le tourisme en particulier - sans que cela remette en cause les fondements de leur civilisation. En même temps que l’idée de tourisme, ils ont fait leur la liste des lieux à visiter développée par les Européens et les Nord-Américains : ils se sont précipités vers les foyers culturels européens et américains et ont découvert les joies des bains de mer et le ski. La place que tiennent les hauts lieux de culture asiatique dans leurs déplacements demeure plus modeste, mais ne cesse d’augmenter.
57La croissance exponentielle des déplacements et la concentration des destinations dans certaines aires ou certaines villes conduisent à la saturation de nombre de sites naturels – les cordées font la queue pour accéder au Mont-Blanc. Nombre de villes un peu partout dans le monde se trouvent submergées. Dans celles où les touristes se mêlent aux populations locales, dans le monde méditerranéen en particulier, celles-ci ont le sentiment d’être dépossédées de leur environnement.
58Certaines des formes nouvelles du tourisme rendent plus sensible l’effet de saturation : c’est le cas du tourisme de croisière. À partir des années 1960, les progrès de la construction navale rendent possible la réalisation de bateaux géants capables d’embarquer des milliers de passagers avec des tirants assez faibles pour leur ouvrir beaucoup de ports. De véritables stations touristiques flottantes naissent ainsi : elles en ont les capacités hôtelières et l’extraordinaire variété de distractions embarquées – au point que nombre de passagers ne quittent pas le navire aux escales.
59Problème majeur : ces mastodontes ne sont pas à l’échelle des lieux où ils s’ancrent ; ils écrasent de leur masse les ports où ils font escale – on songe à Venise –, dépassent les capacités d’accueil de beaucoup de cités et provoquent la congestion de leurs artères centrales et de leurs curiosités.
B. L’impact écologique
60Les critiques du tourisme naissent aussi des préoccupations écologiques qu’avivent partout le dérèglement des saisons et le réchauffement climatique. L’explosion des destinations lointaines est-elle justifiée ? N’entraine-t-elle pas un gonflement inconsidéré des flux aériens ?
61Ces craintes sont sans doute exagérées : le transport aérien n’est pour l’instant responsable que de 2 % des rejets de gaz carbonique dans l’atmosphère. Mais à l’échelle locale ou régionale, les critiques sont souvent justifiées. La mode concentre les flux et sature certains lieux ; la multiplication des résidences secondaires contribue largement au mitage des paysages ; les emprises des terrains de jeux et de sports s’étendent démesurément.
62Les touristes consomment davantage que les populations sédentaires : ils ont besoin de plus d’espace. Dans les pays ensoleillés qu’ils fréquentent volontiers, ils ponctionnent souvent une part considérable de disponibilités en eau limitées. Est-il raisonnable de créer des links de golf aux gazons impeccables en plein désert ?
C. Un générateur d’inégalités
63La pression sur les ressources qui naît du tourisme génère de nouvelles formes de compétition. Elles ont de graves conséquences sociales. Le logement de tous ceux qui travaillent pour le tourisme est rendu difficile ou impossible par les prix qu’atteignent le foncier et l’immobilier. Dans nombre de stations touristiques françaises, les H.L.M. ont été implantées le plus loin possible des sites intéressants, à proximité souvent d’activités polluantes. Les pêcheurs ne peuvent plus se loger au bord de la mer. Cela suscite des ressentiments et fait naître des sentiments d’exclusion.
64Les systèmes économiques contemporains accroissent les inégalités. Le tourisme accentue cette évolution là où il tient une place importante. Dans les pays pauvres, les effets sont plus dramatiques : l’exclusion des espaces favorisés est plus marquée ; la ségrégation spatiale accuse les différences de revenus.
D. Un véhicule des conceptions occidentales
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66Les critiques du tourisme vont plus loin. Elles remettent en cause les valeurs sur lesquelles celui-ci repose. Il suppose en effet que durant une partie de leur temps, les gens prennent du recul vis-à-vis de leur vie quotidienne, interrompent leur travail, relâchent certains de leurs liens sociaux et se consacrent à leur mieux-être et à leur épanouissement. Il ne s’agit pas, comme dans beaucoup de sociétés traditionnelles, du mieux-être spirituel que l’on atteint en méditant, en se retirant au désert ou en effectuant un pèlerinage. Celui dont on est en quête est plus individuel, plus personnel : il vise à la plénitude physique, artistique et intellectuelle. Il introduit dans la vie de chacun des moments de plus grande liberté. Celle-ci sert à chacun à donner plus de sens à sa vie ici-bas.
67Le tourisme est une bonne chose pour ceux qui essaient de vivre pleinement leur existence terrestre. L’Occident a cantonné le domaine de l’au-delà à la sphère privée, ce qui y a permis l’épanouissement du tourisme. Les pays d’Extrême-Orient qui pratiquent depuis longtemps un certain pluralisme religieux l’ont adopté.
68Le tourisme est condamnable pour les systèmes de pensée dans lesquels prime l’au-delà. Ils connaissent un regain de faveur dans le monde actuel. Les idéologies nées de la modernité ne suffisent plus à répondre aux questions que se posent les gens dans les sociétés inquiètes qui sont les nôtres. Cela se traduit par un retour du religieux - ou plus précisément, par l’apparition de nouvelles formes de celui-ci. Ce que les gens attendent de ces expressions émergentes de la foi, c’est qu’elles les libèrent de leurs angoisses. Ils sont moins regardants sur l’authenticité de la Révélation, et davantage sur ce qu’elle leur promet. Pour eux, nul besoin de moments de rupture avec le quotidien : la foi ne joue son rôle que si elle informe tous les instants de la vie avec la même intensité. Pascal, le premier des grands fondamentalistes, condamnait déjà la distraction : nous n’avons pas le droit de nous évader de nous-même et d’oublier notre destin.
69Le tourisme est ainsi fustigé par les fondamentalismes parce qu’il éloigne les hommes de l’essentiel, les oriente vers une culture centrée sur l’homme et sur la société, et oublie le transcendant et le divin. C’est pour cela que les talibans (et leurs mentors saoudiens) détruisent les statues idolâtres du Bouddha à Bâmiyan en Afghanistan en février-mars 2001 et que l’État islamique rase les ruines de Palmyre en mai et juin 2015. Tout ce qui risque d’enfermer les hommes dans une culture aux racines terrestres doit disparaître.
70Le tourisme est donc condamné par l’islamisme radical. Il fait également l’objet d’attaques au sein du monde occidental. Elles sont motivées, on l’a vu, par des préoccupations écologiques et par un souci de justice sociale. Elles le sont par la prolifération de sectes qui séduisent davantage que ne le font les formes traditionnelles du christianisme. Elles le sont parallèlement par la radicalisation de certaines des idéologies occidentales : celles-ci exigent de ceux qui les acceptent une foi totale dans leurs principes : tout ce qui éloigne du militantisme, devenu le devoir central de l’adhérent, est condamnable.
Conclusion
71Les problèmes cohabitation entre tourisme et patrimoine dans l’espace urbain montrent que, pour la première fois, l’expansion des formes modernes de loisir se heurte à des limites. Elle remet en cause ses formes et, pour certains, ses fondements. Pour comprendre cette situation, il nous a paru utile de rappeler les principes sur lesquels s’est bâtie cette forme d’activité.
72Forme de mobilité développée par l’Occident depuis la Renaissance, le tourisme reflète les options alors retenues par la civilisation européenne. S’il est aujourd’hui critiqué, c’est à raison même de son succès. C’est aussi, parce qu’il est une expression de la modernité occidentale : une modernité remise en cause à la fois par les fondamentalismes religieux et par les formes radicalisées des idéologies du progrès et des philosophies de l’histoire (Claval, 2020).
73Le tourisme a jusqu’ici repoussé les limites qu’il rencontrait en élargissant la gamme des curiosités qui le motivaient, et en prospectant et ouvrant de nouveaux espaces. Pour satisfaire des clientèles aux imaginaires et aux goûts plus variés, il s’est mis à créer de toute pièce de nouveaux lieux pour satisfaire leurs besoins de rêve et d’évasion.
74Tout ceci n’évite pas les problèmes de sur-fréquentation : soumis aux engouements de la mode, les foules qui se pressent dans certains lieux en attirent d’autres, toujours plus nombreuses. Jusqu’à quel point peut-on aller en ce domaine ? L’afflux des visiteurs menace le patrimoine qui les attire. Ne peut-on créer des copies ? C’est ce que l’on a fait à Lascaux, que l’on vient de faire pour la grotte Chauvet en Ardèche. Mais les visiteurs se presseraient-ils vraiment pour voir une Venise II ou une Rome II ? Le problème des limites du tourisme ne peut-être éludé.
75La liberté de circuler, d’aller là où l’on veut quand on veut, est en cause. Le modèle même du tourisme, symbole d’un certain mode de vie occidental, révèle ses limites. Sont-elles dues simplement à l’explosion des déplacements ? Pas seulement. Proviennent-elles des dynamiques propres à la communication touristique et qui focalisent exagérément les flux ? En bonne partie.
76Le tourisme est-il, comme on l’a cru, extensible à l’ensemble de l’humanité ? Résistera-t-il à sa remise en cause par les fondamentalismes religieux ou les formes radicales que revêtent les nouvelles idéologies ?
BibliografÃÂa
Chadefaud, M. (1988). Aux Origines du tourisme dans les pays de l’Adour. Pau. Cahiers de l’Université de Pau. N° spécial.
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Claval, P. & Jourdain-Annequin, C. (2017), Building and diffusing the image of cultural heritage: Pausanias in Ancient Greece and the Voyages pittoresques et romantiques in 19th century France. Athens Journal of Mediterranean Studies. 3(3), 211-234.
Jourdain-Annequin, C. & Claval, P. (à paraître en 2022). L’Invention de la Méditerranée, Paris, CNRS-Éditions.
Plazuola, J. (1989). Le baron Taylor. Portrait d’un homme d’avenir. Paris, Fondation Taylor.
Reclus, E. (1866). Du sentiment de la nature dans les sociétés modernes. Revue des Deux Mondes, 63(1), 351-357, 63(2), 371-277.
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Para citar este artículo
Acerca de: Paul CLAVAL
Sorbonne Université, UPMC-UFR de Géographie et Aménagement, p.claval@wanadoo.fr