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Fin ou renouveau des villes et des territoires ?
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La ville et le territoire répondent traditionnellement à deux besoins majeurs des sociétés : maximiser contacts et échanges grâce à la densité et à la diversité des contingents humains ; contrôler des gisements stratégiques de ressources matérielles et symboliques. Or, pour certains chercheurs, villes et territoires seraient entrés dans une phase de déclin. L’article récuse ce point de vue. Si nombre de villes, débordées par la périurbanisation, ont perdu des habitants, la tendance s’inverse de nos jours. Si les territoires semblent mal résister à la mobilité croissante des populations, ils demeurent en réalité toujours solides, à condition qu’on les considère, au-delà de leur dimension politique, comme des systèmes d’action spatialisés, souvent en réseaux, et sous l’angle des territorialités vécues. Participant du nouveau régime de la métropolisation, villes et territoires constituent donc, plus que jamais, des mondes géographiques susceptibles de promouvoir les progrès de la démocratie, de l’équité, de la justice sociale et du développement durable.
Abstract
Traditionally, for societies, town and territory are an answer to two main needs: maximising contacts and exchanges thanks to the density and diversity of human contingents; controlling strategic deposits of material and symbolic resources. However, for some researchers, towns and territories would have entered a phase of decline. This paper challenges such a view. Though the population of numerous cities has declined because of suburbanisation, now the tendency has reversed. It seems to be hard for territories to resist the growing mobility of populations; however, on the condition of being considered not only as political spaces, but also as spatialised action systems – often within networks – and from the angle of lived territorialities, they remain steady. Towns and territories, therefore, partake of the new regime of metropolisation and are more than ever geographical worlds capable of promoting improvements in democracy, equity, social justice, and sustainable development.
Table of content
Introduction
1Les villes et les territoires constituent deux objets classiques de la science géographique, laquelle les considère tant du point de vue de leur situation dans l’espace que de leurs formes matérielles, de leurs symboliques sociales et de leurs fonctions. À vrai dire, ces deux entités génériques entretiennent d’étroites connivences sémantiques, voire certaines similitudes aussi bien formelles que conceptuelles. Elles entrent fréquemment en interaction, quand elles ne se superposent pas jusqu’à se confondre.
2D’une part, toute ville se définit par une position territoriale particulière au sein d’organisations géographiques qui la dépassent et qui l’englobent. Cette situation lui attribue une personnalité spécifique. Celle-ci se renforce, en général, par un processus interne et collectif d’auto-personnification qui confère à chaque cité une identité territoriale. Saunier (1995) montre ainsi de quelle façon, à Lyon, à partir des années 1830-1848, une personnification de la ville lui a octroyé un certain « esprit », une sorte de tempérament (attributs habituels d’une personne humaine). « L’esprit lyonnais », construction d’érudits, d’écrivains et de politiciens appartenant à la bourgeoisie locale, se définissait dans les textes de l’époque comme un syncrétisme des comportements supposés du Français du Nord et du Sud. Cette élaboration collective mobilisait aussi le mythe du canut : idéal-type du tisserand d’antan, disparu au début du XIXe siècle. Parangon de vertu, le canut récupéré par la bourgeoisie lyonnaise, symbolisait l’ardeur au travail, la curiosité intellectuelle, l’habileté technique, le sens de la famille, autant de qualités devenues, dans leur imaginaire collectif, caractéristiques des Lyonnais.
3D’autre part et inversement, nombre de villes condensent l’identité de territoires plus vastes qu’elles contrôlent. Alexandrie symbolisait, trois siècles avant J.-C., une Égypte hellénisée qui se fondait dans l’image de la ville. À l’heure actuelle, Paris joue de la même façon ce rôle de « lieu attribut » (Debarbieux, 1995) pour la France entière ; et Bruxelles pour la Belgique comme pour l’Union Européenne.
4Si toute ville s’inscrit à grande échelle dans une hiérarchie de territoires, ceux des États-nations, des régions, des pays et des aires métropolitaines auxquels elle appartient, elle en abrite également d’innombrables : quartiers, centres, banlieues, sans parler d’autres territoires vécus et sensibles, plus indécis.
5C’est cependant dans l’idée du politique que cette convergence réciproque de la ville et du territoire s’affirme avec le plus de force. Il faut entendre par « politique » l’organisation et la gestion, le gouvernement forcément territorialisé de groupes sociaux formant la cité : la polis. Or, depuis l’antiquité, la polis, ou civitas latine, n’est-elle pas, par excellence, le territoire du politique ? De fait, étymologiquement, les deux termes désignent clairement la ville en tant que corps politique, planté dans un territoire bien délimité, clos par des murs ; à l’image de ceux qui entouraient Athènes, Le Pirée et la route les reliant, au Ve siècle avant notre ère. Or, ce qui caractérise de nos jours ces deux mondes entrelacés de la ville et du territoire, c’est, pour nombre de chercheurs, la conviction qu’il s’agit de formes spatiales révolues. Dès les années 1990, des auteurs aussi éminents que Françoise Choay (1994) et Bertrand Badie (1995) ne proclamaient-ils pas, l’une, la « fin des villes », « la mort des villes et le règne de l’urbain », l’autre, la « fin des territoires » confrontés à leur irrémédiable « aporie » (Lévy, 1993) ?
6Je crois, au contraire, que dans les configurations très contemporaines des espaces urbains, marquées par le double phénomène physique de la périurbanisation et de la métropolisation, villes et territoires gardent toutes leurs capacités d’organisation de l’espace géographique. À ce titre, la territorialisation et les centralités citadines restent d’actualité et sont même revendiquées lorsqu’il leur advient de défaillir. D’actualité d’abord, parce que, quelles que soient les perspectives et les chances de l’avènement d’une Generic City évoquée par Rem Koolhas, les métropoles naissantes ou parvenues à maturité, affrontées aux enjeux de leur concurrence, ont besoin de se doter d’une identité originale et flatteuse, qui les distingue et les valorise. Afin d’y parvenir, il leur faut se forger une personnalité propre, autour d’une image de ville au patrimoine prestigieux, harmonisant diversité et densité humaines, offrant des aménités de tous ordres : cadres de vie agréables ; transports urbains commodes et rapides ; lieux, activités et événements culturels remarquables ; vie sportive et opportunités variées de loisirs ; ressources économiques, productives, créatives, novatrices et communicationnelles… Si la métropole (ou métapole de François Ascher -1995-) se révèle le creuset quasi idéal de tant de vertus, sa territorialisation paraît l’une des conditions de son fonctionnement optimal. Ferrier (2013) estimait avec raison que la métropolisation désigne le stade actuel de la territorialisation des régions du monde, parcourues par les logiques implacables du capitalisme libéral et de la mondialisation. De fait, les agglomérations urbaines de tous types revendiquent la reconnaissance d’un territoire politique taillé à leur échelle, afin d’améliorer leur gestion, leur aménagement et leur développement durable, leur démocratie représentative et participative.
7C’est donc plus de la complexité des villes et des territoires que de leur déclin que je vais maintenant traiter. Je m’attacherai, surtout, aux villes des pays riches du Nord, et particulièrement de l’Europe, même si mes propos valent aussi pour la plupart des agglomérations de la planète. Auparavant, je définirai ces deux objets géographiques (ville et territoire). Je soulignerai leur indéniable pérennité et dynamisme, puis j’évoquerai la crise qui les frappe et peut créer l’illusion de leur effacement, avant de rappeler, en conclusion, les principaux traits de leur profonde utilité, voire de leur nécessité sociale, mais aussi les conditions de leur survie.
I. Villes et territoires, des constructions historiques, à peu près universelles
8Villes et territoires constituent deux réalités sociogéographiques construites dans la longue durée, entrelacées et complémentaires, souvent superposées.
9Pas plus que de ville, il n’existe pas de territoire figé. Chalas (2000) note que la ville se transforme en permanence, au fil du temps, tant dans sa forme (paysages, esthétique) que sur le fond (structures, fonctions, organisation, populations). Si le territoire connaît de semblables mutations, il affiche peut-être plus de rigidité, surtout dans sa dimension politique, la plus ancienne et la plus stricte.
A. Redéfinir la ville et l’espace urbain
10Les mots et leur étymologie en témoignent : la « ville », « l’urbain », la polis, ces termes dérivent tous de trois racines indo-européennes, bien antérieures aux langues des antiquités gréco-latines. La racine weik (1) a donné ville (de la villa agricole des latins à l’agglomération), vic (village et ville) et voisin. Avec sa variante haim (ham, home), elle se retrouve dans maison et hameau. Dans tous les cas, elle évoque, à différentes échelles, une idée sociale de rassemblement. La racine pele (2) renvoie à une idée plus politique, celle du pieu (comme dans Pau) et de la palissade, c’est-à-dire celle de la limite et du mur qui circonscrit et ferme l’espace approprié, contrôlé. La même racine et son sens politique ressortent aussi dans la polis grecque et dans l’idéogramme chinois cheng (le même pour désigner le mur, la limite et la ville). Elle est également présente en sanscrit, déclinée en pur dans Jamshedpur, Singapour, etc. La racine bherg (3) revêt quant à elle le sens topographique et paysager d’un établissement humain sur une hauteur. Elle transparaît dans les racines plus récentes de burg (bourg, bourgeois, ville haute en langue germanique), de don, ton, town (anglais), de grad et gorod (slave), d’urbs (latin) qui a fourni tous les dérivés d’urbain.
11Au final, l’association des trois racines esquisse une définition assez complète et plutôt satisfaisante de la ville, sinon de l’urbain. (3) La ville est une forme, un paysage, une topographie fondée sur le principe de la densification humaine. (1) La ville est une société, un regroupement, un creuset, une accumulation d’êtres humains, de productions et de richesses, d’informations, etc. (2) La ville est un espace politique (forme première du territoire) instaurant l’organisation, la gestion et la protection des individus. En tant que structure, elle génère une identité et encourage, en le réglementant, un « vivre-ensemble ».
12L’essentiel de la production scientifique contemporaine ne dit pas autre chose. Géographes, architectes et urbanistes, sociologues et historiens insistent tous sur le fait que la ville doit être considérée comme « une organisation spatiale ouverte, destinée à maximiser l’interaction sociale » (Claval, 1981). D’autres mettent plutôt l’accent sur sa fonction systémique (Moriconi-Ebrard, 1993) et, bien sûr, politique (Louiset, 2011). Mais la ville, c’est avant tout un espace sensible, vécu de manière originale. C’est un paysage particulier fait d’habitations et de bâtiments à la fois contigus et continus, de réseaux de circulation et d’infrastructures les plus diverses, visibles ou non.
13Les deux indicateurs de la contiguïté et de la continuité étant souvent difficiles à discerner sur le terrain, les pouvoirs avides de normes, comme les chercheurs et experts épris de précision, ont fait appel, pour y voir plus clair, à la mesure et aux statistiques. À partir de ces données sont arrêtés des seuils toujours contestables. Ainsi en est-il, en France, de la définition de la ville, soit une agglomération d’au moins 2000 habitants installés dans un tissu bâti dont les unités d’habitation, de production ou de service, ne s’écartent pas de plus de 200 mètres les unes des autres. Pour différencier la ville proprement dite et les espaces qualifiés d’urbains au tissu plus lâche, plusieurs méthodes statistiques ont été utilisées. La dernière en date distingue des aires urbaines autour des centres agglomérés de plus de 2000 habitants qui abritent plus de 1500 emplois et polarisent en leur faveur les déplacements domicile-travail. Ces aires sont constituées par les unités urbaines et leurs communes environnantes dont plus de 40 % des actifs-résidents vont travailler dans les premières, ou dans leurs communes directement affiliées par cette circulation de travailleurs. Notons que si la France des villes stricto-sensu (communes et groupements de communes de plus de 2000 habitants) agrège, en 2018, 80 % de la population française (contre 70 % en 1968), les aires urbaines en rassemblent plus de 95 %.
14À l’image du cas de la France, très représentatif de la situation des anciens pays industrialisés et très urbanisés, l’urbanisation du monde progresse, y compris dans ses contrées de tradition rurale dominante ou écrasante : en Asie où la Chine compterait près d’un milliard de citadins et l’Inde plus de 300 millions, mais aussi en Afrique. Désormais, plus de la moitié de l’humanité (53 %) vit dans des espaces urbanisés. Mais qu’en est-il des villes proprement dites : ces anciens nœuds et noyaux concentrés de centralité citadine ?
B. Contredisant les prophètes de la fin des villes, la plupart des statistiques montrent qu’elles résistent au déferlement du ruissellement urbain
15Partout dans le monde, au Sud comme au Nord, à l’exception pour celui-ci de quelques régions manufacturières en crise, la population des aires urbaines et métropolitaines progresse. Certes, entre 1950 et 1980/2000, les villes-centres des nouvelles nappes d’urbanisation des anciens pays industrialisés ont perdu bon nombre de leurs habitants du fait de l’exurbanisation. Cependant, depuis l’extrême fin du XXe siècle, la plupart de ces cités, naguère en déclin, regagnent leur population perdue, au point de retrouver les meilleurs niveaux atteints auparavant. En France, si ce n’est pas encore le cas de Paris ou de Nice, malgré une reprise enregistrée depuis le « creux » observé en 1999, c’est vrai pour Marseille (revenue à sa population de 1980), pour Lyon (revenue à celle de 1975), pour Bordeaux et Lille (retour à la situation de 1968). Mais le phénomène est encore plus flagrant pour Toulouse, Nantes, Montpellier, Strasbourg ou Rennes qui parviennent, de nos jours, à des chiffres record de peuplement. En revanche, sur le même territoire français, les villes-centres des agglomérations de taille moyenne (villes de 30 000 à 150 000 habitants, pour des aires urbaines de 50 000 à 200 000) stagnent en dehors des zones touristiques, quand leur population ne s’érode pas. Dans la catégorie inférieure des petites villes de moins de 30 000 âmes, et ceci souvent depuis plusieurs décennies, les effectifs reculent, de même que les activités et les services. En France, on peut donc parler d’une crise des petites villes, voire, à un moindre degré, des villes moyennes, mais en aucun cas des plus grandes, entrées, pour la plupart, dans l’ère de la métropolisation. En effet, ce sont les villes situées à la périphérie ou à l’extérieur des grandes aires métropolitaines qui enregistrent les difficultés les plus cinglantes. Au Japon, ce sont les franges extérieures, non citadines, des grandes aires urbaines qui perdent des habitants. À Osaka, ce phénomène touche la grande banlieue située entre 10 et 40 km d’un centre ville où de nouveaux bâtiments résidentiels attirent des populations de jeunes familles et de retraités nantis. Donc, là aussi, les villes situées au cœur des aires métropolitaines prospèrent. L’on fait des constats similaires pour la plupart des pays d’Europe : Belgique, Pays-Bas, pays du Nord et Méditerranéens. Dans le cas de la République Fédérale d’Allemagne, les seuls ensembles géographiques de villes qui échappent à cette embellie figurent dans les régions les plus frappées par la désindustrialisation : certains secteurs de la Ruhr ; espaces de vieilles industries de l’ex-RDA.
16En Amérique du Nord, notamment aux États-Unis, la reprise est flagrante en dehors de quelques foyers sinistrés de la Rust belt. Le cas de San Francisco, étudié par Lehman-Frisch (2018) est, à ce titre, éloquent. SF compte, en 2018, 836 000 habitants dans une aire métropolitaine de plus de 8 millions. Entre 1950 et 1980, la cité avait perdu 12 % de ses effectifs sous l’effet de la suburbanisation. Depuis 1980, la tendance s’inverse. Dès 2000, SF a récupéré sa population de 1950 et, depuis 2010, l’on assiste à une étonnante poussée de sa croissance. Celle-ci concerne bien sûr la démographie, mais elle se traduit aussi par un bouillonnement d’activités créatives nouvelles et par une forte gentrification des quartiers. Cette renaissance de SF accompagne la métropolisation des rives occidentales de sa Baie : alors que la ville-centre regroupait, en 1950, 29 % des résidants des 12 comtés de sa Combined Statistical Area, elle n’en abrite plus, aujourd’hui, que 11 %. Plusieurs mouvements de populations expliquent cette situation. D’une part, l’on enregistre un important reflux des banlieues vers la ville où se concentrent de très nombreux emplois, surtout tertiaires. Les salariés de ce secteur, soucieux d’une vie meilleure et d’un plus grand respect de l’environnement, recherchent une domiciliation plus proche de leur lieu de travail. D’autre part, l’arrivée de très nombreux étrangers s’installant dans une ville-centre de plus en plus cosmopolite augmente sa densité et sa diversité humaine. Les minorités ethniques y sont devenues, numériquement, majoritaires. Dans un contexte de politique municipale très progressiste, les LGTB occupent des quartiers entiers. Signe de cet esprit d’ouverture, aux élections présidentielles de 2016, 84 % des électeurs de SF ont voté pour Hillary Clinton, contre 9 % seulement pour Donald Trump.
17Quand on sait qu’un revirement semblable, s’effectuant au bénéfice des villes-centres, voire des edge-cities (nouveaux-centres) de leurs aires métropolitaines, concerne nombre d’autres agglomérations américaines, de Oakland, proche de SF, à New York, Boston, ainsi qu’aux villes de la Sun Belt, l’on peut difficilement entendre l’argumentaire erroné d’une thèse de la « fin des villes » ; pas plus que l’on ne saurait accepter celle de la « fin des territoires ».
C. Un territoire incontournable, mais polymorphe
18Depuis plus de trois décennies, le terme « territoire » s’installe dans notre langage le plus quotidien. C’est que celui-ci ne le réserve plus aux seuls périmètres de l’espace légitime des États-nations et de leurs circonscriptions administratives. Certes, c’est d’abord dans les cercles de la vie publique, au creux du système politique et de ses spatialisations que le mot comme la chose ont connu un étonnant succès. Faveur obtenue au rythme des décentralisations politico-administratives, survenues un peu partout dans le monde depuis un demi-siècle, et des recompositions territoriales qu’elles ont suscitées. Cependant, au cours de ces dernières années, si le pouvoir politique et administratif n’a cessé de se territorialiser, la popularité du vocable ne s’est pas circonscrite à son domaine. En effet, les mondes économiques, associatifs, ceux des médias, de la culture, du marketing, de l’aménagement et du développement, tous ces registres de la vie sociale n’ont cessé de se territorialiser et de le proclamer. Était-ce, comme il fut souvent affirmé, en vue de se doter d’une meilleure organisation tenant désormais compte des données spatiales ? S’agissait-il, pour toutes ces institutions, de consolider leur identification à des fins d’usage interne (meilleure mobilisation des personnels salariés et autres ressources localisées) ou afin de se signaler sur les marchés, auprès de clientèles devenues plus sensibles aux appartenances territoriales ? Les deux raisons ont sans doute joué. Certains ont même perçu dans cette tendance une sorte de réplique identitaire à la mondialisation et à ses effets destructeurs. D’autres ont cru y discerner la manifestation de la fin du fordisme et l’avènement d’un post-fordisme plus territorial. Cependant, alors que le mot territoire envahit les discours politiques, économiques et sociaux, la recherche en sciences sociales, particulièrement en géographie, se méfie de ce terme. En fait, il me semble que l’essentiel du malaise provient d’une confusion majeure. Celle-ci tient au fait qu’on assimile trop souvent le territoire à sa seule composante et dimension politique. Certes, le territoire est, d’abord, un principe politique de découpage de l’espace visant à son partage, à son appropriation et à son contrôle par des groupes sociaux engagés dans un processus collectif d’identification. Groupes qui se donnent, dans ce but, une représentation singulière d’eux-mêmes et de leur histoire. À ce titre, le territoire s’impose comme champ de ressources matérielles et de symboles (sémiosphère), fournissant les jalons nécessaires à l’édification d’une mémoire collective.
19Afin de mettre un terme à ce malentendu négationniste à propos des territoires, il convient de préciser que trois dynamiques les engendrent : politique et idéologique, socioéconomique, imaginaire (ordre du vécu). Finalement, ce sont la complexité et la polysémie du concept qui ont fait son succès.
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(A) Le territoire politique repose sur des fondements quasi-éthologiques. Il s’agit d’une aire exclusive de mobilisation des ressources matérielles et symboliques que se réserve un groupe ou une formation sociale. Espace de contrôle et d’exercice éventuel de la violence légale, il fonctionne surtout comme un outil de régulation des rapports de force à l’adresse d’une société localisée. Dans cette optique, le territoire se révèle une médiation précieuse, un contexte essentiel pour l’exercice du gouvernement et de la gouvernance.
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(B) Le territoire est aussi, sans recouvrement absolu ni automatique avec l’acception précédente, une combinaison singulière de systèmes d’action spatialisés (TSA). Ces TSA (territoire système d’action) résultent de conventions implicites nouées entre différents groupes d’acteurs et d’actants. Ils donnent aussi parfois naissance à un contrat social plus explicite : cas des aires d’AOC et d’IGP, des clusters, SPL (système productif localisé), districts marshalliens et autres technopoles ...
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(C) Reste que le territoire est d’abord un rapport vécu. Il se cristallise, pour chaque être humain, au gré de sa vie de réseau et de ses mobilités, mais aussi en fonction des représentations et des imaginaires qui canalisent ses pratiques. Devenu de la sorte plus subjectif, le territoire se démultiplie, tant pour le même individu (effet polytopique) que d’un individu à l’autre, avec tout de même, dans cette dernière occurrence, des similitudes et des partages de représentations.
20Entre (A), (B) et (C), il existe des tensions qui produisent la territorialité. Cette dernière, propre à chaque individu, révèle des similitudes d’un individu à l’autre, en un même lieu ou territoire. La genèse de la territorialité, conçue comme un jeu de pratiques, convoque deux niveaux de la réalité sociospatiale. D’une part, le contexte, celui des enjeux et des déterminations collectives, soit le pôle des contingences que rencontre l’action individuelle et collective située. D’autre part, le tissu des motivations et des stratégies individuelles. Ces dernières, même si elles relèvent aussi d’une gestation sociale, d’un effet de lieu ou de territoire, accordent une large place à l’autonomie, à la compétence de l’acteur. Finalement, le comportement de chacun, dans la société et dans l’espace, obéit à ces deux domaines d’influences, à ces deux énergies.
21Considérés sous l’angle de cette complexité, les territoires, loin de disparaître, prolifèrent de toutes parts, y compris et surtout dans les villes. Avant de fournir quelques unes des clés de ce double succès géographique des villes et des territoires, il importe de souligner les éléments de crise qui expliquent le rejet, le déni ou simplement les doutes émis parfois quant à leur survie.
II. À propos de la crise des villes et des territoires
22Crise des villes, crise des territoires. Après avoir pointé leurs manifestations géographiques majeures et les principales causes de ces perturbations et dysfonctionnements, j’évoquerai le cumul de leurs effets tel qu’on peut l’identifier à travers le phénomène contemporain de la métropolisation.
A. Incertitudes des villes et des territoires
23Pour la ville, l’incertitude ontologique contemporaine provient de son dépassement par l’urbain, soit par une forme géographique qui sacrifie la densité résidentielle, son paysage et ses avantages sociaux, au profit d’un éparpillement des installations humaines dans un simulacre de nature fantasmée. Le caractère urbain d’une telle situation tient aux modes de vie adoptés (ceux de la ville), ainsi qu’à la dépendance des habitants à l’égard de ressources et de services exigeant pour leur livraison de fortes concentrations de moyens : hommes, biens matériels, capitaux, compétences et savoirs, etc. La ville sans la ville, c’est en somme la contradiction qui préside à l’étalement urbain, également nommé périurbanisation, voire rurbanisation.
24Les formes comme les raisons de ce mouvement centrifuge de dispersion résidentielle à distance des villes, au-delà de leurs banlieues, présentent une grande variété. Dans les villes en pleine expansion des pays du Sud, la périurbanisation, souvent fort dense, s’est faite surtout par regroupement périphérique des flux d’un exode rural intense. Elle n’évite pas, quartiers favorisés mis à part, une densification accrue des centres. Dans celles des pays du Nord, l’exurbanisation des citadins et banlieusards fut le moteur principal de ce qui ressemble plus à un exode urbain. Ses causes tinrent à plusieurs facteurs bien connus : l’engouement des nouvelles classes moyennes pour le pavillon individuel et un retour à la campagne prise pour la nature ; l’abaissement des coûts fonciers et de la construction selon un gradient centre (encombré) - périphérie (espaces libres) ; l’engorgement des villes noyées par l’automobile et, en retour, les facilités de déplacement autorisées par l’usage d’un véhicule personnel …
25Cette désaffection pour les villes dont on a évoqué l’intensité durant la période 1950-1980/2000, a eu des effets délétères, particulièrement pour les plus petites d’entre elles. La fuite des habitants et des activités, le recul mécanique des clientèles des commerces et des services, aggravé par le développement des grandes surfaces et zones d’activités périphériques, l’appauvrissement des finances publiques qui en a découlé, ont privé nombre de cités de capacités efficaces d’intervention et de réinvestissement. La fragmentation territoriale des agglomérations et les jeux de concurrence s’opérant entre leurs composantes sont allés dans le même sens. En effet, notamment en France, la pulvérisation des territoires politico-administratifs (communes) fut un facteur aggravant de la diffusion urbaine, chaque entité communale ou presque jouant sa carte de développement, sans se préoccuper des autres. Sans compter que cet émiettement des territoires politiques a encouragé celui des territoires de vie et vécus. Il en a résulté un processus de désagrégation sociale par effacement des cultures urbaines et de leurs avantages de proximité. Or, que se passa-t-il rapidement dans ces périphéries urbaines ? Après l’euphorie des installations, le désenchantement gagna vite ces « néos » éprouvant un syndrome d’exil. Il faut dire que la carence des services et des moyens de déplacement collectif, l’éloignement des aménités de la ville, les « capabilités » et possibilités d’accès aux ressources des communs amoindries, ont vite généré, dans ces lointains, un sentiment général d’abandon social, à la fois économique (crise et chômage aidant) et politique (manque de moyens de collectivités trop exiguës). Dès lors, un épineux problème de justice ou, plutôt, d’injustice sociospatiale se pose (cf. le mouvement des « gilets jaunes » dans la France de 2019). Au fil des années, le gaspillage engendré par la périurbanisation et le mitage des espaces qu’elle provoque, que ce soit en énergie et en temps de transport, en infrastructures et en allocations de financement, apparaît dans toute son ampleur. Il s’accompagne de problèmes écologiques tout aussi redoutables : artificialisation des sols, émissions de carbone augmentant l’effet de serre, etc.
26Du côté des territoires proprement dits, le débat sur leur fin, voire sur leur nocivité économique et sociale, repose sur plusieurs arguments. D’une part, leur inévitable effet frontière créerait d’innombrables artifices, nuisibles à l’aménagement des espaces comme à la constitution d’entités cohérentes de gestion et de vie des citoyens. D’autre part, ils dresseraient un obstacle inutile à la libre circulation des flux humains et matériels qui fournissent, de nos jours, les ressorts essentiels de la vie collective. Bref, les territoires revêtiraient d’autant moins de sens que nos contemporains se déplacent beaucoup, de l’un à l’autre, habitent souvent plusieurs d’entre eux (habitation polytopique) et ne se reconnaissent guère dans un tel paysage géographique.
27Ce raisonnement n’est pas faux, mais ne concerne que la facette politique du complexe territorial. J’ai exposé, plus haut, ce que j’appelle les trois dimensions du territoire : espace politico-idéologique, système d’action spatialisé, espace vécu. Pour saisir toute la fécondité du concept territorial et comprendre sa fonction structurelle des rapports sociaux à l’espace, il faut prendre ensemble ces trois dimensions. C’est alors que se révèlent les décalages situés à la source du malentendu territorial. Les territoires politico-administratifs paraissent figés en regard de ceux que dessinent les systèmes d’action de tous ordres : économiques, sociaux, culturels, sportifs, etc. Les uns et les autres affichent de sérieux décalages avec ces territoires de l’imaginaire et du vécu que partagent à la marge les habitants d’un lieu ou d’un ensemble de lieux voisins. J’ai appelé territorialité les tensions qui naissent des contradictions résultant de la confrontation de ces trois registres territoriaux. L’aménagement des territoires doit tenir compte de ces tensions et veiller par de nouvelles méthodes, passant notamment par la démocratie participative et une interterritorialité (Vanier, 2015) active, à les réduire. La tâche n’est pas mince, d’autant que tous les éléments de crise propres aux villes, à l’urbain et aux territoires, tendent à se cumuler dans la nouvelle figure standard d’organisation de l’espace que dessinent désormais les métropoles.
B. Métropoles et territoires, une superposition ambiguë
28La forme postfordiste et réticulaire de l’évolution du mode de production capitaliste, le triomphe planétaire du néolibéralisme ont modifié, à la fin du XXe siècle, l’antique fonction métropolitaine. L’ère d’une (néo)métropolisation généralisée et universelle, échappant aux vieux modèle mercantiliste et colonial, ne naquit, de fait, qu’au cours du second XXe siècle. Elle concerne des agglomérations de bonne taille, parfois multimillionnaires, repérables à partir d’un seuil minimal de quelques centaines de milliers d’habitants. Vivant au rythme du capitalisme mondialisé, elles répandent son souffle néolibéral sur toute la planète. Il n’est plus guère de lieu du monde, même le plus reculé, qui n’échappe à l’influence et à l’autorité de ces métropoles. Mais la métropolisation, c’est aussi une capacité d’intégration d’organismes urbains dispersés sur la terre, constituant à l’échelle mondiale, par leurs liens, matériels ou non, une véritable toile, un tissage d’interactions s’effectuant en temps réel, dans la simultanéité, grâce aux NTIC.
29La métropolisation qui se déroule selon les processus spatiaux de la diffusion urbaine donne, sur des étendues toujours plus vastes, des formes d’occupation du sol plus diluées et plus ruralisées que celles de la ville compacte d’antan. Vers elles convergent les nécessaires mobilités quotidiennes liées au travail, à la vie sociale, ou à la consommation et aux besoins de services. Ce qui différencie également la métropolisation de l’urbanisation ordinaire, c’est une trame supplémentaire d’infrastructures permettant des liaisons aisées à toutes les échelles : du local, entre les entités constitutives de chaque aire métropolitaine (voies rapides et transports en commun métropolitains), et du continental (nœuds autoroutiers et ferroviaires à grande vitesse) jusqu’à l’intercontinental (hubs aériens et maritimes).
30Dans ces conditions, les métropoles assument et propagent des fonctions essentielles, politiques, économiques, culturelles, qui tendent à ne plus former qu’un système globalisé, mollement remis en cause par les résiliences territoriales, parfois non négligeables, des États-nations. Les métropoles du monde riche occidental, à un moindre degré celles de l’Asie et de la Russie, concentrent les principales structures de commandement économique de la planète, en particulier les sièges des banques, des grandes entreprises multinationales et des organismes internationaux. Elles fixent les bureaux des sociétés financières et des firmes de services de niveau mondial. Ces métropoles participent donc de l’ère de la mondialisation/globalisation. Elles témoignent du triomphe des techniques de l’information et de la communication, de l’emprise du secteur des services sur toute l’économie, de la montée en puissance des moyens de transport rapides, de la mobilité généralisée… Elles tirent parti et profit d’un temps contemporain où les connexités topologiques, celles de flux parcourant des réseaux interurbains de systèmes de transports/communications rapides, détrônent en grande partie les continuités et les contiguïtés topographiques.
31Il est certain que la métropolisation remet en question la logique classique des villes : pourquoi concentrer hommes et biens en un point, alors que tout est disponible, à distance, en temps record ; voire immédiatement pour ce qui concerne l’information et la finance ? Ainsi, la métropolisation semble abolir la ville comme le territoire, compris en tant que structures pérennes du rapport des sociétés à l’espace géographique. Pourtant, afin de produire des biens, des services et de la culture, de créer, d’innover, ou simplement de faire société, les humains ont besoin de contact et de proximité, d’échanges concrets ; c’est ce qui sauve la ville. Or, celle-ci aspire au territoire pour se doter d’une personnalité identitaire, essentielle à sa survie. Et puis, à toutes les échelles, de celle du quartier à celle de la métropole, les territoires fonctionnent comme de véritables plateformes de gestion des lieux et des citadins, des urbains. Le recours à ces espaces sociaux s’avère un gage de démocratie (appropriation et identification/responsabilisation des acteurs), de cohérence planificatrice et d’efficacité aménagiste.
32Précisons encore que les systèmes métropolitains constituent aussi d’implacables machines à trier et à canaliser les individus comme les groupes humains. En fonction des lois économiques et des dispositifs politiques qui les gouvernent, ils distribuent et répartissent hommes et femmes selon les ressources dont ils disposent, parfois aussi en fonction de leurs appartenances ethniques et culturelles. Même sans qu’une coercition délibérée soit exercée par des appareils ou des agents ouvertement répressifs, la métropolisation assigne à résidence les groupes d’individus selon les services qu’ils rendent aux entreprises mondialisées du capitalisme libéral et aux appareils d’État qui leur facilitent la tâche : aux plus performants les meilleurs territoires métropolitains, aux moins utiles les secteurs dévalorisés, dégradés, ou carrément pollués et exposés aux risques tant industriels qu’environnementaux. Ce tri drastique, plus flagrant encore au Sud qu’au Nord, confère une ampleur accrue aux phénomènes anciens de ségrégation/segmentation sociale et spatiale. D’une part, elle multiplie des bunkers de nantis : gated communities et autres aires d’habitat fermées. D’autre part, elle isole des ghettos défavorisés, plus ou moins abandonnés, selon les pays, par la puissance publique. Ici se lisent les associations ville/métropole/territoire les plus créatrices d’injustices sociospatiales.
Conclusion
33Parvenu au terme de cette réflexion, il me faut insister sur le fait que villes et territoires s’affirment toujours comme des structures indispensables à la vie sociale dans sa dimension géographique.
34Une remarque de portée historique générale incite, dans un premier temps, à relever les concomitances et les corrélations qui associent l’émergence des villes, dès le IVe millénaire avant notre ère, et celle, peut-être plus ancienne encore, des territoires (dès le néolithique pour leur forme la plus primitive ?), aux grandes étapes de l’évolution humaine. Aujourd’hui, par-delà le discrédit qui frappe, pêle-mêle, urbanisation, métropolisation, ville et territoire, force est de constater que le binôme ville/territoire constitue un facteur positif pour le développement humain et l’amélioration du bien-être social. Ceci pour six raisons que j’énumère maintenant.
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Les territoires en général et de la ville en particulier, peuvent devenir des aires privilégiées, repérées et exemplaires, de démocratie participative locale. Qu’il s’agisse de territoires institutionnalisés ou de territoires édifiés à partir de réseaux sociaux : cas de Bologne et de biens d’autres villes… Des outils géographiques comme la cartographie participative, couplée aux open datas, la mobilisation des ressources de la smart city, sont susceptibles d’encourager ce mouvement démocratique initié par la base sociale en vue de la promotion d’une nouvelle gouvernance.
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Souvent porteurs ou même générateurs d’inégalités, les territoires de la ville et de l’urbain peuvent devenir les espaces d’élection d’une justice procédurale fondée sur le libre exercice des capabilités humaines (Rawls, 1971, 1987). Ceci, au prix de discriminations positives équitablement distribuées, privilégiant les territoires les plus défavorisés.
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En ville comme partout, le territoire se profile comme un outil commode d’évaluation, de diagnostic et de projet.
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Dans le cadre des territorialités citadines, les pics de centralité constituent des laboratoires de rencontres inopinées (sérendipité), d’innovation et de création sociale, culturelle, voire technologique et même scientifique. Ne facilitent-ils pas les échanges, l’hybridation et la mixité socio-ethnique ou de genre ? Ce qui leur confère, de plus, le rôle d’espaces de la tolérance, d’acceptation de la différence, de familiarisation avec l’altérité.
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Les territoires de la ville deviennent des enjeux majeurs du développement durable. Pas seulement au travers de l’expérience, tendant à se généraliser, des écoquartiers, que du fait de l’instauration, au cœur de territoires appropriés, de nouveaux rapports avec une nature citadinisée que l’on souhaite voir gagner du terrain en ville. Espace de mimésis, le territoire urbain, par le contrôle social qu’il exerce, par les patrimoines et les affects qu’il dégage ou inspire, est en effet susceptible de contribuer à une éducation citoyenne du respect des biens communs environnementaux. D’autre part, les « projets alimentaires territoriaux » (France : loi de 2014), conçus sur le modèle territorial des Food Councils nord-américains, peuvent fournir l’assise d’une agriculture alternative de circuit court, respectueuse des milieux et fournissant une alimentation saine.
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Les territoires de la ville, susceptibles de fonctionner sans discontinuité temporelle, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, fournissent une opportunité d’optimisation des services et des choix individuels que réclame une société contemporaine éprise d’immédiateté consumériste, mais aussi de permanence créatrice.
35Si les territoires de la ville ont une chance d’atteindre ces différents objectifs, ce sera au prix de trois conditions essentielles : la densification impérative des espaces urbanisés ; l’acceptation de la diversité et de la mixité, humaines et sociales, n’excluant pas le contrôle des flux de tous ordres (financiers et migratoires principalement) qui parcourent villes, métropoles et pays ; une gouvernance et un aménagement durable des territoires aux bonnes échelles, du quartier à la métropole, ne négligeant pas d’indispensables ajustements interterritoriaux.
Bibliographie
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41Claval P., 1981, La logique des villes. Essai d’urbanologie, Paris, Litec.
42Debarbieux B., 1995, « Le lieu, le territoire et trois figures de rhétorique », L’Espace géographique, 2, p. 97-112.
43Di Méo G., 2011, « La territorialité : une tension régulatrice des contradictions territoriales », in Fonder les sciences du territoire, colloque international du CIST, Paris, GIS-CIST, p. 119-123.
44Di Méo G., 2010, « La métropolisation, une clé de lecture de l’organisation contemporaine des espaces géographiques », L’information géographique, A. Colin, vol. 74, n° 3, septembre, p. 23-38.
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47Lévy J., 1993, « Les apories du territoire », Espaces - temps, 51-52.
48Louiset O., 2011, Introduction à la ville, Paris, A. Colin.
49Moriconi-Ebrard, 1993, L’urbanisation du monde depuis 1950, Paris, Ed. Anthropos.
50Rawls J., 1971, 1987, Théorie de la justice, Paris, Le Seuil.
51Roncayolo M., 1990, La ville et ses territoires, Paris, Gallimard.
52Saunier P.-Y., 1995, L’Esprit lyonnais XIXe – XXe siècle, Paris, CNRS Éditions.
53Vanier M., 2015, Demain les territoires, capitalisme réticulaire et espace politique, Paris, Herman.
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