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La cellule de son centrosome jusqu'à sa paroi a inspiré la recherche en biologie à l'université de Liège
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1Depuis sa création, l’Université de Liège a eu l’honneur d’abriter dans ses murs plusieurs figures qui ont marqué la biologie par leurs découvertes. Ma présentation soulignera les données les plus originales obtenues en biologie par ces personnalités de l’alma mater.
2Le monde vivant présente une extraordinaire diversité (taille, forme…). Le dénominateur commun de tous ces êtres vivants est la cellule, unité de base de la vie. Les premières descriptions de la cellule datent du 17ème siècle avec l’avènement des premiers microscopes. Cependant, plusieurs siècles ont été nécessaires pour que la théorie cellulaire s’impose au sein de la communauté scientifique. Théodore Schwann (1810-1882), professeur d’anatomie à l’Université de Liège (1948-1978), est un des pères de la théorie cellulaire [1]. Ce physiologiste montre que la cellule est la structure élémentaire de tous les organismes vivants, qu'ils soient animaux ou végétaux, simples ou complexes. Il considère la cellule comme une unité structurellement et fonctionnellement indépendante. Théodore Schwann identifie dans les cellules animales les mêmes éléments caractéristiques (membrane, noyau et nucléole) que dans les cellules végétales [2]. L'étude du développement de la cellule doit permettre, selon lui, de comprendre la morphogenèse des structures complexes.
Entrée de l’institut de zoologie de l’Université de Liège encadrée par les statues d’Édouard van Beneden (à droite) et de Théodore Schwann (à gauche).
3La reproduction est une des activités fondamentales partagées par toutes les espèces vivantes. Elle désigne l’ensemble des processus par lesquels une espèce se perpétue, en donnant naissance à de nouveaux organismes. Dans la reproduction sexuée, la fusion des gamètes mâle et femelle conduit à l’apparition d’une cellule unique et originale : le zygote. Cette reproduction assure le brassage génétique entre deux individus, permettant le maintien d’une diversité génétique au sein des populations. Édouard van Beneden (1846-1910), professeur de zoologie, de physiologie et d’anatomie comparées et d’embryologie à l’Université de Liège, découvre chez le ver parasite du cheval le mécanisme impliqué dans la formation des gamètes : la méiose [3-7]. De plus, c’est lui qui le premier interprète correctement la réduction chromatique qui survient pendant la méiose et la fécondation qui reconstitue un génome entier.
4Le perfectionnement des techniques de microscopie a permis de discerner deux types de cellule, eucaryote et procaryote, se différenciant notamment par leur organisation. La cellule eucaryote se singularise par la présence d’un noyau, compartiment cellulaire qui isole du reste de la cellule l’information génétique portée par plusieurs molécules d’ADN qu’il contient. La cellule procaryote diffère de la cellule eucaryote par sa petite taille et l’absence de noyau. L’information génétique se trouve dans une longue molécule d’ADN cytoplasmique. La cellule eucaryote se caractérise aussi par la présence d’un réseau extrêmement développé de filaments cellulaires. En association avec diverses protéines, ces filaments assurent une armature souple et mouvante, appelée cytosquelette. Parmi ces filaments, les plus épais (25 nm de diamètre) forment des petits tubes appelés microtubules. Dans les cellules animales, les microtubules se forment à partir d’une région spécialisée du cytoplasme située à proximité du noyau et de l’appareil de Golgi, appelé centrosome. Ce centre organisateur a un rôle dans l'orientation des cellules et est à l'origine des cils et des flagelles. Le centrosome se duplique au cours de la phase de synthèse (pendant l'interphase) et, pendant la mitose, se sépare pour former les deux pôles du fuseau mitotique (appareil mitotique). C'est Édouard van Beneden (1846-1910) qui a donné la première description détaillée et exacte du centrosome dans l'œuf ou les blastomères du ver Ascaris en division [4]. C'est lui qui, le premier, leur a attribué un rôle essentiel dans la division cellulaire et en a admis l'existence dans toute cellule, même au repos.
5Outre l’existence d’un noyau, les cellules eucaryotes se caractérisent par la présence de nombreux organites limités par une ou deux membranes dans leur cytoplasme. Ces compartiments cytoplasmiques assurent des fonctions spécialisées au sein de la cellule. Parmi ceux-ci, les mitochondries sont des centrales énergétiques ; elles sont le siège de la respiration cellulaire aérobie. Les travaux de Maurice Chèvremont (1908-1996), Professeur d’histologie et d’embryologie de la Faculté de Médecine à l’Université de Liège, vont modifier notre connaissance sur les mitochondries. En filmant des cellules vivantes à fort grossissement en contraste de phase, il révèle que les mitochondries ne sont pas des bâtonnets rigides et immobiles comme décrits par les microscopistes électroniciens, mais sont des structures douées de mouvements [8]. Quelques années plus tard, en appliquant des techniques histoautoradiographiques basées sur l’incorporation de thymidine marquée au tritium, il démontre que les mitochondries renferment de l’ADN et que celui-ci est capable de se répliquer à l’intérieur des mitochondries [9-10]. Cette découverte d’ADN mitochondrial apparut comme une atteinte à un véritable dogme. À cette époque, il était en effet admis que l’ADN, constituant principal porteur de l’information génétique des chromosomes, ne se trouvait qu’à l’intérieur du noyau. Actuellement, nous savons que les mitochondries renferment plusieurs copies d’ADN dont l’organisation rappelle celle des cellules procaryotes. Cependant, les mitochondries demeurent dépendantes de l’information génétique stockée dans l’ADN nucléaire pour la plupart de leurs protéines constitutives.
6La cellule procaryote présente une organisation plus simple que celle de la cellule eucaryote. Outre l’absence de noyau, elle ne possède pas d’organites. Sa membrane plasmique est surmontée d’une paroi rigide comme dans certaines cellules eucaryotes. Cependant, la composition de la paroi des cellules procaryotes, comme les bactéries, est différente de celle des cellules eucaryotes. Jean-Marie Ghuysen (1925-2004), professeur à l’école de pharmacie à l’Université de Liège, étudie la structure chimique des parois cellulaires bactériennes. Il démontre que la macromolécule typique de la paroi bactérienne est un complexe formé de chaînes polysaccharidiques reliées entre elles par de courtes chaînes peptidiques. Il propose de désigner ce complexe par le mot « peptidoglycane » [11]. Par la suite, s’intéressant au mode d’action de la pénicilline sur la biosynthèse du peptidoglycane, il révèle avec son équipe que la pénicilline inhibe la transpeptidase, une enzyme responsable de la réticulation du peptidoglycane pour former une paroi cellulaire rigide [12-13]. C’est aussi sous son impulsion que la première structure tridimensionnelle d’une protéine, une enzyme impliquée dans la biosynthèse du peptidoglycane, a été résolue en Belgique [14].
Références :
71. Fredericq L. (1884). Théodore Schwann : sa vie et ses travaux. C.A. Desoer (Liège).
82. Schwann T. (1839). Mikroskopische Untersuchungen über die Uebereinstimmung in der Struktur und dem Wachsthum der Thiere und Pflanzen. Berlin, Sander.
93. Van Beneden É. (1883). Recherches sur la maturation de l'oeuf et la fécondation. Archives de Biologie, 4, 265-640.
104. Hamoir G. (1994). La découverte de la méiose et du centrosome par Édouard Van Beneden. Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1-128.
115. Brachet A. (1923). Notice sur Edouard van Beneden, membre de l'Académie. Annuaire de l'Académie Royale de Belgique, 167-242.
126. Hamoir G. (1992). The discovery of meiosis by E. Van Beneden, a breakthrough in the morphological phase of heredity. Int. J. Dev. Biol. 36, 9–15.
137. Van Beneden É, Neyt A. (1887). Nouvelles recherches sur la fécondation et la division mitosique chez l'Ascaride mégalocéphale. Bull. Acad. Royale Belgique 3éme sér. 14, 215–295.
148. Fréderic J, Chèvremont M. (1952). Investigations on the chondriosomes of living cells by phase contrast microscopy and microcinematography. Arch Biol (Liege), 63(1), 109-131.
159. Chèvremont M, Chèvremont-Comhaire S, Baeckeland E. (1959). Action of neutral and acid desoxyribonucleases on living somatic cells cultivated in vitro. III. Histoautoradiographic study after incorporation of tritium-labelled thymidine. Arch Biol (Liege), 70, 833-849.
1610. Baeckeland E, Chèvremont-Comhaire S, Chèvremont M. (1957). Cytophotometric determinations of desoxyribonucleic acids (nuclear and cytoplasmic) in cells treated in vivo by an acid desoxyribonuclease. C R Hebd Seances Acad Sci, 245(25), 2390-2393.
1711. Jack L. Strominger, Ghuysen JM. (1967). Mechanisms of Enzymatic Bacteriolysis. Cell walls of bacteri are solubilized by action of either specific carbohydrases or specific peptidases. Science, 156(3772), 213-221.
1812. Frère JM, Duez C, Ghuysen JM, Vandekerkhove J. (1976). Occurrence of a serine residue in the penicillin-binding site of the exocellular DD-carboxy-peptidase-transpeptidase from Streptomyces R61. FEBS Lett., 70(1), 257-260.
1913. Frère JM, Joris B, Shockman G. (1985). Penicillin-Sensitive Enzymes in Peptidoglycan Biosynthesis. Critical Reviews in Microbiology, 11(4), 299-396.
2014. Dideberg O, Frère JM, Ghuysen JM. (1979). Crystallographic data for the DD-carboxypeptidase-endopeptidase of low penicillin sensitivity excreted by Streptomyces albus g. J Mol Biol., 129(4), 677-679.