BASE

Biotechnologie, Agronomie, Société et Environnement/Biotechnology, Agronomy, Society and Environment

1370-6233 1780-4507

 

Factor de impacto: 1,087 (2020)

ya que 05 febrero 2011 :
Vista(s): 1781 (14 ULiège)
Descargar(s): 139 (7 ULiège)
print        
Moussa Baragé, Abdourahamane Balla & Toudou Adam

Identification des sources de tolérance au stress hydrique sur des espèces sauvages de la famille des Cucurbitacées en culture in vitro

(volume 10 (2006) — numéro 1)
Article
Open Access

Documento adjunto(s)

Anexidades

Notes de la rédaction

Reçu le 4 avril 2005, accepté le 16 août 2005

Résumé

L’objectif de cette étude est d’identifier des sources de tolérance au stress hydrique, ce qui permettra de choisir le matériel adéquat permettant le transfert de gènes gouvernant la tolérance à la sécheresse au patrimoine génique des principales espèces cultivées. Pour cela, une méthode a été mise au point pour évaluer la tolérance au stress hydrique in vitro. Elle se base sur la capacité de récupération des calus après une déshydratation sous une hotte à flux laminaire jusqu’à une perte de 50 % de leur poids frais. L’étude a porté sur neuf accessions d’espèces sauvages et trois variétés cultivées de la famille des Cucurbitacées. Il ressort que les trois variétés cultivées (melon, concombre et pastèque), ainsi que certaines accessions d’espèces sauvages sont sensibles au stress hydrique. Les accessions sauvages de Cucumis africanus (L4), Cucumis dipsaceus, Citrullus colocynthis (Arabie Saoudite) et Citrullus colocynthis (Niger) sont manifestement tolérantes.

Mots-clés : Cucurbitacées, tolérance au stress hydrique, espèces sauvages

Abstract

Identification of tolerance sources to the water stress on wild species of the cucurbitaceous family in in vitro culture. The objective of this survey is to identify sources of tolerance to the water stress. This will permit to choose the adequate material allowing the transfer of genes governing the drought tolerance to the gene pool of the main cultivated species. Indeed, a method has been developed to evaluate the water stress tolerance in vitro. It is based on the capacity of the calus recuperation after dehydration under a laminar flux hot until a loss of 50 % of their fresh weight as a basis. The study included nine accessions of wild species and three cultivated varieties of the cucurbitaceous family. It comes out that the three cultivated varieties (melon, cucumber and watermelon), as well as some wild species accessions are sensitive to the water stress. The wild accessions of Cucumis africanus (L4), Cucumis dipsaceus, Citrullus colocynthis (Saudi Arabia) and Citrullus colocynthis (Niger) are obviously tolerant.

Keywords : Cucurbitaceous, tolerance to the water stress, wild species

1. Introduction

1De nos jours, la sécheresse est considérée comme le stress abiotique d’incidence majeure sur les plantes cultivées. Dès le début des années 1980, Christiansen (1982) estimait que près de la moitié des terres disponibles pour l’agriculture, soit 6 millions ha, était menacée par la pénurie d’eau de qualité. Ce problème de manque d’eau se pose avec beaucoup plus d’acuité dans les régions sahéliennes où des cycles de sécheresse persistants posent d’énormes difficultés à la production agricole, provoquant des périodes de famine récurrentes. D’une manière générale, les espèces cultivées sont sensibles aux stress climatiques en raison d’une perte progressive de tolérance due au processus de domestication souvent axée sur d’autres critères. C’est le cas des Cucurbitacées alimentaires cultivées dans toutes les régions tropicales et subtropicales des deux hémisphères (Jelaska, 1986). En théorie, les espèces sauvages possèdent ce caractère de tolérance puisqu’elles sont continuellement soumises à une pression de sélection naturelle dans des écosystèmes variés (Dabauza et al., 1998). L’objectif de cette étude est d’identifier des sources de tolérance au stress hydrique sur des espèces sauvages de la famille des Cucurbitacées afin d’introgresser des gènes qui gouvernent cette caractéristique intéressante dans le patrimoine génique des espèces cultivées grâce à un programme d’amélioration génétique.

2. Matériel et méthodes

2.1. Matériel végétal

2Neuf accessions d’espèces sauvages de la famille des Cucurbitacées et trois variétés d’espèces cultivées de la même famille ont été utilisées lors de cette étude. Les accessions d’espèces sauvages sont : Cucumis africanus Linley L4, Cucumis myriocarpus Naud L2, Cucumis zeyheri Sond L1 et L2, Cucumis anguria var. longipes, Cucumis dipsaceus Ehrenb, Citrullus colocynthis L. Shrad (récoltée en Arabie Saoudite), Citrullus colocynthis L. Shrad (récoltée au Niger) et Cucurbita sp. Duch (récoltée au Niger). Quant aux variétés cultivées, il s’agit du melon Cucumis melo L. var. Amarillo Oro (Batllé), du concombre Cucumis sativus L. var. Marketer (Fitó S.A) et de la pastèque Citrullus lanatus Thumb var. Dulce Maravilla (Sluis, Groot).

2.2. Désinfection, germination des semences et obtention de plantules saines

3Après avoir éliminé la couverture séminale, les semences sont superficiellement désinfectées par immersion pendant 30 minutes dans une solution diluée à 50 % d'eau de Javel commerciale (équivalent à 25 g.l-1 de chlore actif). A cette solution, on ajoute 2 à 3 gouttes de détergent 7x-o-matic (Flow laboratories) qui aide à casser la tension superficielle des tissus, favorisant ainsi le contact de ces derniers avec la solution de chlore. Après la désinfection, on élimine les restes de la solution désinfectante au moyen de trois lavages, durant 5, 10 et 15 minutes respectivement, avec de l’eau distillée stérile. Les semences sont ensuite placées dans des boîtes de Petri munies de papier filtre saturé d’eau distillée stérile. Les boîtes de Petri scellées au Parafilm, sont placées dans l’obscurité (à 28 ºC) pendant 36 à 72 heures selon les accessions. Après l’émergence des radicules, les semences sont transférées dans des tubes à essai (3,5.25 cm ou 3,5.20 cm, suivant la longueur de la tige) contenant chacun 33 ml du milieu de germination (MG) (Moreno et al., 1986). Les tubes sont placés dans une chambre de culture avec photopériode (16 heures de lumière, intensité lumineuse de 34 mE.m-2.s-1, température de 24 ºC ± 2 ºC, HR de 70 % pendant la période obscure et de 40 % pendant la période lumineuse) jusqu’à l’apparition des deux premières feuilles développées. Celles-ci sont à l’origine des explants qui constituent le point de départ de l’obtention de calus.

2.3. Culture d’explants, obtention de calus et évaluation de la tolérance au stress hydrique

4Des explants de 0,5 cm2 des deux premières feuilles développées sont utilisés. Les explants sont cultivés dans des boîtes en verre de 250 ml de capacité, à raison de huit explants par boîte. Celles-ci contiennent 40 ml de milieu de culture solide et sont incubées dans la chambre de culture. Pour induire la formation des calus, le milieu de culture adéquat pour chaque espèce sauvage ou variété cultivée a été choisi sur la base des études préalables du groupe de Moreno (1984) et Moreno et al. (1986). Ainsi, le milieu de culture NB2020 a été retenu pour les trois variétés cultivées et les accessions d’espèces sauvages de C. anguria var. longipes, C. dipsaceus et Cucurbita sp. (récoltée au Niger). Par contre, pour les autres accessions d’espèces sauvages, le milieu le plus indiqué était le DB1020. Les calus primaires sont obtenus après 25-30 jours d’incubation. L’essai d’évaluation de la tolérance au stress hydrique a été mené avec des inocules de calus primaires de 0,5 cm de diamètre. Ceux-ci ont été cultivés à raison de huit par boîte durant une période de 20 jours. Après cette période de croissance, les calus ont été soumis au traitement de stress hydrique.

2.4. Procédure expérimentale d’évaluation de la tolérance au stress hydrique in vitro

5Un total de 48 calus de chaque accession d’espèces sauvages et/ou variétés cultivées ont été évalués. Le traitement de stress hydrique a consisté en une déshydratation des calus jusqu’à 50 % de leur poids initial, en conditions axéniques. C’est ainsi que, les calus étaient déposés sur une balance sensible munie de papier filtre stérile et exposés sous une hotte à flux laminaire. Après la déshydratation, les calus ont été transférés sur des milieux de culture frais et incubés durant 15 jours pour déterminer leur capacité de récupération.

2.5. Variables étudiées

6Les variables étudiées sont le poids initial des calus avant le traitement de stress hydrique, le temps écoulé jusqu'à ce que les calus perdent 50 % de leur poids initial, le poids des calus après le traitement de stress hydrique (déshydratation) et le poids final des calus après 15 jours de culture sur des milieux frais.

7Comme variable dépendante, la capacité de récupération des calus a été calculée de la façon suivante :

8Degré de récupération =

Image1

9Les données ont été traitées avec le logiciel Statgraphics 5.0.

3. Résultats et discussion

10Les tableaux 1 et 2 résument les valeurs correspondant au poids frais initial des calus, au poids des calus après une période de déshydratation (pour qu’ils perdent la moitié de leur poids frais initial), au poids frais des calus après une période de récupération, à la croissance nette ainsi qu’au temps (minutes) requis pour que les calus se déshydratent jusqu’à 50 % et à leur capacité de récupération sur le milieu de culture frais.

11Comme on peut le constater, le poids initial des calus dépend de la variété ou de l’accession. Cependant, le plus intéressant est que le poids final (après la déshydratation et la période subséquente de récupération) ne dépend pas du poids initial. La croissance nette des calus de certaines accessions sauvages, comme C. africanus (L4), C. dipsaceus, C. colocynthis (Arabie Saoudite), et C. colocynthis (Niger), est relativement haute et cela pourrait indiquer un certain degré de tolérance au stress hydrique.

12Avec l’aide des logiciels Statographics 5.0 et Multiple Range Test, l’analyse statistique de comparaison de moyenne des temps requis pour que les calus perdent 50 % de leur poids initial fait ressortir une différence significative entre les variétés cultivées et certaines accessions d’espèces sauvages. Concernant les variétés cultivées, les calus du concombre tardent à se déshydrater beaucoup plus que ceux du melon, mais leur capacité de récupération est faible (la croissance nette ne dépasse pas 0,35 g). La variété la plus sensible est celle de la pastèque, puisqu’elle a un temps de déshydratation intermédiaire (entre le melon et le concombre) mais sa capacité de se réhydrater est nulle. En fait, les calus de la pastèque ont été incapables de se récupérer après le traitement de stress et leur poids final est inférieur à l’initial.

13Quant aux accessions sauvages, de C. anguria var. longipes, C. zeyheri (L1 et L2) et Cucurbita sp. (Niger), elles ont un temps de déshydratation et une capacité de récupération similaires à ceux du concombre. L’accession sauvage de C. myriocarpus (L2) a aussi un temps de déshydratation similaire à celui du concombre, mais sa capacité de récupération (estimée en fonction du gain de poids des calus) est beaucoup plus grande. En effet, les calus des accessions sauvages de C. africanus (L4), C. dipsaceus et C. colocynthis (d’Arabie Saoudite et du Niger) requièrent non seulement un temps de déshydration majeur mais aussi leur capacité de récupération est nettement supérieure.

14Après le traitement de stress hydrique et la culture sur le milieu frais, le gain de poids des calus peut découler de l’absorption d’eau à partir du milieu et/ou des cycles successifs de division cellulaire. Le degré de récupération sera de 50 % quand le poids final des calus est égal au poids initial. Dans ce cas, le gain de poids pourrait seulement découler de l’absorption d’eau à partir du milieu. Quand le degré de récupération se situe entre 75 et 100 %, il est difficile que le gain de poids soit dû à l’absorption d’eau seulement. Dans ces circonstances, il faut espérer, au moins en partie, qu’il découle de l’existence de processus de division cellulaire. Quand le degré de récupération est supérieur à 100 %, cela indique que les cellules du calus ont pu supporter le stress hydrique et, après la réhydratation, ils ont initié un processus de croissance sur la base de cycles successifs de division cellulaire.

15En considérant comme critère de tolérance 110 % (la valeur qui résulte de la multiplication de la moyenne du melon et du concombre par 1,5), les valeurs du tableau 2 indiquent que les accessions sauvages de C. africanus (L4), C. myriocarpus, (L2), C. dipsaceus, C. colocynthis (Arabie Saoudite) et C. colocynthis (Niger) exhibent une haute tolérance au stress hydrique. Il convient de mettre en relief que chez ces accessions sauvages, on enregistre une croissance importante des calus sur le milieu frais juste après le traitement, ce qui sous-entend que le stress hydrique n’a non seulement pas affecté la croissance des calus, mais, apparemment, il lui a servi de stimulus. A ce sujet, en 1992, Van Wann, a fait une évaluation visuelle de la tolérance au stress hydrique sur une collection de 300 accessions de la famille des cucurbitacées. Quatre de ces accessions présentent une tolérance au stress hydrique (trois collectées dans l’ex-Union Soviétique et une en Iran).

4. Conclusion

16Au vu des résultats de cette étude, les trois variétés cultivées de melon, concombre et pastèque sont sensibles au stress hydrique. La même appréciation peut être faite sur les accessions de Cucumis anguria var. longipes, Cucumis zeyheri (L1 et L2) et Cucurbita sp. (Niger). Au contraire, les accessions sauvages de Cucumis africanus (L4), Cucumis dipsaceus, Citrullus colocynthis (Arabie Saoudite) et Citrullus colocynthis (Niger) manifestent une haute tolérance au stress hydrique.

17Il serait opportun d’étendre cette étude à des essais in vivo (en plein champ) afin de vérifier les résultats obtenus in vitro.

18Remerciements

19Nous remercions le Dr Vicente Moreno Ferrero, Chercheur à l’Institut de Biologie Moléculaire et Cellulaire de Plantes de Valencia (Espagne), pour nous avoir cédé une partie du matériel végétal et facilité l’accès au Laboratoire ainsi que la Banque Islamique de Développement (BID) pour l’octroi du financement qui a permis la réalisation de cette étude.

Bibliographie

Christiansen MM. (1982). World environmental limitations to food and fiber culture. In Christiansen MM., Lewis CF. (eds). Breeding plant for less favorable environments. New York: Wilded Interscience, p. 1–11.

Dabauza M., Gonzalez L., Bordas M., Ramon D., Moreno V. (1998). Regeneration and characterization of Cucumis melo L (+) Cucumis anguria var. longipes (Hook Fil.) Meeuse somatic hybrids. Plant Cell. Tissue Organ Cult. 52, p. 123–131.

Jelaska S. (1986). Cucurbits. In Bajaj YPS. (ed). Biotechnology in agriculture and forestry 2. Crops I. Berlin: Springer Verlag, p. 371–386.

Moreno V. (1984). Aplicaciones del cultivo in vitro de células vegetales en la mejora genética. SP. Valentia, Espana: Universidad Politécnica de Valencia, 152 p.

Moreno V., Roig LA., Zubeldia L., Orts MC., Roche MV. (1986). Isolation and culture of protoplasts from Cucumis metuliferus and Cucurbita martinezii and a method for their fusion with Cucumis melo protoplasts. Cucurbit Genet. Coop. Rep. 9, p. 74–77.

Van Wann E. (1992). Evaluation of the US cucumber germplasm collection for tolerance to soil moisture deficit. Cucurbit Gen. Coop. Rep. 15, p. 1–3.

Para citar este artículo

Moussa Baragé, Abdourahamane Balla & Toudou Adam, «Identification des sources de tolérance au stress hydrique sur des espèces sauvages de la famille des Cucurbitacées en culture in vitro», BASE [En ligne], volume 10 (2006), numéro 1, 3-6 URL : https://popups.uliege.be/1780-4507/index.php?id=1251.

Acerca de: Moussa Baragé

Département des Productions végétales. Faculté d’Agronomie, BP 10960, Université Abdou Moumouni, Niamey (Niger). E-mail : mouba@refer.ne

Acerca de: Abdourahamane Balla

CRESA de Niamey. Faculté d’Agronomie, BP 10960, Université Abdou Moumouni, Niamey (Niger).

Acerca de: Toudou Adam

Département des Productions végétales. Faculté d’Agronomie, BP 10960, Université Abdou Moumouni, Niamey (Niger).