Fédéralisme Régionalisme

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In memoriam : René Doutrelepont

(Volume 6 : 2005-2006 - Affiliations, engagements, identités : l'exemple wallon)
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1René Doutrelepont était Président de l’Institut de Sciences Humaines et Sociales et Président du Centre Liégeois d’Étude de l’Opinion, lorsqu’il est décédé subitement le 1er avril 2005, à 57 ans.

2Partir un premier avril, c’était assez bien son genre d’ironie discrète. Tous ceux qui ont collaboré d’une façon ou d’une autre avec René Doutrelepont ont gardé le souvenir de son humour en demi-teinte. Ils ont aussi eu l’occasion d’éprouver, à un moment ou un autre, son sens de la loyauté et de la solidarité. Tous ceux-là, ont connu, au-delà du professeur, du méthodologue et aussi du gestionnaire, une personnalité chaleureuse et surtout, fédératrice : un bâtisseur d’équipe.

3Il nous était impossible de réunir, dans un dossier scientifique, tous ceux qui ont eu l’occasion de collaborer avec lui. Mais nous avons souhaité que les plus proches, au moins, aient l’occasion de lui rendre le genre d’hommage qu’il aurait souhaité : s’associer pour produire une publication commune autour de certains des thèmes qui ont guidé toute son activité scientifique.

4Dès sa thèse de doctorat, René Doutrelepont, en 1982 s’est intéressé au rapport entre la statistique et la sociologie. Cela l’a conduit, assez naturellement, à prendre la direction du CLEO (Centre d’Étude de l’Opinion de l’ULg) en 1985. Le CLEO s’est vite imposé comme un outil efficace de réalisation d’enquêtes sociologiques mais fonctionnait, en dehors de son Président, essentiellement sur base de collaborations ponctuelles.

5Les choses ont changé au premier septembre 1988 lorsque le CLEO et la FAR (Fondation André Renard, centre de formation de la FGTB) ont obtenu de la Présidence de la Région Wallonne une convention de recherche destinée à mettre sur pied une enquête récurrente sur «les opinions et les mentalités» en Wallonie. Centrée théoriquement sur la notion d’identité sociale telle qu’elle est présentée dans cette série de textes, cette enquête faisait le point aussi sur toute une série d’éléments de l’opinion wallonne en général : les valeurs, la confiance dans les institutions, la connaissance du nouveau paysage politique issu des vagues successives de régionalisation. Cette enquête fut réitérée à six reprises de 1988 à 1991 et a définitivement installé le CLEO dans le cadre de la sociologie politique au sens large du terme.

6Parallèlement à cette activité, l’équipe du CLEO (à géométrie variable selon les époques) s’est aussi beaucoup investie dans l’activité méthodologique proprement dite, à savoir la construction d’enquêtes dans des domaines très différents, et pour des commanditaires eux aussi différents, comprenant tous les niveaux de pouvoirs publics (de l’Europe aux communes) mais aussi de nombreuses associations, ou entreprises soucieuses de mieux cerner les attentes de leur public.

7Au cours de cette longue période, le CLEO a participé, sous la Présidence de René Doutrelepont, à des projets de recherche d’ampleur croissante, de plus en plus souvent en partenariat avec d’autres universités, tout en faisant de manière récurrente retour à ses premières amours puisque le thème de l’identité wallonne, qui fait l’objet du présent dossier était à nouveau investigué dans une enquête «wallobaromètre» en 1997 et dans la recherche «identité et capital social» de 2003 à 2006.

8Parallèlement à cette carrière de directeur de recherches, René Doutrelepont a aussi marqué de nombreuses générations d’étudiants en leur enseignant, outre la méthodologie de l’enquête (pas toujours facile à faire digérer à des étudiants de sociologie), des bases solides de réflexion critique (sociologie des idéologies, épistémologie de la sociologie). L’ensemble de son activité lui a d’ailleurs valu d’être fait Membre de l’Académie Royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, titre auquel il était particulièrement attaché.

9Enfin, porteur durant près de deux ans du projet d’Institut de Sciences Humaines et Sociales au sein de l’ULg, il en est devenu le premier président lors de sa création au 1er janvier 2005. Ce ne fut pas, là non plus, une tâche toujours facile : il s’agissait de rendre visibles les sciences sociales au sein de l’Université de Liège dans un contexte institutionnel mouvant (disparition de l’ancienne Faculté d’Économie, de Gestion et de Sciences Sociales, création de HEC-École de Gestion de l’ULg). Il était de plus en plus investi dans le développement de cet Institut lorsque la mort l’a emporté en quelques secondes il y a maintenant un an et demi.

10Ses plus anciens collaborateurs ont tout de suite pensé faire quelque chose pour lui rendre hommage, mais ils voulaient faire quelque chose qui aurait plu à René Doutrelepont ; un hommage non pas à travers une cérémonie de souvenir inévitablement morose mais à partir de ce qui a animé toute sa vie : sa passion de comprendre le monde et en particulier la société au sein de laquelle nous vivons.

11C’est cet hommage que le lecteur a entre ses mains. Ce numéro particulier de Fédéralisme-Régionalisme tente de faire le point sur près de deux décennies de recherche sur l’identité et les valeurs en Wallonie. Sans constituer en rien une «clôture» (plusieurs d’entre nous sont engagés dans la relance de cette ligne de recherche), cette réflexion commune constitue un «point d’orgue», un moment de synthèse que René Doutrelepont n’a pas eu le temps de faire lui-même et que nous offrons à sa mémoire.

12Mais surtout, cette réflexion commune constitue aussi l’illustration de l’esprit qui a guidé toute l’histoire du CLEO : l’esprit d’équipe. La curiosité scientifique, oui, mais la curiosité scientifique à plusieurs. On trouve beaucoup de textes expliquant que la recherche scientifique est une aventure collective. On trouve beaucoup moins de scientifiques qui aient réussi à appliquer cette idée dans leur pratique quotidienne. René Doutrelepont était de ceux-là et ce n’est pas la moindre des raisons pour lesquelles il nous manque.

Jean Beaufays

Véronique Biquet

Patrick Biren

Marie-Thérèse Casman

Anne Cornet

Dimitri Coutiez

Maryse De Kerschieter

Dimitri Deflandre

Anne Discry

Sébastien Fontaine

Éric Geerkens

Frédéric Heselmans

Patrick Italiano

Marc Jacquemain

Francine Kinet

Michel Laffut

Christophe Lejeune

Sébastien Lemaître

Christine Mainguet

Françoise Mulkay

Marjorie Nibona

Anne-Marie Offermans

Jérôme Pieters

Élisabeth Scherlizin

Caroline Simaÿs

Michel Vandekeere

José Verdin

Pierre Verjans

Isabelle Willems

Pour citer cet article

, «In memoriam : René Doutrelepont», Fédéralisme Régionalisme [En ligne], Volume 6 : 2005-2006 - Affiliations, engagements, identités : l'exemple wallon, URL : https://popups.uliege.be/1374-3864/index.php?id=338.